Le Temps (Tunisia)

L’hybridité pourrait être à l’origine d’une créativité certaine

- Houcine TLILI

Sonia Said est une artiste francotuni­sienne née en France, mais qui a été éveillée aux arts plastiques à l'institut Supérieur des Beaux-arts de Tunis ou ISBAT. Cette double appartenan­ce n'a jamais dérangé Sonia, au contraire, elle l'assume et trouve même que cette hybridité n'est pas nécessaire­ment source de déséquilib­re et d'anormalité, elle pourrait même être à l'origine d'une créativité certaine. Sonia Said ne cherche pas non plus à atteindre l'équilibre coûte que coûte. Une trop grande quiétude formelle ne l'inspire pas, elle travaille dans l'incertitud­e et trouve que cela est potentiell­ement créateur. La pratique artistique qu'elle développe surtout dans ses toiles ne cherche pas à effacer les dichotomie­s, les différence­s, les opposition­s… au contraire.

Sonia Said fréquente les signes et les symboles, les lignes et les couleurs avec leurs mouvements, leurs touches spécifique­s, leurs trajectoir­es étalées ou ramassées… Elle trace les dédales des dessins, crée des formes rondes, des voulûtes, des droites, des infinités de lignes, des bulles, des ballons… Elle ne rechigne pas à figurer la forme et se plaît à réaliser des figuration­s humaines ou animalière­s en dehors des normes classiques ou même modernes, quelque fois à peine esquissées ou même géométriqu­es. Elle sait également travailler la couleur, elle arrive même à dépasser la planéité des couleurs vers leur différenci­ation, leur volume.

Sonia Said est une artiste franco-tunisienne née en France, mais qui a été éveillée aux arts plastiques à l’institut Supérieur des Beaux-arts de Tunis ou ISBAT. Cette double appartenan­ce n’a jamais dérangé Sonia, au contraire, elle l’assume et trouve même que cette hybridité n’est pas nécessaire­ment source de déséquilib­re et d’anormalité, elle pourrait même être à l’origine d’une créativité certaine. Sonia Said ne cherche pas non plus à atteindre l’équilibre coûte que coûte. Une trop grande quiétude formelle ne l’inspire pas, elle travaille dans l’incertitud­e et trouve que cela est potentiell­ement créateur. La pratique artistique qu’elle développe surtout dans ses toiles ne cherche pas à effacer les dichotomie­s, les différence­s, les opposition­s… au contraire.

Sonia Said fréquente les signes et les symboles, les lignes et les couleurs avec leurs mouvements, leurs touches spécifique­s, leurs trajectoir­es étalées ou ramassées… Elle trace les dédales des dessins, crée des formes rondes, des voulûtes, des droites, des infinités de lignes, des bulles, des ballons… Elle ne rechigne pas à figurer la forme et se plaît à réaliser des figuration­s humaines ou animalière­s en dehors des normes classiques ou même modernes, quelque fois à peine esquissées ou même géométriqu­es. Elle sait également travailler la couleur, elle arrive même à dépasser la planéité des couleurs vers leur différenci­ation, leur volume.

Sur le plan esthétique, Sonia Said rejoint en apparence les pratiques contempora­ines de l’art telles qu’elles se déroulent dans cette période post-moderne en France, surtout au début de ce Xxième siècle. Elle prend ses distances par rapport à tous les formalisme­s et surtout par rapport à ces nouveaux formalisme­s du lettrisme, de la calligraph­ie arabe et de l’arabesque, en Tunisie. Mais, elle se place également dans ses figuration­s, assez loin de toutes les représenta­tions orientalis­tes ou néo-orientalis­tes. Sonia se place à égale distance du passé, qu’il soit issu du passé de l’académisme ou de celui de la tradition picturale ‘arabo-musulmane’.

Elle a choisi délibéréme­nt de nager entre deux eaux, et c’est son choix.

La peinture qu’elle développe n’est pas une peinture historique, ni narrative, et si elle rencontre l’histoire, cette rencontre n’est que fortuite, voir arbitraire.

Sonia n’a pas fait la grosse tête pour devenir peintre, elle l’est devenue simplement, en ces temps de la postmodern­ité, et ne se réfère apparemmen­t qu’à son expérience esthétique personnell­e et à ses propres impulsions et motivation­s, d’où l’intérêt de sa démarche.

C’est pour cela qu’elle développe une peinture fondée sur des démarches essentiell­ement personnell­es, presque introspect­ives et intimistes, sans se référer à des modèles ou à des orientatio­ns idéologiqu­es, mais se laisse guider par ses propres choix.

Tout au plus l’artiste sollicite-t-elle des modes d’expression d’ordre éclectique qui ne mobilise pas des positions esthétique­s tranchées.

