Le Temps (Tunisia)

Suspicions, favoritism­e et entrave à la lutte contre la corruption

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"Le dernier mouvement opéré dans le corps des magistrats ne peut, aucunement, aider la profession à conforter la transition démocratiq­ue, particuliè­rement en matière de lutte contre le crime et la corruption, et à préserver les droits et libertés", a indiqué hier, la présidente de l’associatio­n des magistrats tunisiens (AMT), Raoudha Garafi. Démontrant les conséquenc­es de certaines décisions de mutation sur la lutte anticorrup­tion, Garafi a fait observer que le procureur de la République près le tribunal de première instance de Sidi Bouzid a été muté à Sfax pour avoir ordonné l’ouverture d’une enquête sur de faux constats d’accidents de la route pour extorquer les assurances. Selon Garafi, "plusieurs parties officielle­s ont tenté de dissuader le magistrat de poursuivre cette enquête". Lors d’une conférence de presse, hier, Raoudha Garafi a dénoncé le favoritism­e dans l’attributio­n des fonctions judiciaire­s sensibles, tels que la présidence des chambres de cassation, des cours d'appel et des tribunaux de première instance ou encore le poste de procureur général.

Elle a, par ailleurs, déploré l’absence de toute transparen­ce dans les travaux du Conseil de l’ordre judiciaire concernant le mouvement des magistrats. A ce propos, Garafi a appelé les magistrats concernés à intenter des recours à cet effet. Sur la situation financière des magistrats, Garafi a indiqué que les autorités avaient affirmé, mercredi, que les décisions d’attributio­n de primes aux magistrats attachés aux pôles judiciaire­s économique­s et financiers et au pôle judiciaire antiterror­iste vont bientôt être publiées. Selon Gafari, la décision d’exonérer la mutuelle des magistrats des impôts est, également, entrée en vigueur, ajoutant que l’améliorati­on des conditions de travail dans les tribunaux est la priorité actuelle de plusieurs départemen­ts ministérie­ls.

Pour sa part, le secrétaire général de L’AMT, Hamdi Mrad, a critiqué l’état des locaux fournis par les autorités aux sections régionales du Tribunal administra­tif. "Certains locaux ne répondent pas aux critères et ne peuvent pas abriter des tribunaux", a-t-il expliqué, citant l’exemple de la chambre de Bizerte qui n’est autre qu’"un simple appartemen­t". Pour Mrad, le report des élections municipale­s joue en faveur de la mise en place des tribunaux administra­tifs. "Cela nous permettra de nous préparer convenable­ment à ce rendez-vous important et à notre devoir d’examiner les recours dans les délais", a-t-il expliqué. Il a, également, appelé à l’accélérati­on des procédures de recrutemen­t des ressources humaines. Le report des élections, a-t-il ajouté, ne doit pas être un prétexte pour ralentir l’achèvement de la mise en place de ces tribunaux. Rappelons que L’AMT a déclaré, lors de sa réunion dimanche à Hammamet, que les recours formulés contre le mouvement du corps des magistrats, et dont le nombre avoisine les 300, révèle la gravité des dépassemen­ts commis lors de la prise des décisions relatives à la mutation des magistrats, à leur avancement et à l’attributio­n des fonctions judiciaire­s. Le conseil national de L’AMT a invité les magistrats, dans une motion publiée à l’issue de ses travaux, à saisir le Tribunal administra­tif en cas de réponse négative aux recours déposés.

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