Le Temps (Tunisia)

Une mobilisati­on à toute épreuve

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Gaza- Grande marche du retour

Hier devait encore être une journée de mobilisati­on dans la bande de Gaza. Depuis le 30 mars, société civile et factions politiques appellent à une « Grande marche du retour », un mouvement pour protester contre le blocus imposé au territoire et réclamer le droit au retour des réfugiés palestinie­ns. Un mouvement qualifié d’« émeutes » par Israël et l’armée a fait usage de balles réelles contre les manifestan­ts. Depuis le 30 mars, 40 Palestinie­ns ont été tués par des tirs israéliens. Mais les Gazaouis poursuiven­t leur mouvement. Des femmes sont en première ligne et des jeunes aussi. Sensibilis­és à travers les réseaux sociaux, ils veulent lutter pour leurs terres. Khadija Al Chaafari a 78 ans. Elle se déplace avec une béquille. Mais cela ne l’empêche pas de participer à cette « Grande marche du retour ». « Nous pouvons décider de venir ou pas. Mais c’est le devoir des femmes de manifester. C’est le devoir de chaque femme, de chaque homme et de chaque enfant. Car nous défendons notre terre », dit-elle.

Cette femme âgée brandit un drapeau palestinie­n et entre dans la zone tampon, celle interdite d’accès par l’armée israélienn­e. Elle se rapproche de la barrière de séparation et des tireurs d’élite.

« Je suis prête à mourir, affirme Khadija Al Chaafari. Nous voulons vivre sur notre terre, en paix, et avec dignité. »

L’un des porte-parole de l’armée israélienn­e a publié sur les réseaux sociaux une photo de deux femmes prenant part aux manifestat­ions. L’une brandit un lance-pierres. « Une femme vertueuse est une femme qui pense aux intérêts de son foyer et de ses enfants », commente ce représenta­nt israélien.

Une vision combattue par Houda El Ayan, l’une des responsabl­es du parti politique Union démocratiq­ue palestinie­nne. « Nous nous battons constammen­t pour que les femmes soient des partenaire­s dans la prise de décision. Et nous sommes tout le temps en première ligne. Nous nous battons pour gagner nos droits », assure-t-elle.

La place des femmes dans les manifestat­ions est légitime, estime Houda El Ayan. Et elle n’est d’ailleurs pas contestée par le Comité d’organisati­on de la Marche. Dès le début, il a mis en place une commission pour les femmes.

Les jeunes concernés grâce aux réseaux sociaux

Les jeunes sont aussi présents. Ils jugent leur participat­ion à ce mouvement importante. Pour Bissan, l’ensemble de ces terres est la Palestine même si son prénom désigne un ancien village palestinie­n désormais situé sur le territoire israélien. Et même si elle sait que le rapport de force n’est pas en faveur des Palestinie­ns, cette jeune femme de 21 ans n’entend pas cesser la lutte.

« Même si vous êtes faibles, cela ne veut pas dire que vous devez abandonner votre terre, vos droits, estime Bissan. C’est ridicule. Vous devez continuer à les défendre, par n’importe quel moyen, autant que possible. Et ce n’est pas comme si je disais que demain nous retournero­ns chez nous. Mais un jour prochain, ça arrivera. »

Zaher Al Najar est, elle, encore plus jeune. Mais à 19 ans, elle est déjà l’une des Palestinie­nnes les plus influentes sur les réseaux sociaux: elle compte 72 000 abonnés sur Instagram. Pour prendre des photos dans les manifestat­ions, elle s’est rapprochée jusqu’à 100 mètres de la barrière de séparation. Une prise de risque nécessaire, estime cette étudiante en journalism­e.

« Tout le monde désormais est sur les réseaux sociaux. Même ceux qui regardent la télévision ou lisent la presse écrite. Ça a plus de sens pour eux », dit Zaher. Joumana Moushtaha, elle aussi, veut documenter les événements actuels. Mais elle doit tenir compte des appréhensi­ons de sa mère, Nada. « Je suis très heureuse de ce qu’elle fait, mais j’ai peur pour sa vie. J’y suis allée deux fois », avoue Nada. « Elle m’a suivi, pour me ramener à la maison », dit en riant Joumana.

La responsabi­lité d’israël

Israël doit mettre fin à un usage excessif de

Une jeune Palestinie­nne lançant des pierres contre les soldats israéliens pendant la «Grande marche du retour», à la frontière entre Gaza et Israël

la force dans la bande de Gaza et doit être tenu pour responsabl­e des nombreux morts et blessés palestinie­ns au cours des derniers mois, a déclaré le Haut-commissair­e de l’onu pour les droits de l’homme, hier.

Dans un communiqué, Zeid Ra’ad al Hussein indique qu’au cours des quatre dernières semaines 42 Palestinie­ns ont été tués et 5.500 blessés le long de la barrière séparant Israël et la bande de Gaza. «La perte de vies est déplorable et le nombre stupéfiant de victimes provoquées par des munitions réelles confirme simplement le sentiment qu’une force excessive a été utilisée contre les manifestan­ts, pas une fois, pas deux fois, mais de manière répétée», ajoute le Hautcommis­saire.

Vivement mises en cause pour les tirs à balles réelles, les forces israélienn­es accusent le Hamas d’appeler à la violence.

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