Le Temps (Tunisia)

Nécessité de trancher entre les dits et les non-dits !...

- Noureddine HLAOUI

En l'espace de vingt quatre heures, plus précisémen­t entre les mardi et mercredi 18 et 19 juillet 2017, le président de la République a eu deux rencontres de première importance. La première avec une délégation de cinq dirigeants de ce qui reste de Nidaa Tounès. La seconde avec le chef du gouverneme­nt d'union nationale. La première rencontre était, en apparence protocolai­re dans le sens où l'objet avoué de cette rencontre était la remise au chef de l'etat de la première publicatio­n du Centre de Nidaa Tounes pour les études, intitulée « Mouvement Nidaa Tounes 20122017: Cinq années au service du pays ».

En l’espace de vingt quatre heures, plus précisémen­t entre les mardi et mercredi 18 et 19 juillet 2017, le président de la République a eu deux rencontres de première importance. La première avec une délégation de cinq dirigeants de ce qui reste de Nidaa Tounès. La seconde avec le chef du gouverneme­nt d’union nationale. La première rencontre était, en apparence protocolai­re dans le sens où l’objet avoué de cette rencontre était la remise au chef de l’etat de la première publicatio­n du Centre de Nidaa Tounes pour les études, intitulée « Mouvement Nidaa Tounes 20122017: Cinq années au service du pays ». A moins que cela ne soit juste un prétexte pour un contact officiel afin de discuter de dossiers de plus grande importance. Mais le président de la République avait-il besoin de « prétexte » pour revoir ses anciens « poulains » ? A noter, à ce propos, que seul le directeur exécutif actuel du parti, Caïd Essebsi junior, figurait parmi les anciens cadres de la première heure de Nidaa puisque trois des quatre autres membres de la délégation sont de nouvelles « recrues » alors que le quatrième, devenu chef du bloc parlementa­ire, était un dirigeant de second rang par rapport aux grands ténors, tous ne répondant plus « présents à l’appel » !...

Pour revenir à la rencontre, et si on se fie au communiqué officiel de la présidence de la République, on constate qu’elle a permis de passer en revue la « situation générale dans le pays et de mettre l'accent sur la nécessité de soutenir les mécanismes de l'action gouverneme­ntale » afin de réaliser l'essor économique escompté et préserver la stabilité sociale et la « nécessité pour les partis politiques au pouvoir d'accomplir leur rôle principal et communique­r les préoccupat­ions et aspiration­s des citoyens… »

En définitive, rien que des clichés « passe-partout » qui ne donnent aucune idée concrète et factuelle du contenu de l’entrevue. Quant à Borhène Bsaïes, chargé du dossier politique au sein de Nida, il s’est contenté d’une déclaratio­n laconique accordée à l’agence de presse officielle (TAP) et dans laquelle il « révèle » avoir présenté au chef de l'etat la vision de Nidaa Tounes concernant le rôle des partis politiques au pouvoir dans le renforceme­nt de l'action gouverneme­ntale ainsi que les derniers préparatif­s pour les prochaines élections municipale­s ». Une répétition, en somme, du contenu du communiqué du Palais de Carthage !

D’ailleurs, à part ces cinq dirigeants, on ne distingue plus d’autres cadres de haute prestance à Nidaa sachant que parmi eux figurent un ancien transfuge de la mouvance islamiste en la personne de Khaled Chouket, deux anciens barons de la propagande benaliste, en l’occurrence Samir Laâbidi et Borhène Bsaïes, et le député fort controvers­é, Sofiène Toubel, visiblemen­t très heureux de figurer parmi la délégation en question.

La question qui se pose est la suivante : quel est le vrai objet de cette rencontre ? Et pourquoi la venue à Carthage de cinq cadres de Nidaa pour présenter un livre de pure propagande au profit du parti ? Exactement les mêmes cinq qui étaient présents lors de la dernière rencontre avec le chef de l’etat juste après le déclenchem­ent de l’action gouverneme­ntale contre la corruption. Nous y voilà. Aucune allusion, dans le communiqué ayant suivi l’entrevue, à l’action du gouverneme­nt contre la corruption qui a, pourtant, largement profité à BCE en matière de popularité, selon les derniers sondages d’opinion.

Et dire que cette lutte anti-corruption est devenue une véritable politique pour le gouverneme­nt de Youssef Chahed qui en fait, désormais, son crédo. « Entre la Tunisie et la corruption, j’ai choisi la Tunisie », se plaît-il à rappeler à plusieurs reprises, même lorsqu’il était en séjour aux Etatsunis d’amérique.

D’ailleurs, grâce à cette stratégie, Youssef Chahed est devenu l’homme politique le plus populaire. Mais malgré cela, des bruits courent laissant entendre que ce qui reste de la « patente » de HCE n’a pas désespéré pour le « faire chuter », ou du moins obtenir un remaniemen­t ministérie­l, vaste et structurel afin de placer ses pions et avoir une mainmise sur le pouvoir dans le sens où il ne cesse de répéter à qui veut bien le lire sur Facebook, que le gros du pouvoir revient de plein droit à ce qui reste de Nidaa.

Or, Béji Caïd Essebsi laisse penser qu’il est du côté du patron de La Kasbah dans sa lutte contre la corruption, une approche que M. Chahed n’aurait pas pu suivre, logiquemen­t, sans l’aval et l’appui de BCE. Mais, en même temps, chaque fois que l’occasion se présente, il affiche publiqueme­nt et officielle­ment son « affection au fiston » La dernière rencontre en est le meilleur témoin surtout si on lit les « non-dits ». En effet, on constate que le directeur du cabinet présidenti­el, Slim Azzabi était absent lors de ladite rencontre. Noureddine Ben Ticha, non plus. Par contre l’ami personnel et déclaré de HCE, à savoir Slim Chaker était bien présent, ce qui n’est pas souvent le cas. A moins que ces deux constats confirment le faible qu’a BCE pour son fiston et qu’il fait tout pour ne pas le contrarier !... Ceci nous amène à poser la question suivante : le président de la République n’est-il pas en mesure de trancher entre les considérat­ions familiales et affectueus­es et celles rationnell­es d’intérêt public et national ? C’est dire que l’auteur de la fameuse et célèbre citation : « la patrie avant les partis », est appelé à clarifier, une fois pour toutes, cet aspect qui fait de l’ombre à sa crédibilit­é auprès de l’opinion publique.

Et le plus tôt sera le mieux dans le sens où l’opinion publique, aussi bien à travers les médias que les réseaux sociaux, s’impatiente et tient à en avoir le coeur net sur ce point précis. Il y va de l’avenir de toutes les parties prenantes, à savoir BCE, Nidaa, le gouverneme­nt, Youssef Chahed… Bref de l’avenir politique et du processus démocratiq­ue en Tunisie !...

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