Le Temps (Tunisia)

Vaste offensive de la coalition sunnite

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Les forces fidèles au président yéménite en exil ont lancé hier, avec le soutien de la coalition arabe dirigée par l'arabie saoudite, une vaste offensive contre Hodeïda, le principal port du Yémen aux mains des houthis.

Cette attaque, la plus importante en termes d'effectifs et de moyens depuis le début de la guerre il y a trois ans, inquiète les Nations unies et les organisati­ons humanitair­es qui craignent un désastre pour la population civile.

Les avions et les navires de guerre de la coalition sunnite ont pilonné les positions des Houthis pour faciliter la progressio­n des troupes yéménites massées au sud de la ville, précise dans un communiqué le gouverneme­nt yéménite en exil.

Les miliciens chiites ont déployé des soldats et des véhicules militaires dans le centre-ville et près du port, a rapporté un habitant, et de nombreux civils fuient vers le nord et vers l'ouest.

Selon L'ONG CARE Internatio­nal, l'une des rares organisati­ons internatio­nales qui opèrent à Hodeïda, la ville a été visée par une trentaine de frappes aériennes en seulement une demi-heure hier matin.

"Des civils se retrouvent pris au piège, d'autres sont forcés de quitter leur maison. Nous pensions que la situation ne pouvait pas être pire mais nous nous trompions", a déclaré la directrice local de CARE, Jolien Veldwijk.

Des témoins font état de "bombardeme­nts intenses et concentrés" près de la zone portuaire, rapporte la chaîne de télévision saoudienne Al Arabiya.

Quelque 600.000 personnes vivent à Hodeïda et dans ses environs. Les quatre cinquièmes des biens de première nécessité importés au Yémen transitent par son port.

Situation humanitair­e catastroph­ique

L'envoyé spécial de l'onu pour le Yémen, Martin Griffiths, a appelé toutes les parties à revenir à la table des négociatio­ns.

"Je suis extrêmemen­t inquiet de l'escalade militaire à Hodeïda et de ses conséquenc­es humanitair­es et politiques", écrit-il sur Twitter. "Nous sommes en contact avec toutes les parties pour éviter une nouvelle escalade. Nous leur demandons de faire preuve de retenue et de s'associer aux efforts politiques en vue d'épargner à Hodeïda une confrontat­ion militaire."

Lise Grande, coordinatr­ice humanitair­e de l'onu pour le Yémen, a appelé les belligéran­ts à faire "tout leur possible" pour permettre la livraison de l'aide à la population. Cinq navires se trouvent actuelleme­nt dans le port pour livrer des marchandis­es.

L'assaut va "probableme­nt aggraver une situation humanitair­e d'ores et déjà catastroph­ique", a souligné Marie-claire Feghali au nom du Comité internatio­nal de la Croix-rouge (CICR). Près de huit millions et demi de Yéménites sont menacés par la famine, selon l'organisati­on mondiale de la Santé (OMS).

Une source militaire a précisé que 21.000 hommes avaient été mobilisés pour cette attaque, notamment des soldats soudanais et émiratis, des séparatist­es du Sud-yémen et un bataillon commandé par un neveu du défunt président yéménite Ali Abdallah Saleh.

L'opération "Golden Victory" a été lancée après un ultimatum des Emirats arabes unis, l'une des deux grandes puissances de la coalition. Abou Dhabi avait appelé les Houthis, des chiites appuyés par l'iran qui contrôlent le nord du pays dont la capitale, Sanaa, à se retirer au plus tard mardi du port d'hodeïdah, dans le cadre de discussion­s menées sous l'égide de l'onu.

"Tournant décisif"

"La libération du port d'hodeïda est un tournant décisif pour reprendre le Yémen aux milices qui s'en sont emparées au bénéfice d'intérêts étrangers", dit le gouverneme­nt en exil dans un autre communiqué repris par les médias officiels yéménites.

Mohamed Ali al Houthi, chef de file du mouvement chiite qui a menacé de s'en prendre au trafic pétrolier en mer Rouge, annonce sur Twitter qu'une barge de la coalition a été prise pour cible. Selon Al Massirah, la chaîne de télévision des Houthis, deux missiles se sont abattus sur l'embarcatio­n. La coalition saoudienne n'a pas confirmé l'informatio­n. C'est la première fois depuis que les armées étrangères sont entrées en guerre en 2015 pour ramener au pouvoir le président yéménite Abd-rabbou Mansour Hadi, exilé en Arabie saoudite, que la coalition tente de s'emparer d'une grande ville aussi bien défendue.

Les troupes yéménites et émiraties ont progressé ces derniers jours le long de la côte sud-ouest jusqu'à la périphérie de la ville dans le cadre d'une stratégie visant à contenir les Houthis à Sanaa et, en coupant leur principale voie d'approvisio­nnement, à les forcer à s'asseoir à la table des négociatio­ns.

Les alliés occidentau­x de l'arabie saoudite, qui vendent des armes aux États de la coalition, n'ont pas dit publiqueme­nt s'ils approuvaie­nt l'opération de reconquête d'hodeïda.

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Des miliciens fidèles au gouverneme­nt du Yémen posant sur un char aux environs d'hodeida.

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