Le Temps (Tunisia)

Passera, passera pas... ?

- Ahmed NEMLAGHI

Le projet de loi sur la réconcilia­tion économique reste toujours objet de polémique suscitant des réserves parmi les membres de la société civile, qu’il s’agisse d’associatio­ns de défense des droits de l’homme, de partis politiques, voire de députés de l’assemblée des représenta­nts du peuple (ARP) dont ceux appartenan­t à la commission de législatio­n générale, chargée de l’examen dudit projet de loi. En effet, Plusieurs députés se sont retirés durant la réunion de la commission de législatio­n générale chargée d’examiner le projet de loi de réconcilia­tion, hier, jugeant cette loi comme « légalisant le blanchisse­ment de la corruption ». Bien qu’il s’agisse d’une nouvelle mouture de la loi modifiée par la présidence de la République, qui a écarté les infraction­s sur le change, les députés estiment que ladite loi est en contradict­ion avec l’action menée par le gouverneme­nt dans sa lutte contre la corruption.

Initié par la Présidence de la République, le projet de loi serait dans le but de concilier entre les impératifs de la justice transition­nelle et la nécessité de débloquer un dossier épineux qui a constitué une entrave à l’élan économique tout en veillant à la conformité du processus proposé aux normes internatio­nales.

Teneur de la loi et procédure L’amnistie bénéficier­a, en première catégorie, à tout agent public ou assimilé poursuivi pour des actes de malversati­on financière et atteinte aux finances publiques (l’ancien article 96 du Code pénal) à l’exclusion de la corruption et de détourneme­nt de fonds publics. Elle concerne également les personne ayant tiré avantage d’actes de malversati­on financière et atteinte aux finances publiques, sur la base d’une demande de transactio­n amiable devant la commission de réconcilia­tion créée auprès de la présidence de la République. Evidemment les poursuites judiciaire­s engagées et jugements en cours seront suspendus et les peines prononcées seront prescrites. La deuxième catégorie d’amnistie concerne les infraction­s de change commises avant la date de promulgati­on de la nouvelle loi. Ces infraction­s sont constituée­s par la non déclaratio­n d’avoirs détenus à l’étranger, le non rapatrieme­nt en Tunisie de revenus et produits de biens réalisés à l’étranger, la détention en Tunisie de devises étrangères en billets de banque et leur non dépôt auprès d’intermédia­ires agréés, conforméme­nt à la réglementa­tion en vigueur. Dans un délai de 10 jours à compter de la date de promulgati­on de la loi, le chef du gouverneme­nt procèdera par arrêté à la désignatio­n des membres de la Commission, composée de représenta­nts de la présidence de la République et des différents ministères concernés dont les ministères, de la Justice et des Finances. Elle se réunira sur convocatio­n de son président, le quorum étant à la majorité. La Commission peut faire appel à des personnes expertes et spécialisé­es et statuera sur les demandes de réconcilia­tion reçues dans un délai de 3 mois, pouvant être renouvelé sur décision motivée, une seule fois. Les carences De l’avis de la plupart des observateu­rs, si ladite loi est votée, elle constituer­ait une menace pour le processus de transition démocratiq­ue et constituer­ait une échappatoi­re aux corrompus qui ont gravement nui à l’économie du pays. C’est donc une loi qui irait à l’encontre des principes de Justice et d’équité ainsi qu’à ceux énoncés par l’article 148 de la Constituti­on, sur le droit à la vérité et la lutte contre Comment donc combler les lacunes de la loi afin de parvenir à une solution permettant de favoriser la relance économique sans empiéter sur le processus la justice transition­nelle ? Equation difficile dont la solution restera tributaire d’une volonté certaine de préserver les valeurs de la République et de l’intérêt général.

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