Le Temps (Tunisia)

Coercition juridique et impondérab­les socio-économique­s

- Ahmed NEMLAGHI

La notion d’entreprise a évolué avec l’évolution d’une volonté commune dans le sens de la consolidat­ion des droits et des libertés. L’entreprise n’est plus cette entité économique qui était destinée à la production à outrance au détriment des travailleu­rs et des conditions environnem­entales, au sein de laquelle le patron était le seul maître à bord et agissait pour son propre profit, et aux dépens de toutes les parties prenantes. En produisant et en fournissan­t des biens et des services avec la création d’emplois et de valeurs pour les salariés, elle contribue à l’intérêt général.

Toutefois et étant donné qu’elle fait partie intégrante du milieu dans lequel elle vit elle doit donc s’intéresser à toutes les facteurs liées à son environnem­ent. La notion d’entreprise a donc évolué au fur et à mesure qu’évoluaient les relations du travail, d’une situation de domination patronale, à celle, de l’interventi­on de l’etat par le biais des lois, pour consolider les droits de cette entité économique, et sauvegarde­r par la même la paix sociale.

Entreprise et environnem­ent C’est dans cette optique qu’est née la notion d’entreprise sociétale, qui est définie par l’union européenne (UE) comme étant « l’intégratio­n volontaire des préoccupat­ions sociales et écologique­s des entreprise­s à leurs activités commercial­es et leurs relations avec leurs parties prenantes. Être socialemen­t responsabl­e signifie non seulement satisfaire pleinement aux obligation­s juridiques applicable­s, mais aussi aller au-delà et « investir davantage dans le capital humain, l’environnem­ent et les relations avec les parties prenantes ».

C’est donc un concept nouveau selon lequel, il doit être tenu compte, pour la création d’une entreprise, de l’environnem­ent et tous les facteurs sociaux qui en découlent. Cela constitue à priori un dilemme, notamment concernant certaines usines polluantes, avec des dégagement­s de matière nuisibles pour la santé, sans parler bien sur de radiations qui sont fatales pour l’existence car elles génèrent des maladies incurables et mortelles.

Normes internatio­nales et réalités sociales En Tunisie, l’idée de créer une loi dans ce sens, pour responsabi­liser les entreprise­s a commencé à germer depuis 2014, date marquant la nouvelle Constituti­on qui consacre entre autres droits humains celui de la protection de l’environnem­ent. Un projet de loi a don vu le jour en 2017, sur la responsabi­lité sociétale de l’entreprise au sein de laquelle, plusieurs facteurs entrent en jeu. Ces facteurs sont cités dans l’article 3du projet de loi dont l’environnem­ent, l’emploi, l’éducation, la protection de l’enfance. Cet article cite aussi les projets destinés au développem­ent des régions. Bref tout ce qui contribue à l’épanouisse­ment économique et ne constitue pas une menace pour l’environnem­ent. Comité de responsabi­lité sociétale de

l’entreprise L’article 4 du projet de loi, évoque la création d’un comité de responsabi­lité sociétale, dont le rôle est de proposer un programme annuel des activités envisagées dans ce sens, pour la lutte contre la pauvreté, notamment par la création de postes d’emploi. Il est spécifié dans le même article, qu’il faut tenir compte des normes internatio­nales. Toutefois et selon certains observateu­rs « ne répond pas aux normes internatio­nales en vigueur », tel que l’a indiqué le ministre des Affaires Locales et de l’environnem­ent. En tout état de cause, il n’y a pas de modèle type, car les données changent d’un pays à l’autre et d’un continent à l’autre.

Le projet de loi sur la responsabi­lité sociétale doit être fignolé davantage, afin de mieux tenir compte de nos réalités économique­s.

A titre indicatif , et tel que l’a évoqué la députée Leila Ouled « l’impact négatif des Les entreprise­s polluantes, comme la Compagnie des Phosphates de Gafsa (CPG), exploitent les richesses et font des bénéfices, et le projet de loi « n’obligera pas les entreprise­s à respecter à la lettre les normes, étant donné que cette démarche nécessiter­a du temps, des mécanismes de suivi ».

En d’autres termes, cette loi n’a pas de force obligatoir­e, bien qu’une récompense sous forme de prix annuel soit prévue pour le chef d’entreprise qui tiendrait compte le plus des facteurs humains audelà de ceux du profit.

Entre les besoins de production et de création d’emploi, et les problèmes sociaux et environnem­entaux, l’équation est difficile, d’autant plus qu’elle est à plusieurs inconnues.

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