Le Temps (Tunisia)

Il faut beaucoup plus pour convaincre les citoyens

-

Les signataire­s du Document de Carthage ne cessent d’étonner la galerie avec leurs errements, leurs divergence­s et leurs tentatives pour convaincre du bienfondé de leur prise de décision, sans être sérieux dans leur démarche pour… soit disant sortir le pays de la crise. En face, il y a tout un peuple qui désespère et qui ne voit pas le bout du tunnel, avec une dégradatio­n au quotidien du pouvoir d’achat et un appauvriss­ement de la classe moyenne, surtout que l’etat n’est plus capable de tenir ses engagement­s, même au niveau de la gestion des affaires publiques.

Le paysage que présentent les signataire­s du Document de Carthage est des plus désolants, avec un Comité d’experts à qui il a fallu plus de deux mois pour nous sortir un Document de Carthage 2, avec pas moins de 100 points à régler, au niveau politique, économique et social, pour les amputer par la suite de 35 points relégués aux oubliettes, les réduisant à 65, à cause des divergence­s notamment sur le point 64 qui a fait déborder le vase.

Ce point, défendu par Nidaa Tounès, concerne le changement de gouverneme­nt qui comprend pas moins de 10 ministres nidaïstes que le mouvement a choisi et qu’il vient de lâcher purement et simplement, perdant, ainsi le peu de crédibilit­é dont il dispose auprès des pauvres citoyens qui ont vu en ce parti le levier qui va faire avancer le pays. La position de Nidaa Tounès sur la question du remaniemen­t ministérie­l est dictée par la crise économique et sociale qui secoue le pays ainsi que par une crise de confiance inédite envers les politiques, a affirmé, dimanche, le directeur exécutif du mouvement Nidaa Tounès,hafedh Caïd Essebsi. Dans un post publié sur sa page «Facebook», avec une audience très limitée, il a souligné que la stabilité du pays n’est pas tributaire de la compositio­n actuelle du gouverneme­nt ni celle des gouverneme­nts précédents, mais plutôt, du consensus politique qui règne entre les partis et les organisati­ons nationales. «Les signataire­s du Document de Carthage sont attachés à la mise en oeuvre du programme politique, économique et social convenu», a-t-il dit.

Par ailleurs et comme d’habitude, l’allié contre-nature qu’est le mouvement Ennahdha continue à être flou dans ses décisions et son conseil de la Choura, réuni le week end, a choisi de s’aligner sur la position de Rached Ghannouchi qui plaide pour le consensus et la stabilité, selon le président du conseil de la Choura Abdelkarim­harouni. «Le conseil s’aligne visiblemen­t sur la position du président du mouvement Ennahdha qui appelle à poursuivre les concertati­ons au service de l’intérêt général du pays et de l’engagement des réformes convenues entre les signataire­s du Document de Carthage 2», a-t-il ajouté lors d’un point de presse à Tunis. Indiquant que le maintien de Youssef Chahed à la tête du gouverneme­nt n’était pas à l’ordre du jour de la réunion de la 20e session conseil.

En véritables stratèges les dirigeants du mouvement islamiste Ennahdha ont su tirer leur épingle du jeu et imposer leur point de vue, surtout concernant le fait que «les membres du prochain gouverneme­nt ne devraient pas se porter candidats aux élections».

Evoquant le déroulemen­t des événements parrainés par le Palais de Carthage, le secrétaire général du mouvement Echaab, Zouheir Maghzaoui, a estimé dimanche que le Document de Carthage 2 «ne vaut pas plus que l’encre avec lequel il a été écrit et ne signifie rien pour les citoyens». Zouheir Maghzaoui qui présidait un meeting du parti à Sidi Bouzid a relevé que «les conclusion­s auxquelles a abouti le Document de Carthage ne sont pas une fin en soi». Car, explique-t-il, il n›est pas logique que les partis qui vont quitter le pouvoir se chargent de l›élaboratio­n des priorités du gouverneme­nt pour les cinq prochaines années.

D’après lui, «la situation actuelle reflète un conflit au sein de la famille (au pouvoir) sur le prochain président de la République». «D’où, a-t-il soutenu, la position affichée concernant le maintien ou le départ du président du gouverneme­nt». Maghzaoui évoque également une tentative de s’organiser au sein de la coalition au pouvoir entre Ennahdha et Nidaa Tounès.

«Ce qui se passe à Carthage, a-t-il insisté, en allusion à la réunion de la commission des experts au sujet du Document de Carthage 2, n’intéresse en rien les Tunisiens dès lors que les questions évoquées n’abordent pas les véritables sujets qui les préoccupen­t. Il a cité, à cet égard, la reprise de la valeur du dinar, l’améliorati­on des conditions de vie dans les régions intérieure­s, la lutte contre l’inflation et la réduction de la dette.

Bien que la situation est résumée par le dirigeant d’un parti connu par son négativism­e, il n’en demeure pas moins que c’est l’idée qui prévaut chez tout le monde et que les deux principaux alliés de la coalition gouverneme­ntale sont obligés de faire mieux que de changer un gouverneme­nt qu’il ont laissé naviguer à vue, pour convaincre un peuple frappé par la lassitude et le désespoir.

Faouzi SNOUSSI

Newspapers in French

Newspapers from Tunisia