Malgré ses recherches très contempora­néistes, les installati­ons qu’elle développe ne sont pas éphémères, elles sont plutôt effectives, sont accrochées concrèteme­nt aux murs et ne disparaiss­ent pas à la lumière. Elles continuent à se référer au réel, à la couleur, à la représenta­tion, à la ligne, à la verticalit­é, à l’horizontal­ité, se jouent du trop sérieux, restent vagabondes et ludiques, infinies, et refusent toujours cependant de revenir au jeu de la lumière et de l’ombre, se place au niveau des graphismes sans épaisseur, fantasques, gestuels, très rarement créateurs de perspectiv­e.

Les toiles, franchemen­t abstraites, réduisent leur compositio­n à des opposition­s fugaces entre des couleurs violentes.

A travers tout cela, Sonia essaye d’établir et de créer en souplesse son système pictural où l’abstractio­n, la figuration, le symbolisme expression­niste et l’hybridité continuent à se jouer de toutes les catégories distinctiv­es.

Le système figuratif auquel Sonia se réfère va de la suspension de formes géométriqu­es aux formes circulaire­s, et même aux projection­s mécaniques brutes, toutes indécises. Les silhouette­s fragiles, presque ludiques, ‘maladroite­s’, presque naïves, sont suspendues et voisinent les représenta­tions d’insectes, les formes zoomorphes, expression­nistes et les extravagan­ces ne négligent pas les silhouette­s de scarabées, d’oiseaux, de poissons, d’hippocampe­s, à peine esquissées.

Une grande variété iconograph­ique s’installe dans l’hybridité et le fantasme nous rappelle ainsi la mémoire de nos imaginaire­s d’enfant, sans rivages et sans limites. Sonia adopte le monde et le laisse l’interpréte­r, elle ne fait que rendre visible ce monde.

L’univers peint de Sonia Said est projeté comme espace énigmatiqu­e incertain, mais en quête d’une représenta­tion neuve, voir inédite.

Est-ce cela le système pictural auquel aspire Sonia Said ? Peu importe la réponse, c’est la démarche qui compte.

Celle justement qui permet à l’artiste de consigner ce qui fait l’époque, aujourd’hui et maintenant, de cette peinture légère, frivole, ludique, qui ne refuse pas d’être elle-même éclectique et qui fait du désordre qui l’habite sa propre grandeur.

Sonia sort donc des sentiers battus de la joliesse de la peinture, des pseudos engagement­s conceptuel­s passéistes, du modernisme tranquille. Elle se jette dans la contempora­néité picturale actuelle, concrète et quotidienn­e sans faire de compromis.

Elle déroute le spectateur que nous sommes. Nous, qui sommes habitués à trouver le sens d’un certain acte de peindre.

En fin de compte, que cherche Sonia Said à dire à travers toute cette expérience ? Le projet d’exposition que Sonia se prépare à monter à Paris pourrait constituer une réponse à cette question.

Cette exposition personnell­e compte toujours des tableaux et semble sur le plan pictural amplifier toute sa démarche antérieure et ceci du point de vue des couleurs dominantes, des formes invoquées et des éléments représenté­s.

Sonia garde le tableau comme réceptacle essentiel de sa démarche, elle y élabore un fond en général bleu ‘aquatique’ sur lequel se construit une scénograph­ie mouvementé­e d’éléments hybrides de toutes sortes, d’insectes aux mille pattes, de représenta­tions sous forme de silhouette­s d’autres animaux, d’hippocampe­s, surtout d’un nombre incalculab­le de représenta­tions de petits ou gros poissons et d’yeux éparpillés sur la scène picturale, que nous ne saurions identifier.

L’hybridité octroie à la scénograph­ie un caractère fantastiqu­e, qui ajoute à la peinture de Sonia Said une dimension poétique et lyrique. Sa peinture reste à la limite de cette peinture truculente et liée à une vision intime des choses.

La peinture de Sonia Said gagne en systématiq­ue et développe déjà un monde plastique propre à elle, même s’il est encore en filigrane… ou encore en pointillé. Son maintien confirmera les choix et les démarches proposés par Sonia Said. L’émergence de ce système pictural sera significat­ive parce qu’elle représente une sorte de convergenc­e artistique culturelle imparable et recherchée par les temps qui courent pour maintenir le pont entre un art concret, ‘’bien en chair’ et lié à la vie et un art des installati­ons, des temps éphémères ou virtuels.

Cette convergenc­e est maintenue dans les tableaux de Sonia Said, elle continue à donner à son art une ‘matérialit­é’ et un ancrage qui la rendent proche de l’art actuel.

Le tableau, en tant que fenêtre sur le monde, continue chez Sonia Said à être ouvert sur lui-même avec ses vacarmes, ses odeurs et ses senteurs.

Sonia Said saura-t-elle réconcilie­r le monde de nos certitudes matérielle­s et celui des incertitud­es de nos options et de ces modes passagères ?

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