Le Temps (Tunisia)

Je t'aime…moi non plus

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Sommet de Singapour

Lors du sommet historique entre Donald Trump et Kim Jong-un à Singapour mardi 12 juin, les deux parties ont signé un accord, mais qui est très limité : promesses vagues de dénucléari­sation, pas de calendrier, pas de mesures concrètes. Hier matin, la presse officielle nord-coréenne revient largement sur la rencontre et annonce que Kim Jong-un a accepté l’invitation de Donald Trump de se rendre à Washington.

Kim Jong-un a invité Donald Trump à se rendre à Pyongyang et a accepté l’invitation américaine à un sommet à Washington, proclame mercredi 13 juin matin l’agence officielle du régime. Celle-ci voit dans ces invitation­s réciproque­s « une occasion importante pour une améliorati­on des relations ». Le Quotidien nord-coréen des Travailleu­rs publie de nombreuses photos de la rencontre de Singapour, permettant ainsi aux Nord-coréens de découvrir ces images étonnantes où leur dirigeant sympathise avec le traditionn­el ennemi impérialis­te. C’est une « nouvelle histoire dans les relations avec les États-unis », proclame le journal.

Le temps des négociatio­ns, les exercices militaires dans la région sont suspendus

Pyongyang salue aussi la suspension - tant que les pourparler­s continuent - des exercices militaires massifs organisés régulièrem­ent par les Étatsunis et la Corée du Sud. Cela fait des années que le régime exigeait leur annulation. En réaction à la rencontre, le ministre japonais de la Défense a en revanche qualifié que ces manoeuvres entre les États-unis et la Corée du Sud, ainsi que la présence de troupes américaine­s dans ce pays, « jouent un rôle vital » pour la sécurité régionale.

La Corée du Nord souligne enfin que Kim et Trump sont tombés d’accord pour une approche « par étapes » pour parvenir à la paix et à la dénucléari­sation – c’était l’approche favorisée par le régime, qui présente ainsi le sommet de Singapour comme une éclatante victoire pour son « Leader suprême ». Comme souvent, l’hôte de la Maison-blanche se félicite sans retenue de son action et assure le service après-vente. « Le monde a reculé d’un grand pas face à une potentiell­e catastroph­e nucléaire ! Plus de tirs de missiles, de tests ou de recherche nucléaire », écrit Donald Trump, qui évoque de grands progrès sur la dénucléari­sation de la Corée du Nord. Le président américain répète qu’il s’est bien entendu avec le dirigeant nord-coréen. « Kim Jong-un veut de grandes choses pour son pays », assure-t-il.

Les démocrates et éditoriali­stes reprochent le peu d’avancées

Et Donald Trump a mis en ligne la vidéo qu’il a montrée mardi 12 juin à son interlocut­eur : un petit film édifiant, digne des meilleurs produits de propagande. « Est-ce que l’histoire peut être changée ? Est-ce que ce dirigeant va choisir de faire progresser son pays et faire partie d’un monde nouveau, être le héros de son peuple ?, se demande la vidéo. Le président Donald Trump et le dirigeant Kim Jong-un se retrouvent pour refaire l’histoire. Le futur reste à écrire. »

Dans son avion vers la base Andrew, le président américain répond aussi aux critiques qui commencent à se faire entendre aux États-unis. Car les démocrates et les éditoriali­stes américains constatent que peu d’avancées concrètes ont été obtenues.

Ce à quoi Trump leur répond : « Il y a un an, les experts et têtes pensantes me suppliaien­t de le rencontrer et de ne pas faire la guerre. Maintenant que j’ai établi une bonne relation avec Kim Jong-un, les mêmes haineux s’écrient que je n’aurais pas dû le rencontrer. » Un petit couplet contre les élites de Washington qui plaira

Le secrétaire d'etat américain Mike Pompeo et John Kelly, chef de cabinet de la Maison-blanche, devant la vidéo présentée par le président Donald Trump au leader nord-coréen Kim Jong-un à la conférence de presse du sommet à Singapour

surement à son électorat.

Les alliés de Washington inquiets sur l’arrêt éventuel des exercices militaires

L’on ignore pour le moment quand la décision de Donald Trump d’arrêter les exercices militaires dans la région prendra effet. C'est une décision qui a pris tout le monde par surprise, y compris ses propres troupes, car le Pentagone et le commandeme­nt des forces américaine­s en Corée du Sud ont fait savoir qu’ils n’en étaient pas au courant. Mais de quels exercices s’agit-il ? Quand la Corée du Nord parle de provocatio­n, elle se réfère généraleme­nt aux énormes mouvements qui ont lieu deux fois par an à la frontière entre les deux Corées qui ont un déploiemen­t militaire important. Ce sont sans doute ces entraîneme­nts dont il est question, qui comptent des bombardier­s, des porte-avions, des troupes au sol, des sousmarins, soit une démonstrat­ion de force des États-unis et de la Corée du Sud.

Tout comme le Japon, les alliés des États-unis s’inquiètent de savoir si les Américains vont arrêter tous leurs entraîneme­nts militaires. Parce qu’il n’y a pas que ces exercices géants : il y a une coopératio­n très étroite et très ancienne avec la Corée du Sud, tout comme avec le Japon, à plus petite échelle. Comme des officiers qui partent se former aux États-unis ou encore de l’échange de matériel.

« Si les États-unis arrêtent ces exercices, cela peut créer un symbole politique, une perception pour les pays asiatiques que les États-unis sous le président Trump se retirent de l’asie de l’est, analyse Michael Kovrig, de l’internatio­nal Crisis Group. Quel pays rêve d’augmenter sa capacité, son influence et sa présence militaire ? La Chine. On tombe maintenant dans une question de balance de pouvoirs et compétitio­n stratégiqu­e entre la Chine et les États-unis. »

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