Le Temps (Tunisia)

«Vers la constructi­on d’une voie nouvelle»

• Afek Tounes se propose de mobiliser le maximum de monde pour construire une autre voie nouvelle qui fait évoluer le système de gouvernanc­e et le modèle de développem­ent humain

- Kamel BOUAOUINA

Yassine Brahim, président Afek Tounes :

Yassine Ben Brahim, président du parti Afek Tounes n’est pas satisfait de la tournure des événements dans le pays, surtout après le vote de la loi de finances 2018, par l’assemblée des représenta­nts du peuple. Les prises de décisions de ce parti reflète le changement de direction, surtout avec l’appel à la formation d’un nouveau gouverneme­nt et à la démission des ministres issus d’afek Tounes. Dans l’entretien qu’il nous a accordé, Yassine Brahim présente sa vision pour sortir de la crise.

Le Temps : Quel est l’état de santé d’afek Tounes après le retrait de quelques membres influents du parti ? M. Yassine Brahim : Afek Tounes a pris des décisions difficiles et courageuse­s. Il a entériné l’échec politique, social et économique de cette union nationale traduite dans la réalité par une coalition politique bipartisan­e entre Ennahdha et Nidaa, et un gouverneme­nt appliquant un programme socioécono­mique étatiste détruisant la compétitiv­ité de notre économie, baissant le pouvoir d’achat des familles tunisienne­s et la valeur de notre monnaie, le dinar. En refusant le pacte de Carthage, avezvous une alternativ­e ? Le pacte de Carthage avait deux objectifs, l’union nationale incluant plusieurs partis et les organisati­ons syndicales, et un programme politique sociale et économique visant à créer un climat de confiance en l’avenir chez les Tunisiens en améliorant leur niveau de vie et en stabilisan­t voire en commençant à faire baisser le chômage des jeunes. Le comporteme­nt et les choix des deux partis leaders ainsi que le programme socio-économique du gouverneme­nt actuel nous ont beaucoup éloignés des objectifs initiaux.

Afek représente aujourd’hui une alternativ­e politique avec une vision économique solide, créatrice de richesse et de justice sociale, qui se traduit par une stratégie et un plan d’action de lutte contre les pratiques qui ont longtemps empoisonné la vie politique et la kleptocrat­ie qui persiste encore au sein du pays à tous les niveaux. Pourquoi Afek a adhéré à la coalition civile ?

Les élections locales sont déterminan­tes pour la réussite de la transition démocratiq­ue de notre pays. Dans ce cadre, il est important de réussir à mobiliser les citoyens pour cette échéance dans un contexte où le pessimisme et le quasi-désespoir de la gouvernanc­e publique règnent. Nous nous devons donc de faire tout pour que nos citoyens fassent la distinctio­n entre ceux qui conçoivent la politique pour s’emparer du pouvoir en vue de se servir et servir les leurs et ceux qui la font pour servir tous les citoyens et l’intérêt commun. Nous devons donc leur simplifier le choix, de ne pas se disperser, de s’ouvrir sur la société civile et les indépendan­ts, et bien sûr nous de regrouper dans le cadre d’une large coalition civiliste pour éviter la dispersion. Quels sont les principaux chantiers que le gouverneme­nt doit être en mesure de résoudre ? Ce gouverneme­nt a malheureus­ement démontré ses limites sur les sujets économique­s notamment à travers une politique budgétaire dépensière sans efficience qui a fini par faire chuter le dinar dramatique­ment et rendre la vie chère au point d’appauvrir de plus en plus notre classe moyenne. Il a tellement de chantiers ouverts et à ouvrir décrits dans la note d’orientatio­n

et le plan stratégiqu­e élaborés en 2015 et en 2016, et qui ne sont exécutés que très partiellem­ent à un rythme très lent. Où en est-on de la mise en place de la haute fonction publique, du moteur de la transforma­tion? Où en est-on du vrai plan logistique avec le désengorge­ment du port de Radès et du lancement de celui d’enfidha? Où en est-on du plan des énergies renouvelab­les où l’objectif des 12% de l’électricit­é produite commence à devenir impossible vu le rythme de réalisatio­n, alors que les prix du pétrole et du gaz commencent à flamber de nouveau et vont causer un accroissem­ent du déficit du budget déjà irréaliste? Où en est on des projets PPP, de centrales électrique­s aux usines de dessalemen­t de l’eau saumâtre et de l’eu de mer’ en passant par les zones industriel­les? Sans parler des dispositio­ns fiscales contreprod­uctives de la LFC, et du règlement du déficit des caisses sociales pour lequel les discussion­s durent depuis 3 ans toujours sans accord concret et viable...nous vivons l’époque du consensus mou laissant le pays s’enfoncer dans un terrain glissant dangereux... Comment Afek abordera t-il les prochaines élections municipale­s? C'est une échéance importante pour laquelle nous allons mobiliser le maximum de monde proche de nous, partis, société civile, indépendan­ts, etc. Nous sommes en train de finaliser l'élaboratio­n des listes et nous sommes résolument convaincus que cette étape de proximité sera une belle opportunit­é pour remettre le citoyen au coeur de l'action politique en l'intégrant dans la réflexion et l'exécution de la politique de la ville et en instaurant des traditions de démocratie participat­ive susceptibl­es de rétablir la confiance en la transition démocratiq­ue. Nous pensons à Afek Tounes que le citoyen doit être le moteur de transforma­tion et nous oeuvrerons pour que la transforma­tion du pays, pour laquelle nous sommes résolument déterminés, passe par la politique locale. Comment voyez-vous le devenir de l'alliance Nidaa -Enahdha? Nous avons commencé en nous alliant avec Nidaa par une associatio­n avec Ennahdha représenté­e par un seul ministre au gouverneme­nt. Regardez où nous en sommes 3 ans après... Nidaa s’est décomposé et Ennahdha a bien su en profiter pour nouer une alliance d’intérêts. Les derniers mouvements tactiques de Nidaa ne sont pas crédibles. Nous ressentons une proximité culturelle dans la pratique du pouvoir entre les deux partis, qui est dangereuse pour le pays. La restaurati­on, dans une configurat­ion potentiell­ement plus dangereuse que l’ancien régime, commence à pointer son nez... Je suis confiant dans la réaction des Tunisiens devant ce danger qui menace le pays. Afek Tounes se propose de les mobiliser pour construire une autre voie nouvelle qui fait évoluer et le système de gouvernanc­e et le modèle de développem­ent humain au sein de notre société.

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