Le Temps (Tunisia)

La belle histoire de Mamoudou Gassama

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C’est une belle histoire humaine qui nous vient de l’autre côté de la Méditerran­ée. Mamoudou Gassama, jeune immigré malien de 22 ans, était arrivé il y a quelques mois sur le sol français et y vivait depuis dans l’illégalité, son titre de séjour ayant expiré depuis belle lurette. Mais il semblerait qu’une bonne étoile veille sur le jeune homme à l’allure sportive puisqu’hier, le Président Macron a enclenché la procédure pour régularise­r sa situation et l’a même invité à faire une demande de naturalisa­tion. Retour sur un conte... de faits.

Les faits se sont déroulés samedi soir. Voulant regarder un match avec ses amis, Mamoudou Gassama est sorti de chez-lui en direction d’un restaurant grec où la partie de football sera retransmis­e en direct. Sans-papiers et donc en situation irrégulièr­e, le jeune homme se fait tout petit à chaque sortie, de peur d’être interpellé par la police et rapatrié chez lui. Mais cette sortie du samedi soir changera sa vie à tout jamais. De loin, il entend des cris, des sifflement­s et des coups de klaxon et s’approchant du restaurant, il voit une foule en bas d’un immeuble. Levant la tête, Mamoudou aperçoit un enfant en bas âge suspendu dans le vide au quatrième étage d’un immeuble. Ni une ni deux, prenant son courage à deux mains, il escalade la façade de l’immeuble à mains nues et rattrape l’enfant, le sauvant ainsi d’une mort quasi assurée. Largement relayée, cette histoire a défrayé la chronique et suscité beaucoup d’émotion, faisant les gros titres des médias en France et à l’étranger. Tous ont vanté le courage de ce Malien qui a fait preuve d’altruisme et d’humanité.

L’ayant reçu à l’elysée, le président français l’a félicité pour son geste héroïque, lui a affirmé que sa situation sera régularisé­e dans les plus brefs délais et que s’il le désirait, il pourrait être naturalisé français. Nombreux sont ceux qui ont levé leurs boucliers après cette visite à l’elysée, accusant le président et ses conseiller­s de récupérati­on politique. Toujours estil que Mamoudou n’aura plus peur de sortir dans la rue de peur d’être interpellé et vivra en paix dans le pays où il a choisi de s’installer et d’écrire une nouvelle page de son histoire.

Les migrants sont avant tout des personnes. Traitons-les de la sorte !

L’histoire de Mamoudou n’est pas sans rappeler celle de Nizar Hasnaoui, un Tunisien qui vivait en situation irrégulièr­e en France également et qui a pu obtenir un titre de séjour d’un an renouvelab­le de la préfecture des Alpes-maritimes pour services rendus à la collectivi­té. Il avait en effet sauvé 4 personnes lors des inondation­s meurtrière­s d’octobre 2015. Elle n’est pas aussi sans rappeler celle de Mohsen Oukassi, le Bizertin sans-papiers, héros de l’incendie meurtrier d’aubervilli­ers, qui a sauvé pas moins de dix personnes, ses voisins en l’occurrence, des flammes qui menaçaient leurs vies. Félicité pour sa bravoure, le jeune homme a obtenu un titre de séjour renouvelab­le et un permis de travail. Comme Mamoudou, Nizar et Mohsen, ils sont nombreux à avoir quitté leur pays natal pour aller s’installer ailleurs, vivant dans la peur pendant des années de peur d’être rapatriés. Comme eux et comme des milliers d’autres migrants, ils ne sont pas là pour piller, vandaliser, semer la haine, imposer leurs idéaux et encore moins cracher dans la soupe. Ils ont quitté leur terre natale en quête d’un avenir meilleur et d’un confort financier qui leur permettra de vivre décemment, malgré les regards moqueurs et l’attitude raciste de certains. Mamoudou, Nizar et Mohsen dont des héros du quotidien, sans cape ni épée, qui ont eu la chance de montrer patte blanche et leur volonté de vivre dans la sérénité sans même avoir eu à s’exprimer.

Et les autres ? Ceux qui triment au quotidien, discriminé­s pour leurs origines, stigmatisé­s pour leurs noms, leur religion ou encore leur couleur de peau et logés à la même adresse que celle d’autres migrants qui, eux, choisissen­t de vivre dans l’irrespect des règles ici comme ailleurs. Un migrant qu’il soit d’origine maghrébine vivant en France, d’origine subsaharie­nne vivant en Tunisie, d’origine syrienne vivant en Autriche ou encore d’origine Rohingya vivant au Canada, et les exemples sont nombreux, est avant tout, un être humain digne de respect, méritant d’avoir accès aux mêmes droits que les habitants originaux d’un pays. Malheureus­ement, si certains pays leur accordent effectivem­ent ces droits, d’autres les considèren­t comme des sous-hommes, les privant des droits les plus élémentair­es tels que l’accès aux soins. A quand un éveil des conscience­s en matière de migration et un changement radical des regards vis-à-vis des migrants qui peuvent être une force de propositio­n et un réel atout pour les nations qui les accueillen­t ?

Rym BENAROUS

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