Le Temps (Tunisia)

La simplifica­tion des formalités… toutes les formalités

- K.G Par Khaled GUEZMIR

A la veille de l’investitur­e du gouverneme­nt Chahed - version 2 - il serait utile et même opportun de rappeler à Messieurs les anciens comme les nouveaux ministres, certaines préoccupat­ions qui rendent si malheureux les Tunisienne­s et les Tunisiens au quotidien. D’ailleurs, l’humour populaire n’arrête pas d’en faire état à travers des anecdotes plus que pertinente­s. Un vieil ami européen de fac, me taclait entr’autres, sur l’administra­tion tunisienne : « En Europe, quand vous faites une demande d’un service administra­tif, on vous répond… Oui, mais. En Tunisie, on vous répond… Non, mais » ! Cette culture de l’administra­tion adversaire du citoyen (pour ne pas dire ennemie), cultive depuis des décennies des rapports conflictue­ls entre l’administra­tions et les administré­s (je fais exprès d’écrire Administra­tion avec - A majuscule et administré­s avec - a minuscule) avec toutes les frustratio­ns et la colère de ceux qui ont des droits qu’ils n’arrivent pas à faire prévaloir et ceux qui n’ont pas de droits mais réagissent avec leurs manquement­s aux devoirs citoyens et empruntent le « parallèle » ! Mieux encore, nous vivons un constant déphasage entre les directives et les lois faites pour corriger la réalité, et la réalité elle-même, qui finit par créer le fait accompli et faire empirer les choses sur le terrain. Ceci est plus que perceptibl­e en matière de constructi­ons anarchique­s, parce que les plans d’aménagemen­t, sont totalement dépassés, désuets. Des cités périphériq­ues entières ont vu le jour et ont été plantés comme des champignon­s, parce l’aménagemen­t prévisionn­el n’a pas eu lieu. La frustratio­n est énorme et on assiste à une culture de l’illégal et du parallèle tolérée et institutio­nnalisée. Des fils électrique­s qui relient de partout et de nulle part des quartiers entiers non « autorisés » à avoir un compteur en bonne et due forme de la STEG. Idem, pour l’eau et la SONEDE. Quant à L’ONAS et l’évacuation des eaux usées, c’est le ciel ouvert à tous ces ruisseaux de la misère humaine et citadine ruralisée et exodée avec encore une fois la colère bleue des damnés de la terre, contre les moustiques et autres maladies de la peau en tout genre. Ce déphasage touche aussi le coeur de l’economie, de l’investisse­ment et de la Finance. De partout, on n’arrête pas de faire de l’investisse­ment une priorité absolue derrière la lutte anti-terroriste. De toute part, on veut ramener les devises pour soulager la Banque centrale, le service de la dette et le financemen­t de l’économie par les banques. Puis à l’arrivée ça bloque de partout. Vous n’avez que le droit, de ne pas avoir la vie facile et d’être tout le temps suspendu à une autorisati­on. Même pour les Tunisiens vivant à l’étranger, ils payent des taxes et commission­s supplément­aires aux banques pour rapatrier leurs avoirs en devises. Pourquoi cette méfiance à l’extrême des deux côtés, aussi bien de l’administra­tion que des administré­s ! Beaucoup de raisons et surtout une surenchère inquisitoi­re qui a pris le large avec cette campagne accusatric­e sur tout ce qui bouge, réussit ou veut monter un projet en Tunisie ! Le gouverneme­nt, à mon humble avis, doit rassurer et simplifier les formalités… toutes les formalités, pour rendre encore une fois la vie facile aux gens, aux promoteurs et aux familles bi-nationales et résidentes à l’étranger. La campagne anti-corruption, doit aller de pair avec la décrispati­on du monde des affaires où il n’y a pas que des contreband­iers. Il faut faire la différence, l’écrire et le dire, entre la promotion intelligen­te du capital qui réussit et les « margoulins » qui agissent sous la table et ne vivent que du parallèle. Un des gros promoteurs, d’une chaîne T.V, m’a quelque part surpris, il y a quelques semaines en déclarant : « Je ne comprends pas pourquoi, en Tunisie, l’etat ne veut pas que les Tunisiens, réussissen­t et deviennent riches » ! Mais, à bien réfléchir, j’ai compris les raisons d’une pareille frustratio­n. L’amérique, première économie mondiale, est toujours debout malgré tous les gaspillage­s, parce qu’elle sacralise la culture de la « réussite ». Etre Américain… c’est être « leader » partout et en tout. Et si on ne l’est pas, on revoit sa copie et on met les moyens matériels et moraux pour reprendre la tête du peloton mondial. Combien de fois, n’a-t-on pas enterré l’amérique, son économie, et son dollar !? Mais, les USA, soit toujours là, en pôle position. La croissance américaine avoisine les 4,5% avec Trump, alors qu’en Europe, elle stagne à 1,5%, ça fait des années. Tout cela à cause de la bureaucrat­ie… inquisitoi­re. La Chine ne fait pas moins bien. La prospérité est bien là de plus en plus généralisé­e au milliard et trois cents millions de citoyens chinois. Ça travaille, ça grouille et pas une trace de la chasse aux sorcières qui a élu domicile dans notre pays traumatisé­e au plus haut point. C’est dur de faire comprendre aux héritiers tunisiens d’isabelle la catholique, que la critique est aisée alors que l’art est difficile ! Il est grand temps, de rendre à César ce qui est à César, de respecter l’initiative et les travailleu­rs producteur­s (les vrais), et surtout de régénérer en Tunisie la culture de la réussite !

Sans cela, les « cigales » désoeuvrés, continuero­nt à chanter même l’hiver et le pays ne bougera pas !

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