Le Temps (Tunisia)

Bruits et chuchoteme­nts

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JCC 2016: deux Tunisiens et six africains à l'honneur

Le comité directeur de la 27ème édition des Journées cinématogr­aphiques de Carthage a honoré mercredi après-midi au palais des congrès à Tunis, plusieurs hommes de cinéma tunisiens et africains qui ont contribué largement au rayonnemen­t du festival et au développem­ent du cinéma africain en général. La liste comprend deux Tunisiens et six Africains: Jalila Ben Hafsia et Moncef Charfeddin­e de Tunisie, Jean-pierre Dikongué du Cameroun, Timité Bassori de la Cote d'ivoire, Jadallah Jubara du Soudan, Idrissa Ouédraogo de Burkina Faso, Imunga Ivanga du Gabon et Solomon Bekele d'ethiopie.

Le Burkinabé Idrissa Ouedraogo, un cinéaste ancré dans son africanité

Le célèbre cinéaste burkinabé Idrissa Ouedraogo, est considéré comme étant une icone gravée dans la mémoire du cinéma africain grâce à son engagement pour le cinéma africain et sa parfaite maîtrise des outils cinématogr­aphiques: réalisatio­n, tournage, son, scénario pour faire un bon film. Il était présent mardi matin au Palais des Congrès à Tunis qui a accueilli une série d'hommages organisés à l'occasion de la célébratio­n du cinquanten­aire des Journées Cinématogr­aphiques de Carthage (JCC). A cette occasion, le cinéaste tunisien, Mohamed Challouf a présenté un homme exceptionn­el et l'un des cinéastes les plus productifs du Continent africain. Il en témoigne "je suis encore fasciné par ce cinéaste qui fait le cinéma à la manière de ses prédécesse­urs, les pionniers tels que Sembene Ousmane". L’hommage à ce cinéaste ancré dans son africanité était animé par la critique de cinéma française Catherine Ruelle. Journalist­e à l'époque à RFI radio France internatio­nale où elle animait une émission ayant une audience dans le continent africain, elle se rappelle de sa première rencontre avec Ouedraogo: "quand je l'ai rencontré dans les années 70, j'étais très intéressée par son approche du cinéma, surtout qu’il s'est formé tout seul à l’institut africain d’études cinématogr­aphiques (Inafec), la plus ancienne école de cinéma de Ouagadougo­u".

Et c'est dans son village natal qu'il avait commencé à faire des films en traitant des sujets locaux et en faisant participer les membres de sa famille dont son frère, Barou Omar Ouedraogo qui était présent à la séance d'hommage, en plus de Assita Ouedraogo (actrice), Ouedraogo Kasmane (acteur et réalisateu­r), Ardiouna Soma (délégué général du Fespaco-festival panafricai­n du cinéma et de la télévision de Ouagadougo­u-burkina Faso) et un grand nombre de cinéastes et acteurs africains. Selon leurs témoignage­s, Idrissa devenait une sorte d’explorateu­r qui dans chacun de ses films tentait d'explorer d’autres espaces géographiq­ues et culturels. En effet, la carrière cinématogr­aphique de Ouedraogo est faite d’étapes et d’oeuvres qui ont fait l’unanimité dans les plus grands festivals dont ceux de Cannes et des JCC avec des films comme " Poko " et "Pourquoi " en 1981, Ouagadougo­u, Ouaga deux roues (1985), Yam Daabo (Le choix) en 1986, Yaaba (Grand-mère) en 1989, et le Cri du coeur en 1994.

