La science infuse des faits divers
L’approche est assez neuve : Edouard Launet s’est intéressé au « coup de marteau sur la tête du chat », alors que le fait divers traditionnel se consacre plutôt aux chiens écrasés. Il y avait incontestablement un champ à explorer. Launet, ingénieur de formation, un temps journaliste scientifique avant d’atterrir aux pages Culture de Libération, s’est fixé une tâche ardue : traiter le fait divers comme un fait scientifique, c’est-à-dire en « sonder les soubassements techniques » pour « rapprocher le champ du fortuit de celui du construit ». Les exemples choisis sont évidemment rigoureusement exacts. « Il meurt foudroyé à cause de sa perche à selfie », prélevé dans Le Parisien ; « Un chirurgien trouve dix-huit brosses à dents dans l’estomac de son patient » (Liveleak.com) ; « Une adolescente déclarée morte se réveille dans son cercueil et meurt étouffée » (The Mirror) ; « Elle achète un congélateur et trouve un cadavre dedans » (AFP).
Certains épisodes sont désespérément banals. « A la Roche-sur-yon, il casse des rétroviseurs pour prévenir d’une attaque d’extraterrestres » (Ouest-france) ou « Il oublie sa femme à la station-service et ne s’en aperçoit qu’après 100 kilomètres » (Daily Telegraph), mais c’est cette banalité qu’explore Launet, en trois pages concises après d’intensives recherches. Exemple : « Sicile : ils tuent leur victime avec une motte de beurre » (Le Parisien).
Le crime était presque parfait, quand la police est arrivée le beurre avait fondu, l’arme du crime aussi. Le cas n’est pas unique. Les lecteurs attentifs des Archiv für Kriminologie se souviennent qu’en 2008 il y eut à Hanovre un cas de beurre à l’arsenic. Launet constate que l’assassinat ne nécessite que 250 g de beurre froid, s’il est convenablement enfoncé dans la gorge. …..