Un bilan en demi-teinte
Cuba-le président Castro s’en va
Le président cubain Raul Castro aurait cédé hier le pouvoir à Miguel Diaz-canel après une décennie marquée par le réchauffement des relations avec le voisin américain et par quelques réformes économiques.
La session de l’assemblée nationale cubaine consacrée à l’élection de son successeur s’est ouverte un jour avant la date initialement prévue. Sa première initiative a été de présenter Miguel Diaz-canel, actuel vice-président âgé de 57 ans, comme seul candidat à la succession de Raul Castro. Les 604 députés ont ensuite voté à bulletins secrets pour confirmer ce choix, un résultat attendu qui va faire de Diaz-canel le premier président cubain né après la révolution de 1959. Ils se sont réunis hier au Palacio del Convenciones pour annoncer le résultat de leur vote et le nouveau chef de l’etat sera immédiatement investi. L’élection du vice-président et celles des membres du Conseil d’etat, l’organe exécutif suprême, seront également officialisées. Tout en cédant progressivement la place à une nouvelle génération, Raul Castro, 86 ans, et d’autres vétérans de la révolution devraient conserver un rôle influent à la tête du Parti communiste, au moins jusqu’au prochain congrès de la formation, en 2021. Raul Castro, qui a succédé à son frère Fidel il y a dix ans, a d’ailleurs choisi une date symbolique de l’histoire politique cubaine pour son départ, puisqu’il coïncide avec anniversaire de l’échec du débarquement anticastriste de la baie des Cochons, soutenus par la CIA. L’élection de Diaz-canel ne devrait pas bouleverser le système politique cubain, au moins dans un premier temps, puisqu’il lui faudra d’abord consolider son pouvoir.
Sur le plan des libertés, il est peu probable qu’il engage à court terme l’île communiste sur le chemin du pluralisme, que ce soit sur le plan politique ou de la presse. Sur le plan économique, le nouveau président ne devrait pas non plus précipiter davantage que Raul Castro les réformes entamées par Fidel dans la foulée de l’effondrement de l’union soviétique, malgré l’impatience croissante des plus jeunes.
Mentalité conservatrice
Certains observateurs justifient le bilan mitigé de Raul Castro par la frilosité et le conservatisme de certains membres du Parti communiste et par les lourdeurs bureaucratiques d’un pays où se creusent les inégalités.
Plus des deux-tiers de Cubains travaillent dans le secteur public pour un salaire mensuel moyen d’une trentaine de dollars, même si la gratuité de l’éducation et de la santé, les aides au logement et à l’achat de denrées alimentaires permettent dans une certaine mesure de compenser le faible niveau des revenus. Quand on les interroge, les Cubains disent presque tous qu’ils peinent à joindre les deux bouts. A titre d’exemple, les voyages et l’utilisation d’internet, pour un dollar de l’heure, sont un luxe que peu peuvent s’offrir. Les fruits de l’ouverture économique restent confinés dans le secteur privé des grandes villes, à la Havane, notamment, qui bénéficie en premier lieu du réchauffement entrevu avec les Etats-unis sous le mandat de Barack Obama.
Virage capitaliste amorcé
Pour certains analystes, Raul Castro a peut-être raté une chance historique en ne se servant pas de son statut de héros de la révolution de 1959 pour amplifier les réformes, une aura dont son successeur, Miguel Diaz-canel, est privé. Présenté autrefois comme un implacable stalinien, Raul Castro a su changer d’approche au début des années 1990 quand l’explosion de L’URSS a privé Cuba de son soutien politique et économique et précipité l’île communiste au bord du chaos. A l’époque ministre de la Défense, c’est à son initiative que l’armée s’est réformée pour adopter des pratiques économiques dignes des économies capitalistes.