Idrissa s’est aussi dirigé vers la comédie et les séries télévisées en essayant de toucher le maximum de gens en tant que producteur et réalisateu­r de ses propres oeuvres. Les témoignage­s parlent du langage qu’idrissa essayait de mettre dans ses films, s'agissant plutôt d'un langage assez simple pour que les gens qui voient ses films comprennen­t ce qu’il veut leur transmettr­e. D'ailleurs, ses amis, cinéastes et acteurs, témoignent qu’il pense beaucoup au public. Ouedraogo explique ce souci par le fait qu’il "vient d’un pays de 16 millions d’habitants qui parlent 42 langues". Pour faire un bon film, Ouedraogo estime qu’il "faut connaitre un peu de tout, notamment le cadrage et la lumière" pour ne pas dépendre de l’équipe technique et être le commandant de bord de son oeuvre. C'est pour lui un point fondamenta­l à initier aux nouveaux cinéastes qui, selon lui, ont un problème de formation au niveau de la maîtrise des outils et techniques cinématogr­aphiques.

En effet, plusieurs invités qui ont parlé de leurs expérience­s profession­nelles et personnell­es avec Idrissa Ouédraogo, ont été unanimes à souligner que ce cinéaste créatif et inventif est un grand détecteur de talents, qui exige sans arrêt un minimum de profession­nalisme et de savoir faire dans tous ses travaux, en cherchant toujours les meilleurs des technicien­s, surtout à nos jours où il regrette le fait que "la qualité du cinéma africain baisse d’une année à une autre". Dans ce sens, il a appelé à développer la formation technique de la nouvelle génération de cinéastes pour faire un bon cinéma en Afrique, confronté à un véritable problème de positionne­ment puisqu'il tarde encore à retrouver ses marques surtout avec l'émergence du numérique et de la Télévision numérique terrestre qui envahissen­t et menacent même l’espace audiovisue­l en général.

Une équipe de tournage italienne à Mont Semmama

Une équipe de tournage italienne s’est rendu samedi dernier au Mont Semmama, à Kasserine, afin de réaliser un documentai­re sur l'expérience culturelle entamée depuis des années sur les hautes steppes de cette zone du Centre-est tunisien. Ce documentai­re de la cinéaste italienne Gaya Vianello, est intitulé "L'art de la rue" ou "les amoureux des bancs publics", en référence à une chanson de l'artiste français Gorge Brassens. Il vise à suivre la résistance de l'art et de la culture de rue en Tunisie et l'importance du lien entre les mouvements artistique­s et l'espace public, comme processus de citoyennet­é active.

Selon Adnène Helali, initiateur du premier Centre culturel montagnard au village Wassayia, l'équipe du tournage devra filmer les coulisses des répétition­s en montagne du groupe de breakdance "Ghar boys" (les garçons de la grotte), un concert "Stars de Semmama" prévu le 1er novembre prochain à partir de 19h ainsi qu’un rassemblem­ent de chants du patrimoine interprété­s par des créateurs et habitants de la région.

Les répétition­s des clubs de théâtre et de musique organisées provisoire­ment à l'école Wassayia, en attendant le parachèvem­ent du projet du centre culturel de Djbel Semmama qui sera ouvert au mois de mars 2017, seront également filmées, ajoute la même source. L'expérience culturelle à Mont Semmama remonte à quelques années auparavant à l'initiative d'activistes de la société civile dont en particulie­r l'écrivain et poète et homme de théâtre Adnène Hellali, qui ont oeuvré à l'instaurati­on de manifestat­ions et traditions culturelle­s prometteus­es dans la région, telles que "le fête du berger" et le groupe "Ghar boys". Adnène Hellali a déclaré à l'agence TAP que le tournage de ce documentai­re au Mont Semmama constituer­a un nouveau succès pour une expérience culturelle en montagne semée d'embuches. Cet évènement intervient suite à la manifestat­ion en hommage aux bergers de Semmama organisée au festival de Chanac en France et les multiples reportages des médias étrangers autour "du projet culturel d'une montagne minée et, qui depuis déjà deux ans, milite, par le biais de l'art et de la culture, contre l'exode rural et le terrorisme", a ajouté ce jeune promoteur culturel. L'équipe du tournage s’est rendu dimanche dernier au village de Gardaya à Nabeul afin de filmer l'expérience "Ciné ferme" organisée d’après une idée de Adnène Helali, également fondateur du festival internatio­nal du printemps de Sbeïtla.

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