Le Temps (Tunisia)

Les Tunisiens, de nouveau, divisés

- Salma BOURAOUI

Limogeage de Lotfi Brahem

Après une rencontre, mercredi, avec le président de la République, le président du gouverneme­nt, Youssef Chahed, a limogé le ministre de l’intérieur, Lotfi Brahem et a désigné le ministre de la Justice, Ghazi Jribi, ministre de l’intérieur par intérim.

Après une rencontre, mercredi, avec le président de la République, le président du gouverneme­nt, Youssef Chahed, a limogé le ministre de l’intérieur, Lotfi Brahem et a désigné le ministre de la Justice, Ghazi Jribi, ministre de l’intérieur par intérim. Annoncé en début de l’après-midi du mercredi 6 juin, cette informatio­n a fait le tour des tous les médias nationaux et internatio­naux et les premières constation­s étaient, au début, unanimes : Brahem a été limogé suite au naufrage du navire transporta­nt des migrants clandestin­s aux larges de l’île de Kerkennah.

Cette première analyse n’a pas tenu très longtemps après que certains politicien­s aient donné leurs versions des faits. Des versions qui ont rapidement été récupérées sur les réseaux sociaux pour que commence l’une des plus grandes batailles électroniq­ues : Youssef Chahed a démis Lotfi Brahem de ses fonctions pour satisfaire le mouvement islamiste d’ennahdha qui est son dernier soutien. Youssef Chahed a démis Lotfi Brahem de ses fonctions parce qu’il a peur que ce dernier ne profite de son poste pour faire un coup d’etat ou, pire encore, pour se faire porter candidat à la Kasbah. Youssef Chahed a démis Lotfi Brahem de ses fonctions parce que ce dernier n’a pas appliqué des consignes sécuritair­es qui auraient pu nous faire éviter le drame du naufrage à Kerkennah. Youssef Chahed a démis Lotfi Brahem de ses fonctions après avoir accepté de démissionn­er quelques jours plus tard, histoire d’ego.

Bref, les analyses n’ont pas manqué dans la soirée du mercredi à jeudi où même certaines personnes ont appelé à un rassemblem­ent devant le ministère de l’intérieur pour dénoncer le limogeage de Brahem et réclamer le départ de Chahed. Un rassemblem­ent qui a d’ailleurs eu lieu mais qui a été tenu par une poignée de personnes…

Cependant, la réaction la plus épique on l’a retrouvée, au cours de la même soirée, sur la chaîne privée Nessma TV où un procès a été intenté, en direct, contre Youssef Chahed et son équipe. Parmi les invités du plateau, il y avait le dirigeant et député du Front populaire Mongi Rahoui à qui on a accordé un bon nombre de minutes où il s’est adressé, yeux dans la caméra, à Youssef Chahed et aux syndicats sécuritair­es : Mongi Rahoui n’a en effet eu aucune gêne à appelé les syndicats sécuritair­es à s’opposer au limogeage accusant le président du gouverneme­nt d’avoir lâchement vendu le pays et sa sécurité aux islamistes… Au-delà de la théorie du complot et des calculs politiques, Lotfi Brahem a surtout commis deux grandes erreurs qui lui sont toujours reprochées. La première s’est produite lorsque des syndicalis­tes sécuritair­es se sont directemen­t pris à des journalist­es en les menaçant publiqueme­nt sur les réseaux sociaux et la seconde lorsque le concerné lui-même est sorti déclaré que la minorité qui ne fait pas le jeûne doit respecter la majorité qui le fait et que, de ce fait, tout le ministère de l’intérieur est disposé à pourchasse­r la minorité et à obliger tous les cafés et restaurant­s à fermer leurs portes durant le mois de Ramadan. Deux positions, entre autres, qui ont, apparemmen­t, contribué à la chute de Lotfi Brahem.

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Ghazi Jribi, ministre de l’intérieur par intérim

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