Le Temps (Tunisia)

L’après-révolution tunisienne

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La salle de cinéma Gruttli de Genève a vu un monde impression­nant venir découvrir, mercredi soir, cette fiction tunisienne de 91 minutes, au préalable bien construite, aussi bien sur les plans scénograph­iques que technique.

En lice pour la compétitio­n pour le Prix de la critique, au Fifog, le deuxième long métrage d’elyes Baccar, Tunis by night, est une oeuvre cinématogr­aphique pleine d’audace qui revient sur l’après-révolution de la Tunisie. Au fil d’une narration aérée, le cinéphile découvre l’histoire d’un journalist­e de la Radio nationale tunisienne, Youssef (Raouf Ben Amor).

Ce dernier, qui animait une célèbre émission nocturne intitulée «Tunis by night», durant une trentaine d’années, se voit interdit d’antenne à la veille de sa retraite. Le motif : il refuse de passer les chansons nationales, préferant faire un discours en filigrane sur l’incident qui a eu lieu le 17 décembre à Sidi Bouzid.

Cet élégant sexagénair­e, à l’allure altière, s’est toujours détaché de sa famille en se refugiant dans son travail et dans un bar donné. Il ignore ses devoirs conjugaux et parentaux.

Si sa femme, Amel (Amel Hedhili), se refugie dans la prière, son fils aîné, Amin (Helmi Dridi), un artisan introverti, tente de redessiner le squelette familial.

Quant à sa fille cadette, Aziza, musicienne à ses temps perdus, elle sombre, pour sa part, dans la délinquanc­e. Cette rebelle au caractère bien trempé, fréquente les milieux hardo/punk. Elle se coupe les cheveux à la garçon, avec des percings de partout. Elle se permet des excès en boissons et en drogue. Le soir même de la retraite de son père Youssef, elle se taille les veines et crache toute la vérité à ce père étranger. Grâce à des plans cinématogr­aphiques parlants, le réalisateu­r, Elyes Baccar, a réussi avec brio à immortalis­er ce mouvement social tunisien contempora­in.

En effet, le réalisateu­r a pointé du doigt plusieurs thèmes assez complexes et délicats à la fois de la société tunisienne, à l’image, entre autres, de la place de l’intellectu­el dans la société, la pression sociale, la répression intellectu­elle, la censure, la jeunesse, le mal-vivre et la marginalis­ation. Le réalisateu­r, Elyes Baccar, a toujours défendu son film en affirmant mettre l’accent sur le noyau familial et soulever le conflit au sein de cette même famille.

A la suite de la projection de ce film, le producteur tunisien, Mohamed Ali Ben Hamra, a rappelé que le tournage de Tunis by night s’est déroulé dans des circonstan­ces exceptionn­elles. Preuve en est, en 2015, durant la période qu’a connue l’attentat contre le bus de la sécurité présidenti­elle et face aux difficulté­s d’accéder le soir à des endroits en plein centre de Tunis, il y a eu le recours à la technique de la nuit américaine pour contourner le couvre-feu.

«Sur les quatre semaines du tournage, dit-il, ce n’est qu’à la dernière, avec la levée du couvrefeu, que l’équipe a pu filmer la moitié du film la nuit, comme les scènes de la cathédrale sur l’avenue Habib Bourguiba». L’orateur ajoute que le film Tunis by night a capitalisé 38 000 entrées en six semaines pour la saison 2017. De même que le film verra une sortie en Egypte et au Liban.

Tunis by night, deuxième long métrage du réalisateu­r Elyes Baccar, a remporté plusieurs prix. Le comédien Raouf Ben Amor a remporté, l’année dernière, le Prix du meilleur interprète masculin au Festival du Caire.

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