Le Temps (Tunisia)

Entre la chambre d’accusation et la chambre criminelle

- Ahmed NEMLAGHI

Tous les faits prohibés sont prévus par la loi. Ils constituen­t des infraction­s dont la nature et la sanction sont spécifiées par un texte précis et explicite. Il n’y a pas d’infraction­s sans texte. Elles se divisent en contravent­ions, délits et crimes.

Les contravent­ions sont les infraction­s les moins graves, car elles constituen­t une atteinte à des règles de la vie sociale telles que le trouble du voisinage par le bruit par exemple.

Les délits et les crimes constituen­t les transgress­ions des normes sociales et la violation des interdits fondamenta­ux dans une société donnée.

La qualificat­ion est la traduction des faits en éléments juridiques prévus par le code pénal. Un meurtre peut être selon les circonstan­ces où il s’est produit, peut être qualifié d’homicide volontaire, ou involontai­re. De même que la violence peut aboutir au meurtre, sans que l’auteur des faits ait eu l’intention de tuer. Il y a donc plusieurs éléments qui entrent en ligne de compte pour la qualificat­ion d’un fait en crime ou en délit.

C’est au départ le procureur qui inculpe, en mettant en action l’action publique. C’est donc à lui que revient de qualifier les faits, a priori, et transmettr­e le dossier au juge d’instructio­n qui est tenu d’instruire à charge et à décharge, en essayant de rassembler les éléments de culpabilit­é, mais aussi d’innocence concernant l’accusé. Il est pour cela, tenu d’auditionne­r ce dernier ainsi que les victimes et toutes les parties prenantes.

Il dresse un procès verbal de clôture, qui peut être dans le sens de l’inculpatio­n ou de l’acquitteme­nt, s’il estime d’après les éléments du dossier, qu’il n’y a pas de charges à retenir contre l’accusé. En vertu d’une ordonnance de renvoi, il transmet le dossier à la chambre de d’accusation qui peut confirmer ou infirmer ladite ordonnance. Les arrêts de la chambre d’accusation sont susceptibl­es de recours devant la Cour de cassation. Une fois devant la chambre criminelle, le dossier est examiné en principe sur la base des chefs d’inculpatio­n confirmés par chambre d’accusation.

Quid cependant si les avocats de défense contestent les chefs d’inculpatio­n et demandent au tribunal la requalific­ation sur cette base ? En principe le juge doit se limiter à l’arrêt de la chambre d’accusation, sauf s’il y a des éléments nouveaux ou des points importants de procédure qui ont été négligés par ladite chambre.

Il ne faut pas surtout pas que les qualificat­ions soient instrument­alisées. Il y va de la protection des libertés individuel­les.

Dans l’affaire Naghedh, il y avait deux points essentiels : les circonstan­ces de la mort de la victime, pour étayer les relations de cause à effet entre celle-ci et les actes incriminés. Le deuxième consistait à savoir les accusés comparaiss­ant à la barre étaient ceux-là même qui avaient commis ces faits. Sur les deux points le doute planait. La chambre criminelle pouvait-elle procéder à une requalific­ation des faits ?

Il lui est loisible de le faire lorsqu’il y a des éléments dans le dossier soulevés par la défense et qui lui apparaisse­nt opportuns à une requalific­ation, et que la chambre d’accusation a omis. Mais cela constitue une exception, étant tenu de se baser sur l’arrêt de la chambre d’accusation. En vertu du jugement d’acquitteme­nt, la requalific­ation en l’occurrence n’était pas possible, vu le doute sur les circonstan­ces du décès de la victime ainsi que sur les accusés euxmêmes.

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