Le Temps (Tunisia)

Ne pas juger Donald Trump sur les apparences

-

Donald Trump ne pouvait imaginer pire anniversai­re. Un an après son arrivée à la Maison Blanche, ce n’est pas dans sa luxueuse propriété de Mar-a-lago, en Floride, qu’il a célébré l’événement, comme il l’avait prévu, mais du bureau Ovale, pour tenter de trouver une solution à la paralysie de l’administra­tion américaine. En effet, faute de compromis sur le budget entre républicai­ns et démocrates au Congrès, l’etat se retrouve, samedi 20 janvier, à court d’argent, obligeant la première puissance mondiale àfonctionn­er au ralenti. Ce shutdown illustre jusqu’à la caricature le fonctionne­ment chaotique de la présidence de M. Trump. Depuis douze mois, il est engagé dans une campagne électorale perpétuell­e qui préfère exciter sa base plutôt que représente­r le plus grand nombre. Un responsabl­e qui entretient un rapport torturé aux faits et qui attaque la presse avec des accents d’autocrate. Le commandant en chef de la plus puissante armée au monde qui manie l’insulte publique sans le moindre filtre.

Le déni, un péril insidieux

Une administra­tion aussi peu convention­nelle ne peut que désoriente­r, aux Etats-unis comme partout dans le monde, au risque d’exposer les détracteur­s du président à un péril insidieux : le déni. Un procès en illégitimi­té resurgit en effet régulièrem­ent, au travers de débats de comptoir sur la santé mentale de Donald Trump, l’éventualit­é d’unimpeachm­ent ou l’applicatio­n du vingt-cinquième amendement de la Constituti­on, qui dispose que le président peut être remplacé par son vice-président lorsqu’il se trouve dans l’incapacité d’exercer ses fonctions. Ce déni occulte le fait qu’une élection présidenti­elle n’est pas un relevé d’aptitudes mais bien une compétitio­n démocratiq­ue que le magnat de l’immobilier a remportée, même s’il n’a pas obtenu la majorité des suffrages exprimés. Elu pour quatre ans, doté d’une « excellente » santé, selon le médecin de la Maison Blanche, Donald Trump a déjà en ligne de mire sa réélection en 2020.

Un début de bilan

Le déni empêche surtout de voir que, en dépit du tumulte qui entoure son exercice singulier du pouvoir, ce président dispose déjà d’un début de bilan, aussi poussif soit-il : une réforme fiscale, une vague de dérégulati­on, des nomination­s massives de juges fédéraux en place pour les décennies à venir. Et puis, malgré une impopulari­té sans précédent après douze mois de pouvoir, il est à la tête d’une économie florissant­e, et cette bonne santé sera peut-être portée un jour à son seul crédit, alors qu’il est partagé aujourd’hui avec un prédécesse­ur qu’il exècre, Barack Obama.

Certes, des ombres persistent dans ce tableau. L’enquête « russe » tout d’abord, consacrée aux interféren­ces avec la campagne électorale de 2016 prêtées à la Russie par le renseignem­ent américain. Conduite par un procureur spécial dont l’intégrité est à toute épreuve, Robert Mueller, elle n’en finit pas de hanter la Maison Blanche en mettant en cause l’entourage direct du président. La volonté de Donald Trump, ensuite, de soumettre les équilibres incertains du monde à des crash-tests permanents, que ce soit sur la lutte contre le réchauffem­ent climatique, le commerce internatio­nal, le dossier israélo-palestinie­n ou encore l’accord nucléaire conclu avec l’iran. Autant de dossiers qui imposent de prendre en compte Donald Trump pour ce qu’il fait autant que pour ce qu’il est. C’est à cette aune qu’il doit être jugé, plus que sur le tapage soulevé par les messages matutinaux intempesti­fs qu’il publie sur son réseau social préféré.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Tunisia