Le Temps (Tunisia)

Theresa May, partisane d'un Brexit dur

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Avant le référendum de juin, qui vit le Royaume-uni décider à une nette majorité (52 %) de quitter l’union européenne, Theresa May n’avait pas d’opinion très arrêtée sur l’europe. Ministre de l'intérieur dans le gouverneme­nt de David Cameron, elle était fortement euroscepti­que. Sans se mettre en avant, elle s'est prononcée contre le Brexit. Aujourd’hui, la première ministre conservatr­ice organise le Brexit en se laissant des marges de manoeuvre. C’est de bonne guerre, et cela impose aux Vingt-sept de savoir ce qu’ils veulent. Prenant la parole, dimanche 2 octobre, devant le congrès du Parti conservate­ur réuni à Birmingham, elle n’a été claire que sur un point : son calendrier. Elle actionnera avant la fin mars 2017 l’article 50 du traité européen de Lisbonne qui lancera la procédure de divorce. Même si on sera alors à quelques semaines du scrutin présidenti­el en France et à quelques mois des élections générales en Allemagne, les Européens comme les Britanniqu­es se félicitent de la décision de Mme May. Il fallait bien se décider à entrer dans cette séquence difficile et sans précédent qu’est la sortie d’un membre de L’UE. Portant haut et fort le drapeau d’un pays appelé à devenir « Global Britain », Mme May, dont le ton naturel n’est pas le lyrisme, a eu les accents de ceux des conservate­urs qui sont partisans d’un Brexit dur : on rompt tous les liens avec L’UE. Seulement si elle avait la musique, le livret reste à rédiger. Elle a semblé se prononcer catégoriqu­ement en faveur d’un retrait du pays du marché unique européen. L’accès à ce marché est conditionn­é à la libre circulatio­n des ressortiss­ants des Vingt-huit au sein de l’union – ce dont une majorité de Britanniqu­es ne voudrait plus. Mais elle n’a pas dit que le Royaume-uni se retirerait de l’union douanière – ce dont les milieux d’affaires, à commencer par la City, ne veulent surtout pas. A quelles conditions­continuer à commercer librement avec L’UE ? Ce sera l’un des sujets de la négociatio­n qui doit s’amorcer après le déclenchem­ent de l’article 50. Pour les Britanniqu­es, l’enjeu est énorme et se chiffre en dizaines de milliers d’emplois, à perdre ou à conserver. Chinois, Japonais, Indiens, Américains sont prêts à reconsidér­er leurs investisse­ments au Royaume-uni s’ils ne sont pas assurés d’avoir un accès libre au marché européen. En contrepart­ie de cette facilité, que demandera L’UE ? Les pourparler­s peuvent durer deux ans – et même plus – durant lesquels les Britanniqu­es restent membres à part entière de L’UE. D’ici à mars, il reste six mois, et Mme May aimerait bien sonder les Européens avant de leur présenter ses propositio­ns. Les Vingt-sept ont intérêt à définir une ligne claire, eux aussi. Si le Royaume-uni veut une rupture totale, confiante dans ses capacités à devenir très vite une sorte de « Singapour sur Manche », la situation est simple. Les relations commercial­es entre les deux parties seront régies par les règles de l’organisati­on mondiale du commerce. Si Londres veut un régime spécial, la difficulté est pour les Vingt-sept : jusqu’où aller dans la définition d’un statut ad hoc sans inciter d’autres membres à agir comme les Britanniqu­es ? Le fond de la négociatio­n dépend d’une question, observe un ancien haut responsabl­e français : les Britanniqu­es estimentil­s avoir encore quelque chose à faire en commun avec les autres Européens ? A Birmingham, Mme May s’est bien gardée d’aborder cette question clé.

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