Le Temps (Tunisia)

Rohani, principale victime de la volte-face US?

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Nucléaire iranien

Il avait fait d'un rapprochem­ent avec l'occident, pour sortir son pays de la crise économique, l'alpha et l'oméga de sa politique à la tête de la République islamique. Le président Rohani apparaît aujourd'hui affaibli par la décision de Donald Trump de déchirer l'accord de Vienne sur le nucléaire iranien, et par le retour des sanctions. Le jour de l'annonce américaine il a tenté de réagir. Le pourra-t-il vraiment ? Les conservate­urs vont-ils avoir de nouveau le vent en poupe ?

La première réaction iranienne est venue mardi soir du président de la République luimême. Hassan Rohani a dénoncé la décision de Donald Trump de réimposer des sanctions contre son pays, et a assuré qu'il donnait une chance aux futures négociatio­ns, qui vont durer quelques semaines encore avec les trois pays européens signataire­s de l'accord signé en 2015.

Le président Rohani n’a donc pas abandonné l'accord de Vienne. Il a demandé à son ministre des Affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif, d’engager les négociatio­ns avec Paris, Londres et Berlin, mais aussi avec Moscou et Pékin. Il veut vérifier si, ensemble, ces pays peuvent contrer le départ des Etats-unis.

L’iran avait accepté de limiter son enrichisse­ment d’uranium à 3,6% dans le cadre de l’accord de Vienne, un point crucial pour empêcher toute velléité militaire dans un programme nucléaire. Mais la République islamique pourrait l'augmenter à 20% en quelques jours, selon Ali Akbar Salehi, le chef de l’organisati­on de l’énergie atomique d'iran (OEAI).

Trump le promet : Les Etats-unis sont « aux côtés » de l'iran

La situation du président Rohani n'est pas confortabl­e. Ce qu'a promis Donald Trump une grave erreur selon Barack Obama-, ce sont « des sanctions économique­s les plus élevées possible ». De quoi affecter encore l'économie iranienne, dont la monnaie a déjà perdu plus de 40% de sa valeur au cours des six derniers mois, provoquant une forte inflation. M. Trump l'assure : s'il complique des vies avec ses sanctions, le peuple américain est « aux côtés » du peuple iranien. A condition qu'il lâche son régime ? Une posture potentiell­ement « contre-productive », estime Vincent Eiffling. « L'histoire de l’iran depuis le début du XIXE siècle est profondéme­nt marquée par les ingérences étrangères », rappelle-t-il.

Le président Rohani pourra-t-il se remettre d'un tel camouflet ?

« Donc au final, Donald Trump pourrait bien renforcer les éléments les plus conservate­urs du régime iranien », conclut-il. Une situation d'autant plus inconforta­ble pour le président Rohani, un modéré qui s'était énormément investi dans cet accord, qui se retrouve soudain fragilisé.

A ses yeux, les grands gagnants, ce sont les ultra-conservate­urs : « Je vois plein d’enthousias­me de la part des ultras sur les réseaux sociaux, parce que le retrait de Trump montre, selon eux, que Rohani et ses alliés réformateu­rs étaient naïfs de croire l’occident et les Etats-unis. C’est un grand échec pour Rohani, qui considérai­t l’accord comme son plus grand avantage. »

Et de rappeler que le président « croyait que d’autres accords dans d’autres domaines seraient également possibles, notamment sur les droits de l'homme et sur la question des missiles iraniens ». « Les durs, qui avaient perdu plusieurs élections, étaient devenus très impuissant­s. Ils comptent sur l’échec de Rohani et le désespoir du peuple pour les prochaines élections. »

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Le président iranien Hassan Rohani

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