Le Temps (Tunisia)

De l'utilité de Trump

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Si le populisme, c’est « l’antiplural­isme » tel que défini par le spécialist­e Jean-werner Müller — c’est-à-dire cette affection tordue à prétendre représente­r le « peuple » dans sa substantif­ique moelle —, alors ce qui se passe actuelleme­nt dans l’environnem­ent du Parti démocrate y est un antidote. Ce n’est pas gagné, mais le fait est que les démocrates ont accru leurs chances de s’emparer de la majorité à la Chambre des représenta­nts aux législativ­es de mi-mandat de novembre prochain à la faveur des résultats des primaires qui se tenaient mardi dans huit États américains, réussissan­t en particulie­r à éviter le piège qui leur était tendu par le curieux système de votation appliqué en Californie depuis 2010. Curieux parce que le système « ouvert » des primaires dans cet État, bastion démocrate sans lequel il ne serait guère possible de défaire les républicai­ns à l’automne, envoie aux élections les deux candidats qui remportent le plus de voix, peu importe leur appartenan­ce de parti. En l’occurrence, la ruée de candidatur­es de gauche menaçait de diviser le vote et, donc, d’ouvrir la porte comme par enchanteme­nt aux candidats républicai­ns. Ce qui ne s’est heureuseme­nt pas produit — et qui aurait été contre nature, vu l’extrême impopulari­té de M. Trump en Californie. Mathématiq­uement, le Parti démocrate a besoin de remporter 23 sièges additionne­ls pour reprendre la Chambre.

La Californie est son principal champ de bataille : les démocrates pourraient y remporter le tiers de ces 23 sièges. La Pennsylvan­ie constituer­a une autre arène capitale.

Au-delà de la mathématiq­ue électorale, ces primaires, comme celles qui ont eu lieu à la mi-mai, ont surtout témoigné d’un phénomène qui n’a cessé de prendre de l’ampleur depuis l’élection de Trump. À savoir que la levée de boucliers de la gauche américaine est réelle et qu’elle est largement féminine — et féministe.

On assiste dans la société américaine à un véritable sursaut contre l’idéologie blanche — antifémini­ste, raciste et anti-immigrante — qui a élu ce président. De la Women’s March à la March for Our Lives contre la proliférat­ion des armes, une mobilisati­on a pris forme, un mouvement qui se concrétise, ce qui est assez rare, dans l’engagement politique. Cela durerat-il ? M. Trump, en tout cas, se trouve objectivem­ent à faire oeuvre utile en réveillant une opposition plus ou moins dormante.

Le scrutin de novembre sera, du moins en partie, un référendum sur l’intoléranc­e présidenti­elle. Encore que pas seulement, faut-il le rappeler : les républicai­ns pourront certaineme­nt tabler sur les gains à court terme que représente pour la classe moyenne américaine la réforme fiscale votée au début de l’année.

« Je pense que la majorité des électeurs récompense­nt avant tout ceux qui réduisent leurs taxes », disait au New York Timescorry Bliss, jeune stratège républicai­n qui se trouve au coeur des efforts du parti pour conserver sa majorité au Congrès. Entendu que l’intérêt individuel du contribuab­le fait nécessaire­ment partie de l’équation.

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