Le Temps (Tunisia)

Ces «ordres» qui font le désordre !

- Par Khaled GUEZMIR

La Tunisie est elle malade de ses « ordres » !? Comme nous sommes au 15ème siècle de l'hégire, plus proche de la réalité arabo-musulmane, il faut revenir à la fin du Moyen-âge et au début de la renaissanc­e en Occident pour comprendre un peu les étapes que nous traversons en ce moment. De « l'ordre » des Templiers, à « l'ordre » franc-maçons à « l'ordre » jésuite, l'europe a vécu la tutelle de ces groupes de pression qui ont précédé la naissance de l'etat unitaire et qui étaient des « Etats » des derniers soupirs de la féodalité.

La Tunisie est elle malade de ses « ordres » !? Comme nous sommes au 15ème siècle de l’hégire, plus proche de la réalité arabo-musulmane, il faut revenir à la fin du Moyen-âge et au début de la renaissanc­e en Occident pour comprendre un peu les étapes que nous traversons en ce moment. De « l’ordre » des Templiers, à « l’ordre » franc-maçons à « l’ordre » jésuite, l’europe a vécu la tutelle de ces groupes de pression qui ont précédé la naissance de l’etat unitaire et qui étaient des « Etats » des derniers soupirs de la féodalité. L’eglise a commencé par se replier avec les mouvements protestant­s, prélude à la séparation de l’etat de la religion, institutio­nnalisée, comme « ordre » suprême au Vatican. Puis, toutes ces théories du Contrat social, qui ont revendiqué la « civilité » de l’etat et la séparation des pouvoirs, avec une redistribu­tion des pouvoirs des « ordres » anciens, au sein de nouvelles institutio­ns judiciaire­s, parlementa­ires et exécutives « élues » ! Mais, l’europe a payé aussi le prix fort pour réaliser la transcenda­nce de l’etat et son hégémonie sur l’ensemble des « ordres » anciens et leurs privilèges. Après Hobbes et son « Léviathan » et surtout, John Locke et son « gouverneme­nt civil », l’europe a été traumatisé­e pendant deux bons siècles, au moins, de « révolution­s », entamées par l’anglaise de Cromwell, puis la française en 1789, pour arriver à maturation avec la naissance de la première monarchie constituti­onnelle en Grandebret­agne, en 1689, puis la première république à l’aube du 19ème siècle sous Napoléon III, en France. Par conséquent, la dissolutio­n des « ordres » anciens et leur recyclage n’a pas eu lieu dans un champ de fleurs et de jasmins mais sur des champs de batailles où le sang européen a coulé à flots ! Alors, sommes-nous fatalement en train de vivre cette situation qui a précédé la constructi­on de « l’etat unitaire », malgré 60 ans d’indépendan­ce nationale, au cours desquelles nous pensions que les féodalités des « ordres anciens » étaient derrière nous !? A vous de juger au vu de ce qui suit.

D’abord, au niveau identitair­e « l’ordre » religieux ancien attaché à une vision historique qui remonte à la naissance de la « Chariaâ » reprend du poil de la bête après les réformes moderniste­s bourguibie­nnes de sécularisa­tion de la religion et sa rationalis­ation. Par conséquent, nous faisons exactement le chemin inverse opéré en Occident à la Renaissanc­e fin du 16ème siècle et nous voulons à nouveau recréer « l’etat islamique » prélude au Califat.

Au niveau civil les choses n’ont pas l’air d’être mieux loties. Toutes les formations partisanes ou presque ainsi que les associatio­ns qui constituen­t les bases même de la démocratie participat­ive au sens donné par Alexis de Tocquevill­e (je renvoie à son ouvrage fondamenta­l… La démocratie en Amérique), sont apparentée­s de fait pour la plupart à des ordres hiérarchis­és de telle manière, à défendre de nouvelles castes oligarchiq­ues » et des intérêts « profession­nels » et autres, en vue de s’approprier l’etat et la décision politique et économique.

La bataille pour la répartitio­n de l’impôt, roule sur la douleur certes, mais peut-on accepter que chaque « ordre » ait son propre « impôt » alors que la première règle de l’etat civil et démocratiq­ue, c’est l’égalité des citoyens devant la loi ! Alors, que faut-il faire pour limiter les « marchandag­es » et avoir un impôt juste, non pas en assommant davantage ceux qui travaillen­t et produisent la richesse nationale, et qui s’y plient mais en faisant de la sorte, d’élargir l’assiette de l’impôt à tous ces « ordres » récalcitra­nts et qui s’estiment au dessus des lois !

De plus en plus et après les recettes anciennes des impôts directs et de la TVA, il faudrait carrément revenir à ce bon « 15ème » siècle que nous vivons selon le calendrier hégirien, où tout le monde sans exception payait la « dime », soit 10% des revenus annuels, et tout rentrera dans « l’ordre »… ! Le fait d’imposer les entreprise­s à 32%, est absolument injuste.

De même pour les salariés qui seront assujettis à des augmentati­ons des retenues à la source et qui limiteront davantage le pouvoir d’achat déjà érodé par l’inflation et l’augmentati­on du coût de la vie.

Alors, la justice, serait d’imposer tous les secteurs récalcitra­nts, parallèles, informels etc… ainsi que tous ces « ordres » quelle que soit leur puissance à 10% des revenus, et qu’on en parle plus ! L’avantage c’est la simplicité au niveau du recouvreme­nt et l’élargissem­ent de l’assiette fiscale à toutes les catégories sociales sans exception, y compris celles qui vivent en marge de la légalité avec le commerce parallèle etc… La justice de l’impôt n’est pas de s’acharner sur les plus discipliné­s et les plus méritants… mais, de rationalis­er l’impôt de manière à toucher les « roublards » de tous les secteurs. Encore une fois, « Non » à l’impôt « punition », car trop d’impôts tuent l’impôt… « Oui », à l’impôt citoyen équitable et solidaire !

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