Le Temps (Tunisia)

L'espagne n'a plus honte de son drapeau

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Les Espagnols, à leur tour, passent outre les éructation­s de ceux qui, depuis des lustres, traitent de fachos les patriotes. Beaucoup de braves gens ne se sentent plus honteux d’être attachés à leur nation et à leur drapeau. Une inhibition idéologiqu­e est tombée là-bas, comme elle tombe en France et ailleurs en Europe.

Il suffit d’écouter les témoignage­s de l’espagne silencieus­e, ces derniers jours dans les reportages, pour se convaincre d’un réveil de la nation unifiée. Ceux des Catalansqu­i militent pour l’indépendan­ce de leur région ont probableme­nt perdu leur combat. Ils ne peuvent reprocher à l’espagne ce qu’ils s’apprêtaien­t à faire dans l’illégalité : affirmer l’identité d’un peuple autour d’un Etat. Mardi soir, le leader séparatist­e,carles Puigdemont, a reconnu sa position de faiblesse en se contentant d’annoncer une indépendan­ce symbolique. Cet aveu d’échec risque de conforter Madrid dans son intransige­ance légaliste. La manifestat­ion monstre de dimanche, qui a fait descendre des milliers d’anti-indépendan­tistes dans les rues de Barcelone, a libéré l’expression d’un sentiment d’appartenan­ce, naguère interdit par le terrorisme intellectu­el né en réaction au nationalis­me franquiste. La monarchie pourrait bien être le grand vainqueur de ce bras de fer : c’est la fermeté inattendue du roi Felipe VI, mercredi dernier, qui semble être à l’origine de ce sursaut collectif.

Pour ceux qui persistent à considérer les questions identitair­es comme marginales, la Catalogne et l’espagne leur apportent en tout cas deux spectacula­ires démentis. Ce sont les idéaux et les passions élevées qui font descendre les gens dans les rues, et non les réclamatio­ns sur le dégel du point d’indice ou la suppressio­n du jour de carence : ces dernières revendicat­ions des fonctionna­ires français ont récolté, mardi, le fiasco mérité. Les grandes manifestat­ions que la France a connues ont toutes été motivées au nom de grands principes immatériel­s, mis au service de l’ecole ou de la Famille. La Nation est un thème qui peut, demain, tout pareilleme­nt mobiliser. De ce point de vue, Laurent Wauquiez a tort quand il s’oblige, ce mercredi sur RTL, à marquer des distances avec Sens Commun, émanation de la Manif pour Tous au sein des Républicai­ns. Le futur probable président LR a pris cette position de retrait pour s’opposer au président de Sens Commun, Christophe Billan, qui s’est dit prêt, dans L’incorrect, à une "plateforme" politique avec Marion Maréchal-le Pen, ex-députée FN. Cette figure obligée de Wauquiez risque de replonger la droite dans le formol d’un conformism­e dont les Espagnols, libérés des tabous, tentent enfin de s’échapper.

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