Entre la chambre d’accusation et la chambre criminelle
Tous les faits prohibés sont prévus par la loi. Ils constituent des infractions dont la nature et la sanction sont spécifiées par un texte précis et explicite. Il n’y a pas d’infractions sans texte. Elles se divisent en contraventions, délits et crimes.
Les contraventions sont les infractions les moins graves, car elles constituent une atteinte à des règles de la vie sociale telles que le trouble du voisinage par le bruit par exemple.
Les délits et les crimes constituent les transgressions des normes sociales et la violation des interdits fondamentaux dans une société donnée.
La qualification est la traduction des faits en éléments juridiques prévus par le code pénal. Un meurtre peut être selon les circonstances où il s’est produit, peut être qualifié d’homicide volontaire, ou involontaire. De même que la violence peut aboutir au meurtre, sans que l’auteur des faits ait eu l’intention de tuer. Il y a donc plusieurs éléments qui entrent en ligne de compte pour la qualification d’un fait en crime ou en délit.
C’est au départ le procureur qui inculpe, en mettant en action l’action publique. C’est donc à lui que revient de qualifier les faits, a priori, et transmettre le dossier au juge d’instruction qui est tenu d’instruire à charge et à décharge, en essayant de rassembler les éléments de culpabilité, mais aussi d’innocence concernant l’accusé. Il est pour cela, tenu d’auditionner ce dernier ainsi que les victimes et toutes les parties prenantes.
Il dresse un procès verbal de clôture, qui peut être dans le sens de l’inculpation ou de l’acquittement, s’il estime d’après les éléments du dossier, qu’il n’y a pas de charges à retenir contre l’accusé. En vertu d’une ordonnance de renvoi, il transmet le dossier à la chambre de d’accusation qui peut confirmer ou infirmer ladite ordonnance. Les arrêts de la chambre d’accusation sont susceptibles de recours devant la Cour de cassation. Une fois devant la chambre criminelle, le dossier est examiné en principe sur la base des chefs d’inculpation confirmés par chambre d’accusation.
Quid cependant si les avocats de défense contestent les chefs d’inculpation et demandent au tribunal la requalification sur cette base ? En principe le juge doit se limiter à l’arrêt de la chambre d’accusation, sauf s’il y a des éléments nouveaux ou des points importants de procédure qui ont été négligés par ladite chambre.
Il ne faut pas surtout pas que les qualifications soient instrumentalisées. Il y va de la protection des libertés individuelles.
Dans l’affaire Naghedh, il y avait deux points essentiels : les circonstances de la mort de la victime, pour étayer les relations de cause à effet entre celle-ci et les actes incriminés. Le deuxième consistait à savoir les accusés comparaissant à la barre étaient ceux-là même qui avaient commis ces faits. Sur les deux points le doute planait. La chambre criminelle pouvait-elle procéder à une requalification des faits ?
Il lui est loisible de le faire lorsqu’il y a des éléments dans le dossier soulevés par la défense et qui lui apparaissent opportuns à une requalification, et que la chambre d’accusation a omis. Mais cela constitue une exception, étant tenu de se baser sur l’arrêt de la chambre d’accusation. En vertu du jugement d’acquittement, la requalification en l’occurrence n’était pas possible, vu le doute sur les circonstances du décès de la victime ainsi que sur les accusés euxmêmes.