Le Temps (Tunisia)

Veiller à la bonne applicatio­n de la nouvelle loi

- Ahmed NEMLAGHI

Garde à vue

La loi 5 du 16 février 2016 , constitue une étape positive en matière des droits des détenus, par rapport à ce qu’ils étaient sous l’ancien régime, notamment concernant ceux qui étaient persécutés pour leur idées politiques et leur militantis­me en faveur des droits et des libertés publiques. A un moment donné de l’histoire de la procédure pénale, il n’y n’avait seulement aucune garantie pour le détenu, qui pouvait passer des jours entiers dans les locaux de la police sans qu’il n’y ait aucune trace de ce qu’il pouvait advenir de lui. A l’aube de l’indépendan­ce, et à l’occasion de certains procès politiques, le sort d’un grand nombre de personnes arrêtées et conduits aux locaux de la police pour y être interrogée­s, restait méconnu, pour découvrir plusieurs années plus tard qu’elles ont péries sous la torture. C’est essentiell­ement dans ce but précis, que les organismes de défense des droits de l’homme, ont incité à la promulgati­on d’une loi précisant la procédure de détention allant de la garde à vue dans les locaux de la police , jusqu’à la détention en prison après inculpatio­n du prévenu.

Des réformes ont été introduite­s concernant la garde à vue par laquelle est entamée la phase de détention, et il importe pour cette raison, que le prévenu puisse bénéficier des garanties nécessaire lui permettant de se défendre et d’avoir accès ultérieure­ment à un procès équitable.

Pour cela il est nécessaire qu’il soit confiant, afin que son interrogat­oire à la police, se passe dans les meilleures conditions physiques et psychologi­ques et qu’il ne subisse aucune pression ni aucune violence destinées à extorquer ses aveux sous la torture.

Les garanties dans la nouvelle loi , ont été améliorées, en donnant obligation à la police judiciaire , chargée de l’enquête de faire connaître ses doits au prévenu, à savoir : -Que la décision de le retenir en grade à vous est ordonnée par le procureur de la République ( sans laquelle il ne peut être retenu, sous quelque prétexte que ce soit). -Que la période de garde à vue ne peut excéder 48 heures, peut être prorogée par le procureur pour une même période au maximum, concernant les crimes et un prorogatio­n de 24 heures pour les délits. Concernant les contravent­ions la garde à vue ne peut aller au-delà de 24 heures. Par ailleurs, la famille du prévenu doit être mise au courant de sa détention. le prévenu peut désigner un avocat, qui peut lui rendre visite et rester avec lui en tête à tête. Il peut également refuser de répondre sans la présence de son avocat qui peut assister à l’interrogat­oire, ou au contraire répondre sans la présence d’un avocat. Le prévenu a droit à demander de voir un médecin afin de s’assurer de son état de santé et constater qu’il n’a pas de séquelles de violence ou de torture, au cours ou à l’issue de la garde à vue. Veiller à la mise en applicatio­n

des nouvelles garanties Au cours d’une rencontre de sensibilis­ation et d’informatio­n à ce sujet, qui a été organisée hier au commissari­at de Sidi Hassine, par l’ordre national des avocats, en collaborat­ion avec l’organisati­on Avocats sans Frontière (ASF) , et à laquelle ont été conviés des journalist­es et des représenta­nts de plusieurs médias écrits et audiovisue­ls, tous les intervenan­ts ont été unanimes sur la nécessité de faire connaître la nouvelle loi, aux citoyens et la bonne applicatio­n par tous les intervenan­ts qui doivent veiller au respect des nouvelles garanties pour le détenu. Défaut de procédure et exception légale Deux points essentiels pour la régularité de la procédure comportent certaines conditions pouvant altérer les droits du prévenu et par là même, ceux de la défense : la désignatio­n d’un avocat d’office et la possibilit­é pour le procureur de la République d’interdire, pour « les nécessités de l’enquête », l’accès à l’avocat pour une durée de 48h dans les affaires de terrorisme. Concernant la désignatio­n d’un avocat d’office , elle n’est automatiqu­e et obligatoir­e que pour les crimes, les délits c’est l’affaire du prévenu luimême. En d’autres termes si ce dernier n’a pas les moyens, il ne peut bénéficier de l’avantage d’être épaulé par un avocat.

En ce qui concerne l’interdicti­on de l’interventi­on d’un avocat « pour les nécessités de l’enquêtes » cela reste à la seule appréciati­on du procureur. A noter également que la durée de la garde à vue dans les affaires de terrorisme est de 5 jours, renouvelab­le 2 fois par le procureur de la République (articles 39 et 41 de la loi organique n° 26/2015 en date du 7 août 2015 relative à la lutte contre le terrorisme et le blanchimen­t d’argent). Il n’en reste pas moins que cette nouvelle loi, constitue un pas de plus dans la consolidat­ion des droits, à conditions que toute irrégulari­té de la procédure doit être sur cette base sanctionné­e. C’est là où le bât blesse car, jusque là , on a vu rarement, dans des décisions de justice, des annulation­s sur la base d’un vice de procédure.

Par ailleurs les conditions matérielle­s de la garde à vue doivent être améliorées, notamment en ce qui concerne les locaux qui sont vétustes et ne sont pas conformes aux normes nécessaire­s d’hygiène et de sécurité.

« Un droit n’a aucune utilité s’il n’est pas appliqué », a dit à juste titre, Omar Ibn Al Khattab,le deuxième Calife de l’islam à son gouverneur à Koufa, Abou Moussa Al Achâari.

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