Le secteur cimentier s’englue dans l’incertitude !
• La Cimenterie de Bizerte a connu une diminution de l’exportation passant de 191 mille tonnes en 2010 à 50 mille tonnes en 2014, soit une baisse de 74% • Carthage Cement a enregistré en 2016 une perte nette de 45,993 millions de dinars contre un déficit
Le secteur cimentier demeure, en dépit d’une conjoncture économique nationale délicate, un élément stratégique aussi bien qu’un potentiel essentiel à l’économie du pays. En effet, selon une étude publiée en 2015, la production nationale de ciment est de 10,45 millions de tonnes par an (dont 22,4% sont fournis par l’usine de Carthage Cement), pour une demande locale de 7,85 millions de tonnes. Le secteur cimentier est entré depuis 1998 dans une phase de restructuration à travers la privatisation des entreprises et ce, dans le cadre de la libéralisation du marché et conformément à la politique de désengagement de l’etat des activités concurrentielles.
Toutefois, la configuration de ce secteur fait apparaître que seulement deux sociétés sont étatiques (Les Ciments d’oum El Kélil et Les Ciments de Bizerte) et une société confisquée (Carthage Cement). Par conséquent, suite à des facteurs économiques peu enviables, une régression des ventes du secteur cimentier de l’ordre de -6,69% (soit -177 500 tonnes), a été enregistrée selon les derniers chiffres publiés par la Chambre Nationale des Producteurs de Ciment (CNPC). Carthage Cement a enregistré en 2016 une perte nette de 45,993 millions de dinars
Par ailleurs, à l’heure actuelle et après une sensible amélioration de la position de Carthage Cement au 30 avril 2015 comparée à 2014 dont les ventes locales en ciment de Carthage Cement ont évolué de 44% et ont atteint 349 823 tonnes au 30 avril 2015 contre 242 031 tonnes au 30 avril 2014 (+107 792 tonnes), le projet de résolutions publié par la société et qui sera soumis à l’approbation de l’assemblée Générale Ordinaire (AGO) qui se tiendra le 17 juillet 2017, Carthage Cement a enregistré en 2016 une perte nette de 45,993 millions de dinars contre un déficit de 46,5 millions en 2015. Ajoutant aux dettes de la Société Carthage Cement liées à des contrats de location qui s’élèvent à un montant total de 5.354.113 DT. Une baisse flagrante des exportations de la Cimenterie de Bizerte, soit une chute de 74% entre 2010 et 2014 Le déficit déploré par la société Carthage Cement ne lui est pas spécifique dans son cas, d’autant que la société Cimenterie de Bizerte a terminé le 1ersemestre 2016 avec un déficit plus lourd que celui connu à la fin juin 2015, passant d’un déficit de 1,142 MDT à 6,6 MDT. Dans le même contexte, et selon le dernier rapport annuel de la Cour des Comptes, la société Cimenterie de Bizerte a dégagé une régression au niveau de la production que celui de l’export. Fâcheuses incidences qui ont fait que la valeur du marché pour la Cimenterie de Bizerte a fortement chuté, passant de 507 MD en 2009 à 283 MD à la fin de 2014, ceci est dû au retard enregistré pour la réalisation du programme de la réhabilitation des moyens de production.
Le rapport a indiqué aussi que suite à la non- maîtrise du coût de l’énergie et dans les additions calcaires au sein de la société, le coût de la production d’un tonne de clinker a augmenté de 63Dt en 2009 à 93 DT en 2013. Ainsi qu’une chute continue des quotas commerciaux de la société dans le secteur cimentier, passant de 12% en 2010 à 6% en 2014. Toujours selon le même document, les Ciments de Bizerte a connu aussi une diminution de l’exportation de 191 mille tonnes en 2010 à 50 mille tonnes en 2014, soit une baisse des exportations de l’ordre de 74%.
La maîtrise de l’énergie, la protection de l’environnement et le manque de coke de pétrole représentent les principaux risques pour le secteur Selon une étude réalisée sur le secteur cimentier en Tunisie en février 2012, les principales contraintes du secteur cimentier tunisien sont la maîtrise de l’énergie et la protection de l’environnement. En effet, les coûts d’énergie nécessaires à l’exploitation, représentent 30 à 40% des coûts de production (non compris les coûts d’investissement). Les cimenteries sont de plus, de grands producteurs de dioxyde de carbone CO2, qui est produit par la réaction de calcination du carbonate de calcium CA CO3 et la combustion. Rappelons ainsi qu’en janvier 2008 et dans le cadre d’un plan triennal pour la réduction à hauteur de 20% de la consommation d’énergie en Tunisie, il a été décidé de subordonner la réalisation des projets dont la consommation d’énergie dépasse 7 mille TEP par an à une autorisation préalable. Cette décision concerne notamment les industries du secteur des IMCCV (Industrie des matériaux de construction, de céramiques et de verreries). C’est dans ce cadre que les autorités compétentes ont incité les cimenteries tunisiennes à l’utilisation de combustibles. Ceci a encouragé certaines usines à installer des ateliers de broyage de coke de pétrole. Selon le même document, actuellement en Tunisie, quatre usines fonctionnent au coke de pétrole à l’instar de S.C.G, C.J.O, S.C.E et S.C.B récemment et les trois restantes (C.A.T, C.I.O.K et S.O.T.A.C.I.B) fonctionnent au gaz naturel.
Toutefois, selon le site Africanmanager, le directeur général des industries manufacturières au ministère de l’industrie, Brahim Chébili, a évoqué certaines difficultés dont notamment le manque de coke de pétrole dû à des difficultés dans l’importation de ce produit utilisé comme combustible pour la fabrication du ciment. Dans le même contexte, ce manque a suscité l’inquiétude de la profession, d’autant plus que le port de la société El Fouledh, chargé temporairement de l’importation de cette matière, est dans l’incapacité d’accueillir les navires et les quantités importées, ce qui risque d’engendrer un déficit de ce produit nécessaire à la fabrication du ciment et par la suite la fermeture des usines de ciment. Les prévisions pour le secteur Comme il a été annoncé, un nouveau projet verra le jour en 2018 avec l’entrée en exploitation d’une nouvelle usine de ciment à Sidi Bouzid d’un coût estimé de 500MD, avec une capacité de production d’un million de tonnes.
Par ailleurs, une attention accrue aujourd’hui est portée à la diversification des partenaires de la Tunisie, et plus particulièrement vers les marchés africains. Cette orientation semble primordiale pour éviter le gros excédant de ciment surtout avec les difficultés liées à l’arrêt des exportations vers certains marchés et plus particulièrement à la décision de l’algérie de ne plus importer de ciment de la Tunisie.