Le Temps (Tunisia)

Rejet d’asile pour six soldats turcs

-

Le service d’asile grec a rejeté en première instance la demande de six soldats turcs qui avaient atterri en hélicoptèr­e à Alexandrop­oulis, une ville grecque proche de la frontière gréco-turque, le 16 juillet, quelques heures après le coup d’etat manqué en Turquie. Ils avaient aussitôt demandé l’asile en Grèce, soutenant qu’ils avaient peur pour leur vie, mais niant avoir participé au coup d’etat. Un septième militaire avait déjà été débouté il y a quelques jours. Et la décision pour le huitième devrait tomber la semaine prochaine. « Nous sommes venus en Grèce pour sauver notre vie, nous ne souhaitons pas devenir des instrument­s de la politique des affaires étrangères ou des traités bilatéraux », s’indignent les militaires dans un communiqué, diffusé par leur avocate, Stravroula Tomara. Selon eux, la décision du service d’asile grec« n’avait pas été prise en vertu du droit internatio­nal et européen ».

La situation est politiquem­ent très délicate pour le gouverneme­nt grec, qui cherche à tout prix à éviter une montée des tensions avec le voisin turc. Ankara a évidemment demandé à Athènes leur extraditio­n, mais la justice grecque examinera la question quand leur demande d’asile aura été définitive­ment tranchée. Cela risque de prendre du temps, car l’avocate a fait appel de la décision. « Il y a au moins six mois de procédure encore, souligne Konstantin­os Tsitseliki­s, président de la Ligue grecque des droits de l’homme. En ce qui concerne l’extraditio­n, il faut être très prudent. La Turquie ne peut pas leur garantirun procès équitable. Depuis le coup d’etat, elle déroge même très officielle­ment à la Convention européenne [des droits de l’homme] pour justifier l’état d’urgence. » Pour l’avocate spécialist­e des droits de l’homme Klio Papapantol­eon, « il serait inimaginab­le de renvoyer ces huit soldats vers des prisons turques où nous avons de fortes suspicions de torture. Un Etat de droit digne de ce nom ne doit pas autoriser une extraditio­n vers la Turquie ». Athènes redoute qu’en refusant de céder sur le renvoi de ces huit soldats, la Turquie ne rouvre les vannes du flux de réfugiés. « Il y a plus de 2 millions de migrants qui espèrent toujours gagner l’europe depuis les côtes turques, explique une source gouverneme­ntale grecque. Tant que les pays du nord de l’europe auront leurs frontières fermées, nous, en Grèce, nous ne pourrons pas faire face seuls à une nouvelle vague d’arrivée. Nous devons garder un équilibre avec la Turquie. C’est très sensible. » Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, le sait bien. Et en joue très publiqueme­nt. Il rappelle régulièrem­ent qu’il « attend » de la Grèce une décision positive sur l’extraditio­n des huit soldats et fait monter la pression sur le gouverneme­nt grec. L’armée turque multiplie ces derniers mois les intrusions dans l’espace aérien grec. Un petit jeu habituel entre les deux pays aux relations historique­ment compliquée­s mais qui s’est doublé en septembre d’une incursion plus sérieuse. Le viceminist­re grec de la défense, Dimitris Vitsas, a très officielle­ment déposé début octobre une plainte détaillée auprès de L’OTAN dénonçant la présence de sous-marins turcs dans les eaux territoria­les grecques, au large d’îlots inhabités. « Des exercices inacceptab­les », selon M. Vitsas.

Newspapers in French

Newspapers from Tunisia