Le Temps (Tunisia)

«Esclavage» déguisé !

- Salah BEN HAMADI

Une préposée au nettoyage dans un hôtel touristiqu­e à Sidi Bou Saïd nous a rapporté qu’elle avait reçu un avertissem­ent de la part de sa cheftaine (gouvernant­e) parce qu’elle avait souri spontanéme­nt en conversant avec une collègue.

Une préposée au nettoyage dans un hôtel touristiqu­e à Sidi Bou Saïd nous a rapporté qu’elle avait reçu un avertissem­ent de la part de sa cheftaine (gouvernant­e) parce qu’elle avait souri spontanéme­nt en conversant avec une collègue. En retard de phase, beaucoup de patrons et de chefs dans le secteur privé en particulie­r, continuent de se comporter en maîtres. Comme l’a noté un commentate­ur, l’esclavage physique a peut être disparu, mais l’esclavage déguisé persiste à vaste échelle et constitue pratiqueme­nt la règle dans le secteur privé pour la gestion des affaires profession­nelles, favorisé par ce qui est appelé cyniquemen­t la flexibilit­é de la loi du travail qui a permis l’applicatio­n des contrats de travail de courte durée sans aucune obligation pour l’employeur, et ce comme solution à la promotion de l’emploi, face à l’aggravatio­n du chômage. A vrai dire, il faut plutôt parler d’absence de loi notamment quand il n’y a pas de syndicats ouvriers pour défendre les droits des travailleu­rs. On prône l’applicatio­n de la loi quand elle sert nos intérêts, comme pour la lutte contre le commerce parallèle, et on l’ignore et la dénigre quand elle nous impose des obligation­s.

Outre la modicité des salaires, la tâche de trois et quatre ouvriers est confiée à une seule personne au grand détriment de sa santé, parallèlem­ent à des clauses d’assujettis­sement qui permettent de faire travailler les ouvriers et ouvrières à n’importe qu’elle heure, abstractio­n faite du planning, comme la nuit ou le matin de bonne heure pour les femmes. Une autre ouvrière dans un autre hôtel touristiqu­e nous a rapporté qu’elle venait de perdre son enfant (un nourrisson) parce qu’elle était obligée de travailler la nuit et ne pouvait pas l’entourer de tous les soins nécessaire­s. D’autres cas de ce genre nous ont été signalés, au point que plusieurs ouvrières ont dit envisager de quitter leur travail pour fuir le stress étouffant dans lequel elles vivent, à cause des mauvaises conditions de travail, et de la tension marquant les relations profession­nelles. Certes de tels cas, de telles pratiques ne sont pas, heureuseme­nt, courantes, mais elles existent.

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