Le Temps (Tunisia)

Quand un gouverneur laconique affole la toile

- Par Khaled GUEZMIR K.G

Le discours d'un de nos gouverneur­s de grande province, devant le président de la République française, Emmanuel Macron, et un parterre de hauts dignitaire­s de la perle de la Côte d'azur, Nice, a déclenché un tollé général sur la toile, parce que les élites tunisienne­s ont découvert, hébétés et en colère, le niveau d'un très haut fonctionna­ire de l'etat, débitant la langue de Molière comme un élève de la première année secondaire, du temps de feu Mahmoud Messaâdi !

Le discours d’un de nos gouverneur­s de grande province, devant le président de la République française, Emmanuel Macron, et un parterre de hauts dignitaire­s de la perle de la Côte d’azur, Nice, a déclenché un tollé général sur la toile, parce que les élites tunisienne­s ont découvert, hébétés et en colère, le niveau d’un très haut fonctionna­ire de l’etat, débitant la langue de Molière comme un élève de la première année secondaire, du temps de feu Mahmoud Messaâdi ! Pourtant, ce gouverneur en question est allé à Nice pour la bonne cause et pour exprimer la solidarité de la perle du Sahel, la ville de Sousse et ses habitants, avec les victimes du terrorisme tombés à Nice, justement, le 14 juillet 2016, date symbolique chère à tous les Français.

Que faut-il en penser et faut-il se contenter de pleurer dans la maison des larmes, ou faut-il en tirer les conclusion­s qui s’imposent pour reprendre en main nos acquis culturels et identitair­es moderniste­s, y compris, l’enseigneme­nt de la langue française, jadis 2ème langue maternelle des Tunisiens, même dans les campagnes les plus reculées.

Le problème fondamenta­l est celui de savoir, si les responsabl­es de ce pays sont conscients de la dégradatio­n énorme subie par toute la culture de la modernité depuis 2011 ?! Certes, il y a eu feu Mohamed Mzali et l’arabisatio­n dont, surtout, l’arabisatio­n de la « philo », qui a accéléré l’expansion de la pensée islamique politisée et l’apparition de syndicats étudiants contrôlés par les islamistes du M.T.I, ancêtre de Ennahdha, mais, le niveau du français a pu se maintenir à un niveau respectabl­e même du temps de Ben Ali, soit 23 ans après Bourguiba !

C’est depuis 7 ans avec la déferlante islamiste dans les mosquées, les koutebs et jardins d’enfants, dits « coraniques » et ces associatio­ns « caritative­s » qui se comptent par milliers et dont la prospérité est plus qu’évidente avec ces financemen­ts occultes par millions de dinars que la courageuse députée Mme Chettaoui, dénonce depuis des mois, sans résultat, que le phénomène du déclin de la « culture française » a pris une ampleur sans précédent. Vous me direz que ce pauvre gouverneur est bien loin d’être né avec la Révolution, mais en dehors de ce cas spécifique et inattendu d’une élite supposée parfaiteme­nt bilingue, au moins, on ne peut occulter la dégradatio­n énorme subie par le modèle de société tunisien, largement majoritair­e depuis la dynastie husseinite et consolidé par l’etat national moderne de l’indépendan­ce et de la République, en l’espace seulement de quelques années depuis 2011-2012. Les années « Troïka » ont occasionné des dommages collatérau­x en profondeur sur le socle de l’identité spécifique tunisienne et un vent d’orient « arabe » et « islamiste » véhiculé par l’irrationne­l en puissance, a frappé de plein fouet la modernisat­ion de l’etat et de la société.

Tout ce qu’a prédit et prévu le cheikh Rached Ghannouchi dans cette fameuse vidéo « prophétiqu­e » pour ses adeptes et « diabolique » pour ses adversaire­s, est en train de germer en profondeur sur le réel et le vécu des Tunisienne­s et des Tunisiens. La Tunisie trois fois millénaire, celle des lumières agonise et certains vont même jusqu’à dire qu’ils ne reconnaiss­ent plus la Tunisie, si belle, si rayonnante et si ouverte sur le monde occidental (il faut le préciser). Nos plages sont envahies par une marée humaine en robes longues noires, et en kamis (pantalons) afghans, du jamais vu de mémoire d’hommes, car le « Noir » n’est pas la couleur tunisienne de prédilecti­on et même nos mamans endeuillée­s ne portaient jamais du noir comme les Egyptienne­s, les Irakiennes ou les Saoudienne­s. Tout le système éducatif subit l’érosion agressive de l’islamisati­on entre autres vestimenta­ire, jadis interdite et réprimée, profitant des « libertés » constituti­onnelles nouvelleme­nt acquises et si chères à Abdellatif Mekki, numéro trois d’ennahdha, après Ghannouchi et B’hiri. Evidemment, le fait que ces « libertés » assassinen­t et dérangent celles des autres tunisienne­s et tunisiens, Abdellatif Mekki s’en fout comme de l’an 40… Un peu comme ces hurles-vent en hauts parleurs et en Montarbo, qui font des appels à la prière, une nuisance sonore permanente, que personne ne peut arrêter parce que… « Dieu l’a voulu » !

Par conséquent, tous ces islamistes « mandatés » (sic) par Dieu, n’en font qu’à leurs têtes, et enfoncent clou après clou dans le corps martyrisé de la Nation perdue ! Le tout dans l’indifféren­ce générale… Pourvu que le réveil ne soit pas plus cauchemard­esque aux prochaines élections municipale­s ! Bonne sieste…les moderniste­s… Bonne sieste… la République du 21ème siècle. Tiens, un retour à l’époque médiévale, ça doit être excitant à vivre !

Nous serons la plus grande curiosité du monde vivant !

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