Quand une statue du XVIIE siècle symbolise la débauche...
En Egypte, les réseaux sociaux sont le théâtre d’une bataille des anciens et des modernes dont l’objet est une célèbre statue italienne du XVIIE : Le rapt de Proserpine, une oeuvre du Bernin exposée à Rome. Une plainte a même été déposée devant le procureur général où la statue est qualifiée « d'incitation au stupre et à la débauche ». La plainte vise Khaled Mountasser, un éditorialiste du journal cairote al-watan, qui, depuis des années, milite pour la laïcité et dénonce les salafistes et autres rigoristes pour obscurantisme. Or, Khaled Mountasser a publié sur sa page Facebook une photo de la statue du Bernin. L’occasion pour Khaled al-guindi, un célèbre télécoraniste de s’en prendre à celui qu’il estime être un ennemi de l’islam. « Ne voit-on pas le dieu des enfers, saisissant dans ses bras une femme peu
vêtue, Proserpine, fille de la déesse de la fertilité ?» Le cheikh al-guindi a vu dans cette oeuvre mythologique de la pornographie. Laïcité et libertinage, la grande confusion
Samir Sabri, un avocat qui s’est rendu célèbre en poursuivant tout ce qui n’est pas puritain, a déposé une plainte auprès du procureur accusant le chantre de la laïcité « d''ncitation au stupre et à la débauche », un délit passible de cinq ans de prison. Il y a évidemment les salafistes mais aussi les conservateurs qui ont attaqué Khaled Mountasser beaucoup plus pour sa défense de la laïcité que pour la photo de la statue. L’occasion pour eux de démontrer que laïcité est « synonyme de libertinage visant à débaucher la jeunesse et à la détourner des préceptes de l'islam »…
Retour au puritanisme islamiste
Certains pensaient que ce rigorisme social allait s’affaiblir au fil de la répression contre les Frères musulmans. C’était ignorer que la confrérie était surtout intéressée par le pouvoir alors que ce sont les salafistes qui veulent imposer une stricte morale sociale. Une vision de la société que certains voient comme une menace pour l’identité culturelle de l’egypte. Quid de la statuaire et des basreliefs pharaoniques dont les personnages sont généralement légèrement vêtus ? se demandent les libéraux qui rappellent que des salafistes voulaient dynamiter le grand Sphinx de Gizèh tout comme les talibans
l’ont fait pour les statues de Bouddha en Afghanistan !