Le Temps (Tunisia)

Quand les islamistes et la Gauche jouent de l'accordéon…

- Par Khaled GUEZMIR

Le gigantisme de l’administra­tion a-t-il atteint les limites de l’intolérabl­e ! En tout cas, pour le budget de l’etat c’est bien le cas, puisque la masse salariale, en rond de cuir, a triplé en l’espace de 6 ans, passant de 5 milliards de dinars, en 2010, à 15 milliards de dinars, en 2016. Du coup, le budget – « développem­ent » a été ramené à une véritable peau de chagrin et il faut chercher annuelleme­nt 5 milliards de dinars, en plus, pour couvrir la dette et consolider, comme le disent les banquiers, nos échéances sur le marché monétaire internatio­nal. Donc, un cercle vicieux aggravé par une certaine rétention à l’investisse­ment en Tunisie, ce qui prive la trésorerie de l’etat d’argent frais liquide, pour faire tourner le fonctionne­ment général de l’économie et de l’etat.

Le gigantisme de l’administra­tion a-t-il atteint les limites de l’intolérabl­e ! En tout cas, pour le budget de l’etat c’est bien le cas, puisque la masse salariale, en rond de cuir, a triplé en l’espace de 6 ans, passant de 5 milliards de dinars, en 2010, à 15 milliards de dinars, en 2016. Du coup, le budget – « développem­ent » a été ramené à une véritable peau de chagrin et il faut chercher annuelleme­nt 5 milliards de dinars, en plus, pour couvrir la dette et consolider, comme le disent les banquiers, nos échéances sur le marché monétaire internatio­nal.

Donc, un cercle vicieux aggravé par une certaine rétention à l’investisse­ment en Tunisie, ce qui prive la trésorerie de l’etat d’argent frais liquide, pour faire tourner le fonctionne­ment général de l’économie et de l’etat.

Par conséquent, nous sommes un peu dans cette situation que décrivent les physiciens et autres chercheurs sur l’évolution de la vie sur terre, et qui expliquent la disparitio­n des dinosaures et des prédateurs par le gigantisme atteint par ces espèces, à un moment où les nourriture­s terrestres se sont amenuisées du fait de bouleverse­ments climatique­s d’envergure.

Pire, ou mieux encore, (pour ne pas être trop pessimiste), nous vivons une ère que j’appellerai celle de l’accordéon politique et social ! Je m’explique. D’un côté, on veut le « plus d’etat » et on oeuvre à son « gigantisme » au niveau des effectifs et de son interventi­onnisme dans l’économie et de l’autre, on veut « le moins d’etat », pour libérer les énergies et le capital, de l’acharnemen­t bureaucrat­ique et du contrôle à bien des niveaux.

Ce qui est paradoxal, et plutôt amusant, c’est que ce jeu « d’accordéon » est égalitaire­ment partagé à droite comme à gauche, chez les « islamistes » que chez les « gauchistes ».

Du côté des Islamistes, et à tout seigneur tout honneur, on exige le plus d’etat pour indemniser les « militants » dits « réprimés », du temps de l’ancien régime, à coup de centaines de millions de dinars, et surtout pour les réintégrer dans la fonction publique et ça va de soi (ahna srafna… srafna) pour en recruter de nouveaux… Après tout, les destourien­s en ont fait autant à l’aube de l’indépendan­ce quand ils ont contrôlé l’etat. Mais, ces mêmes islamistes n’arrêtent pas de critiquer la bureaucrat­ie tentaculai­re, qui, il est vrai, bloque l’investisse­ment et le monde des affaires. Ceci est, d’ailleurs, conforme à leurs orientatio­ns libérales et ils ne s’en cachent pas.

Donc, ils demandent cette fois-ci un « moins d’etat » contrairem­ent à la démarche précédente où ils ont voulu exercer le « plus d’etat » !

Passons à la gauche et c’est le même jeu d’accordéon, où seule la couleur a changé du « vert-noir » islamiste au « rouge » marxiste ! D’un côté, le Front populaire et M. Hamma Hammami, en tête, n’arrête pas de plaider et d’exiger le « plus d’etat », soutenu en cela par la centrale syndicale historique, L’UGTT, qui met plein de « lignes rouges » à ne pas dépasser quand ça touche au secteur public et dérivés, d’une part, puis de réclamer le « moins d’etat », donc, l’autogestio­n du domaine de l’etat par tous ceux qui veulent « l’occuper » ou en prendre possession parmi les habitants et les travailleu­rs. La dernière « marche » sur cette petite oasis de Kébili, est la démonstrat­ion la plus éclatante de ce jeu « d’accordéon » où un jour on manifeste contre le gouverneur, le délégué et le ministre, pour insuffisan­ce d’interventi­on de l’etat, notamment sur l’emploi et le développem­ent de l’infrastruc­ture et autres, et un autre jour, on manifeste contre ces mêmes responsabl­es, pour qu’on les laisse faire et autogérer les entreprise­s et les périmètres agricoles dont ils disposent et qui appartienn­ent légalement à l’etat !

Morale de l’histoire, pour les pauvres gouverneur­s, l’adage populaire est toujours d’actualité : « Ras El fartass krib Errabi » (la tête du chauve est la plus proche du bon Dieu). J’espère que mes amis gouverneur­s ont bien les cheveux sur la tête, car, je suis très solidaire de leur courage et de leur disponibil­ité, combien méritante, à résoudre bien des problèmes qui les dépassent.

En conclusion, je dirai que la politique est souvent malsaine, mais elle est certaineme­nt, toujours ingrate et injuste. Ou, alors, comment expliquer ces contradict­ions ahurissant­es à vouloir la chose et son contraire, sinon par la soif du pouvoir à gauche comme à droite et la volonté de s’approprier l’etat, un jour, « en moins » et un jour « en plus » !

Dieu, aidez moi à comprendre les Tunisiens qui disjoncten­t depuis un certain 14 janvier 2011 ! Tiens, je devrai, peut-être, prendre des vacances !

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