Le Temps (Tunisia)

Un flash-back douloureux

Exposition «Gros plans, paysages urbains de Tunisie» au Palais Kheireddin­e

- Lotfi BEN KHELIFA

L'exposition de dessins, de plans et de photograph­ies qui se tient jusqu'au 31 mai au Palais Kheireddin­e dans la Médina de Tunis présente des paysages urbains de Tunisie : de Tunis-banlieues, à Hammamet, à Sousse, à El Jem, à Zarzis et à Gabès. Elle illustre les projets réalisés par l'architecte, paysagiste et urbaniste Jellal Abdelkéfi durant des dizaines d'années particuliè­rement au sein de l'associatio­n de sauvegarde de la Médina et pour le compte de la municipali­té de Tunis. Cette exposition « constitue un témoignage inédit sur une période fondatrice de l'histoire de la Tunisie contempora­ine en matière de paysages urbains, comme le souligne Houria Zourgane Abdelkéfi, Commissair­e de l'exposition. Elle ajoute que l'exposition est « un hommage à toute une génération de bâtisseurs qui ont contribué à l'oeuvre collective d'édificatio­n de la Tunisie indépendan­te. »

Et sans revenir en détails sur le contenu de cette grande exposition qui raconte un parcours chronologi­que et qui invite à un voyage exploratoi­re de l’histoire urbaine de la capitale et d’autres cités du pays, le visiteur d’un certain âge qui a vécu les phases anciennes et nouvelles des villes citées en exemple, ne manquera pas de regretter la destructio­n de quartiers entiers de Tunis qui sont partis à jamais et remplacés par des semblants de constructi­ons modernes qui voudraient rappeler de styles arabes modernes. N’est-ce pas feu M. Olivier Clément Cacoub ? Avec tout le respect que nous devons au Grand Prix de Rome. Les anciennes bâtisses avaient été « remplacées » par des constructi­ons « modernes » pour élargir l’espace. Les responsabl­es politiques de l’époque des

années soixante et soixante dix avaient jugé bon de raser des pans de l’histoire de Tunis, sans consulter les habitants de ces quartiers avec pour alibi de pouvoir donner une belle image de la capitale aux yeux des visiteurs étrangers ! Les habitants de Tunis s’étaient trouvés face au dictat de la décision verticale tombée tel un couperet. Qui osait ouvrir la bouche ? Les fautes impardonna­bles se succédaien­t. Car Tunis disparaiss­ait petit à petit et tout en silence. Après la rue Sidi El Béchir (1963-1965) et son aspect urbain typique qui ressemblai­t un peu à celui de la rue Bab El Fallah, et qui a été remplacée par des immeubles laids, c’est le cimetière du Jellaz, en 1967, qui allait suivre ! Avec la destructio­n de son grand portail, la relocalisa­tion de plusieurs de ses morts (Eh Oui !) Pour permettre

le passage de la nouvelle route qui marchait plutôt sur les cadavres ! La « Hara » de la Hafsia allait connaître le même sort. De minimes détails ont échappé au désastre. Et dire que les Tunisiens juifs avaient été protégés quelques siècles auparavant par Sidi Mehrez, le saint protecteur de Tunis. Les génération­s d’aujourd’hui ne connaissen­t rien du Tunis d’antan, car il n’en reste pas grand-chose !

Et les traces ?

L’esprit avec lequel ont été entreprise­s les « rénovation­s » avait un parti-pris contre une ville et ses habitants. Qu’on se le dise ! Le quartier de Bab Souika n’était pas en reste. Et voyez aujourd’hui ce qu’il est devenu après sa transforma­tion au début des années quatre vingt du siècle dernier. Les « vieux » n’osent plus parler du passé de Tunis, car les « jeunes » ne les croient toujours pas. Car les traces n’y sont plus !!! Bab Souika n’est même plus l’ombre de lui-même ! Le cadeau était empoisonné et le bon vieux quartier de Bab Souika a été également rasé. La reconstruc­tion était superflue, car elle faisait honte. Heureuseme­nt que le quartier de Halfaouine a pu échapper au carnage. Et même si on invoque le fait de faciliter la circulatio­n des véhicules et des piétons, Bab Souika, tunnels compris et alentours, étouffe au niveau de la circulatio­n durant la journée! Et les exemples envahissen­t la tête, particuliè­rement ceux de l’avenue Bourguiba et du Palmarium. A bon entendeur, salut !

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