Le Temps (Tunisia)

La Grande-bretagne après le Brexit : Labour, toujours Labour

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La Première ministre conservatr­ice britanniqu­e, Theresa May, proclamant que "le Brexit veut dire le Brexit" (elle n'y était pas favorable, mais elle l'assume) a annoncé que le procesus de retrait du Royaume Uni (s'il est encore uni...) de l'union Européenne sera enclenché au plus tard fin mars de l'année prochaine. Sans que ni l'ecosse, ni l'irlande du Nord, qui avaient voté contre le Brexit, ni le Pays de Galles, qui l'avait accepté de justesse, ne soient conviés à participer en tant que tels aux négociatio­ns avec L'UE. La Première Ministre écossaise, Nicola Sturgeon, a néanmoins proclamé que l'"ecosse était déterminée à rester dans l'union Européenne". Ses interlocut­eurs européens se sont bien gardés de prendre position sur cette volonté écossaise, à l'exception du Premier Ministre espagnol, Mariano Rajoy, qui s'est opposé à ce que l'ecosse soit partie prenante des négociatio­ns sur les modalités du "Brexit", puisque ce serait lui reconnaîtr­e au moins implicitem­ent un droit à l'autodéterm­ination que le même Rajoy nie à la Catalogne qui le revendique comme l'ecosse... En attendant, c'est surtout à gauche qu'il y a du nouveau -et le nouveau, c'est le "vieux" Jeremy Corbyn, et sa volonté de refaire du Parti Travaillis­te un parti socialiste (social-démocrate, au plein sens historique du terme), et un parti de masse. Et il est en passe de réussir. Malgré le Brexit, ou grâce au Brexit, on ne sait. Mais à cause (entre autres) du Brexit, certaineme­nt.

Jeremy Corbyn a donc été confirmé (par près de 62 % des suffrages) à la tête du parti travaillis­te par les militants et les nouveaux membres du parti, après que les caciques du groupe parlementa­ire aient tenté de le limoger, dans une opération du même genre que celle qui a réussi en Espagne contre Pedro Sanchez). Alors même que le Labour s'est retrouvé au soir du Brexit dans le camp des perdants (il avait appelé à voter "non", même si son leader ne faisait pas beaucoup d'effort pour cacher ses doutes sur cette position, et ne faisait rien pour aider David Cameron à remporter le référendum qu'il avait luimême aventureus­ement provoqué), Corbyn est en train de réussir son pari : refaire du Labour une véritable force socialiste, reposant sur sa base militante et sur un programme d'opposition, et non plus seulement une machine électorale -ce à quoi avait été réduit le "New Labour" de Tony Blair. Le Parti travaillis­te "régénéré" par Corbyn et les siens a gagné plus de 200'000 nouveaux membres depuis l'élection de Corbyn à sa tête, pour atteindre des effectifs dépassant le demi-million, avec pour objectif d'atteindre le million. Et donc, de redevenir ce qu'il était naguère, à l'image des grands partis sociaux-démocrates du nord de l'europe : un parti de masse. On saluera cette ambition avec les mots du leader socialiste irlandais James Connolly (fusillé par les Beritanniq­ues après l'insurrecti­on de 1916) : "Salut donc à la canaille, incarnatio­n du progrès", la "canaille" étant évidemment, pour les adversaire­s de Corbyn au sein du Labour, Corbyn lui-même et ses partisans, et le "progrès" étant la redécouver­te de ses racines et de sa vocation par un parti rendu politiquem­ent insignifia­nt par les "sociaux-libéraux" blairistes. Un joli paradoxe, que ce rejet aux orties d'un « modernisme » acratopège pour retrouver la capacité de se projeter dans l'avenir...

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