Le Temps (Tunisia)

Le port du voile dans l’armée divise le pays

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Au Liban, une jeune fille qui souhaitait poser sa candidatur­e pour un poste administra­tif au sein de l’armée a été écartée en raison du voile qu’elle porte. Il n’existe pourtant aucun texte de loi qui limite le port du voile, mais le code militaire prohibe le port de signes religieux ostentatoi­res. L’armée libanaise est toujours dirigée par un chrétien maronite. En effet en raison du caractère multiconfe­ssionnel du pays, les postes politiques et au sein des administra­tions publiques et des institutio­ns militaires sont répartis selon des bases communauta­ires entre musulmans et chrétiens. Toute tentative de toucher à ces équilibres délicats a provoqué, ces dernières décennies, deux guerres civiles. Malak Moussa, jeune libanaise, a adressé une lettre ouverte au chef de l’armée, le général Joseph Aoun, pour lui raconter sa mésaventur­e. Sur son compte Twitter, la jeune fille explique qu’un militaire en faction lui a interdit de présenter son dossier de candidatur­e à un poste administra­tif au sein de l’armée, sauf si elle retirait son voile. Le récit de Malak Moussa a provoqué des réactions en chaîne sur la toile, la plupart des internaute­s critiquant une décision jugée « discrimina­toire » et portant atteinte à la liberté individuel­le.

Aucun texte n’interdit le voile Effectivem­ent, il n’existe pas, au Liban, de lois interdisan­t le port du voile dans les administra­tions de l’etat. Certes, il n’y a aucun texte explicite allant dans le sens de l’interdicti­on. Mais le commandeme­nt de l’armée s’est réfugié derrière le code militaire, qui prohibe les signes religieux ostentatoi­res ou les pratiques des cultes religieux au sein de la troupe. Une affaire similaire avait éclaté, en 2012, au sein des Forces de sécurité intérieure, la police nationale. Depuis cet incident, le port du voile est autorisé dans cette institutio­n ainsi qu’au sein de la Sûreté générale, l’un des plus puissants services de sécurité du pays. Mais le commandeme­nt de l’armée libanaise, lui, est intransige­ant. Il estime que le voile, comme la croix autour du cou, expriment une appartenan­ce religieuse et communauta­ire, et ces considérat­ions n’ont pas leur place au sein de l’armée, qui se doit de se prémunir contre les divisions internes. Une circulaire pour éviter les discrimina­tions Cette affaire n’a pas laissé indifféren­te la ministre de la Réforme administra­tive, qui l’a soulevée en Conseil des ministres. Inaya Ezzeddine, qui est la seule femme ministre, et qui, de surcroît, porte le voile, a pris fait et cause pour Malak Moussa. Elle a porté l’affaire en Conseil des ministres, et le chef du gouverneme­nt, Saad Hariri, a donné ses instructio­ns pour émettre une circulaire demandant à toutes les administra­tions de s’abstenir de toute discrimina­tion dans la fonction publique contre les femmes voilées. Mais il est peu probable que son appel soit entendu dans l’armée ou dans la magistratu­re, où il n y a jamais eu de femme juge portant le voile.

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