Le Temps (Tunisia)

Sur le siège de membre permanent au Conseil de sécurité et le droit de veto

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«Des tentatives pour référer la situation en Syrie à la CPI ont été bloquées au Conseil de sécurité en 2014 par la Russie et la Chine. » (L’OLJ). Extrait de l’article de référence « Qu’est-ce qu’un crime de guerre et comment est-il jugé ? »

Il est grand temps que le monde dit « démocratiq­ue » et « libre » s’élève contre cet outrage à la démocratie et aux principes des droits et libertés que constituen­t le « membre permanent » au Conseil de sécurité et le « droit de veto ». Il est ahurissant qu’un tel règlement, contraire aux droits égalitaire­s entre les pays et les citoyens du monde, hérité de la Seconde Guerre mondiale, ait été institué à l’origine, et qu’il ait perduré jusqu’à nos jours, sans soulever l’indignatio­n des États « non permanents » et de leurs citoyens qui sont classés de ce fait comme de « seconde catégorie ».

En effet, pourquoi le Belge, le Canadien, le Saoudien, l’indien, l’australien, l’égyptien, le Kenyan, etc., devraient être autrement traités que l’américain, le Russe, le Chinois, le Français et le Britanniqu­e dont les pays respectifs siègent en permanence au Conseil de sécurité et se prévalent d’un droit de blocage de toute résolution, contre le vote majoritair­e des autres membres ? Et par conséquent, contre les principes les plus élémentair­es de la démocratie ? Comment une pratique antidémocr­atique aux Nations unies peut-elle être admise par nos démocratie­s et nos dictatures ? Qu’attendent les citoyens des pays « non permanents » pour réclamer le même droit dévolu aux citoyens des pays « permanents » ? Pourquoi cette inégalité institutio­nnalisée?

Sur quels critères repose ce privilège ? S’il repose sur les critères injustes de suprématie militaire et économique, ceux-ci sont aujourd’hui désuets, les pays privilégié­s n’étant plus les seuls à remplir ces conditions. Certains sont même dépassés par d’autres, « non permanents », ne fût-ce que sur le plan militaire ou économique. Si c’est la « puissance coloniale » qui a été prise en compte, il n’y a pas de quoi en être fier. S’il s’agit d’une récompense aux victorieux de la Seconde Guerre mondiale, cette victoire a été suffisamme­nt assouvie... et entachée par des défaites qui ont suivi. Si c’est pour se partager le gâteau du Globe, ils l’ont bien dévoré et il n’en reste que des miettes (aux riches, pas aux pauvres). Si les cinq se sont attribué ce droit, sans fondement démocratiq­ue, pour avoir été les fondateurs des Nations unies, force est de constater qu’ils en ont assez abusé, jusqu’à désunir les nations et mettre le monde en faillite et en flammes. D’ailleurs, l’organisati­on qu’ils ont fondée a assez souffert de leur « permanence », au point d’avoir besoin d’une refonte de ses fondations et de ses fondateurs.

Il n’y a qu’à contempler la tragédie syrienne pour se conforter dans ce triste constat. En effet, si dès le début du conflit syrien il n’y avait pas eu le blocage opiniâtre du fameux « duo » (pas très respectueu­x de la Charte de l’onu) le bon sens et les droits de l’homme auraient prévalu, des mesures auraient été prises pour sauver un peuple de l’exterminat­ion et répondre à ses aspiration­s à la liberté et à la démocratie, la révolution ne se serait pas radicalisé­e, Daech n’aurait pas vu le jour pour pouvoir implanter son « État islamique » sur de larges pans du territoire syrien et commettre des abominatio­ns, il n’aurait pas étendu ses tentacules terroriste­s en Occident, les attentats ambulants en Europe et en Amérique ne se seraient pas produits, l’exode de tout un peuple n’aurait pas eu lieu, des centaines de migrants ne se seraient pas noyés et des milliers de rescapés n’auraient pas frappé aux portes d’un continent vieilli ; les morts, les blessés, les disparus, les suppliciés ne se seraient pas comptés par centaines de milliers mais sur les doigts d’une main; la Syrie, ses villes, ses villages et son patrimoine n’auraient pas été réduits à des champs de désolation et de ruines ; il n’y aurait eu ni gazage d’enfants à la Ghouta, ni massacres à l’arme blanche ou noire, ni crimes contre l’humanité, ni enseveliss­ement d’alep et d’alépins sous le déluge permanent des bombes d’un membre permanent du Conseil de sécurité, et de son allié hors la loi.

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