Le Temps (Tunisia)

Papas en Tunisie: pour plus d’implicatio­n et d’éducation positive

- Rym BENAROUS

Famille et enfance

Parce que les papas sont sacrés et qu’ils représente­nt l’un des piliers essentiels de la famille, une initiative collective a été lancée par le ministère de la Femme et L’UNICEF en partenaria­t avec les ambassades de Finlande et de Suède.

Parce que les papas sont sacrés et qu’ils représente­nt l’un des piliers essentiels de la famille, une initiative collective a été lancée par le ministère de la Femme et L’UNICEF en partenaria­t avec les ambassades de Finlande et de Suède. Intitulée «Papas en Tunisie», elle vise à mettre en valeur la paternité positive et à encourager les pères et à s’impliquer plus dans l’éducation de leurs enfants et à mieux contribuer à leur épanouisse­ment.

L’initiative «Papas en Tunisie» s’inscrit dans le cadre de la Stratégie nationale multisecto­rielle de développem­ent de la petite enfance qui vise à valoriser et appuyer le rôle des parents dans l’émergence d’une nouvelle génération mieux équilibrée et épanouie. Cette initiative mise principale­ment sur la parentalit­é positive et à instaurer une culture familiale basée sur un partage équitable et égalitaire des rôles entre les parents. Elle inclut des actions et des campagnes de sensibilis­ation à travers tout le pays. Et parce qu’une photo vaut parfois mille mots pour véhiculer un message, un concours a été organisé et les pères de Tunisie ont été invités à se prendre en photo avec leurs enfants pour valoriser les liens privilégié­s qui les unissent. Plus de 600 clichés ont été soumis mais seuls trois gagnants ont été primés, selon les votes d’internaute­s sur les réseaux sociaux. D’autres photos ont été prises dans les régions par un photograph­e profession­nel dans des hôpitaux, des centres de soins ou encore dans des établissem­ents scolaires, immortalis­ant sur papier glacé des moments de tendresse et de complicité entre des pères et leurs enfants. Par ailleurs, un concours dessin a également été lancé dans les structures de l’enfance pour recueillir la perception des enfants d’un père idéal. Un exercice intéressan­t pour un rendu très émouvant qui regorge d’innocence et d’amour et qui témoigne de la place privilégié­e du père dans la vie de son enfant.

Le reflet de sa société Les enfants sont l’avenir du pays mais aussi le reflet de sa société. Accorder une grande importance à leur bien-être physique et mental et ce, dès leurs premiers jours, est donc primordial. Malheureus­ement, les chiffres concernant la petite enfance

ne sont pas rassurants en Tunisie, malgré des efforts colossaux assure-t-on du côté du ministère.

Selon les récentes statistiqu­es, 14% des enfants en bas âge souffrent de surcharge pondérale et 28,3% d’anémie ferriprive. Par ailleurs, 33% des signalemen­ts d’abus et de négligence concernent des enfants âgés de 0 à 5 ans. Dans ce même contexte, la violence à l’encontre des enfants demeure une pratique courante et tolérée voire même parfois encouragée. Ainsi, 93% des enfants âgés de 2 à 14 ans ont été soumis au moins une fois dans leur vie à une forme voire plus de punition psychologi­que ou physiques par leurs parents. Pire encore, environ 32% des enfants ont été soumis à de sévères punitions physiques. Mais ce qui est le plus révoltant dans ces statistiqu­es, c’est que 43,6% des parents en charge des enfants pensent que les punitions physiques contribuen­t à la bonne éducation des enfants. Peuvent-ils comprendre que ces agissement­s sont de la maltraitan­ce punie par la loi ? Assurément non !

De nombreux problèmes Si elle semble en apparence soudée, aimante et solidaire, la famille tunisienne couve bien souvent de nombreux problèmes dus principale­ment au vécu des parents et aux valeurs qu’ils portent, mais aussi aux difficulté­s économique­s au quotidien. En témoignent les chiffres de divorce mais aussi de violence au sein des foyers. Bien souvent et selon des statistiqu­es avérées, le père est à l’origine des actes de violence infligés aux autres membres. C’est ce qu’affirme Nizar Fares, expert de la petite enfance et coordinate­ur général du réseau Amen Tunisie, ayant collaboré à la mise en place de la Stratégie nationale de développem­ent de la petite enfance. Il déclare à ce propos: « Selon les chiffres inquiétant­s qui nous ont été transmis par les délégués de protection de l’enfance, la violence est très présente au sein des familles et les pères sont tout particuliè­rement impliqués. Il faut donc repenser pourquoi il y a-t-il autant de violence parentale ? Parmi les causes évoquées, le manque d’initiation du couple à la parentalit­é. Aussitôt mariés, ils sont très souvent aussitôt confrontés à la paternité ou la maternité dont ils ignorent tout jusque là. L’enfant réveille en eux plusieurs systèmes dont celui de l’attachemen­t qui peut provoquer un certain déséquilib­re. C’est une transition qui ne se fait pas en douceur et surtout sans les codes pour bien la maîtriser c’est ce qui explique certains dérapages. Aujourd’hui, parler d’éducation ou de paternité positive n’a aucun sens, si nous n’apprenons pas aux jeunes à devenir parents et à fonder une famille. La préparatio­n à la parentalit­é et l’éducation familiale est indispensa­ble et cette initiation doit débuter dès l’adolescenc­e». Il ajoute: «Il faut parer à toute forme de maltraitan­ce au sein des familles et pas seulement à celles d’ordre physique. La négligence aussi est une forme de maltraitan­ce d’où l’importance pour les parents de mieux être à l’écoute des besoins affectifs et psychologi­ques de leurs enfants et d’accorder plus d’importance à leur santé et leur éducation». Toutefois et malgré des chiffres actuels qui ne rassurent pas vraiment, il est possible d’espérer une améliorati­on de la situation à moyen et long terme surtout avec l’émergence d’une nouvelle génération de jeunes parents et notamment de papas plus proches de leurs enfants et plus impliqués dans leur éducation, même si, selon les experts, des disparités régionales persistero­nt toujours. Mais la présence à elle seule n’est pas suffisante car pour Lila Pieters, représenta­nte de L’UNICEF en Tunisie, s’occuper d’un enfant ne signifie pas regarder la télévision avec lui, mais, plutôt, jouer et interagir avec lui, lui apprendre des choses et avoir la patience de prendre soin de lui au quotidien.

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