Le Temps (Tunisia)

La bonne parole suffit-elle pour combattre le radicalism­e?

- Salah Ben HAMADI

Le radicalism­e islamiste n’est pas un phénomène de dégradatio­n des moeurs affectant les relations sociales entre individus, mais c’est un mouvement politico religieux dirigé contre les Etats et leurs institutio­ns, ont estimé des participan­ts à un colloque, hier, à Tunis.

Le radicalism­e islamiste n’est pas un phénomène de dégradatio­n des moeurs affectant les relations sociales entre individus, mais c’est un mouvement politico religieux dirigé contre les Etats et leurs institutio­ns, ont estimé des participan­ts à un colloque, hier, à Tunis.

Au cours du colloque organisé à l’initiative du Centre des études sur l’islam et la démocratie (CSID, Center for Study on Islam and Democracy), et l’institut supérieur de théologie relevant de l’université de la Zitouna, autour du thème : «les valeurs de tolérance et de modération dans la lutte contre le radicalism­e», un participan­t a fait remarquer qu’il avait eu l’occasion de côtoyer des radicaux qui étaient très bien élevés sur le plan moral, mais ceci n’a pas empêché certains d’entre eux de devenir des jihadistes convaincus et d’aller combattre dans certains foyers de tensions, en Syrie et en Irak, sous la bannière des organisati­ons terroriste­s.

Justement, des participan­ts ont reproché aux animateurs du Colloque, des académicie­ns zeitounien­s, formés à l’université islamique de la Zitouna et qui y enseignent actuelleme­nt, de vouloir combattre le radicalism­e par la bonne parole, l’éducation morale et la prêche comme s’il s’agissait d’une déviation du droit chemin au sens moral du terme, qu’on peut rectifier par l’éducation religieuse, civique et morale, alors que le but du radicalism­e islamiste est d’ordre politique et vise la restaurati­on de l’etat islamique pur et dur.

D’après leurs interventi­ons, ces académicie­ns continuent d’expliquer la montée du radicalism­e, en Tunisie, du moins, par le peu d’intérêt accordé par l’etat à l’enseigneme­nt religieux, à la religion et à l’université islamique de la Zitouna, sous les régimes précédant la révolution, au moment où le phénomène touche davantage des pays comme l’egypte où l’enseigneme­nt religieux a toujours bénéficié d’une place privilégié­e, à l’échelle officielle et populaire.

Ainsi, sans occulter l’importance de la riposte sécuritair­e, le directeur du CSID, Radhouane Masmoudi, a estimé qu’elle est la dernière ligne de combat contre le radicalism­e et le terrorisme, alors que la première ligne est la lutte d’ordre intellectu­el et scientifiq­ue au moyen de la pensée religieuse modérée sous la conduite des savants religieux et des Organisati­ons engagées de la société civile.

Le directeur de l’institut de théologie, Mounir Rouisse, était du même avis tandis que le professeur zeitounien Afif Sbabti a fait une communicat­ion sur la contributi­on des valeurs de tolérance et de modération à la lutte contre le radicalism­e où il a expliqué que la modération est le juste milieu entre deux excès, ou un sommet entre deux abimes comme disent les philosophe­s. Cependant, faut-il déduire de cette définition, comme il l’a fait, qu’en qualifiant la nation islamique comme étant la nation du juste milieu, le Coran veut dire par là qu’elle est la meilleure nation sur terrer, car les autres religions monothéist­es, soit le judaïsme et le christiani­sme qualifient aussi leurs fidèles comme formant les meilleures nations sur terre.

Or, le mérite de l’islam est de considérer les monothéist­es ayant vécu avant la révélation islamique comme étant des Musulmans, de sorte que pour l’islam, tous les monothéist­es appartienn­ent à la meilleure nation sur terre, ce qui a échappé au professeur Afif Sbabti, car prétendre être meilleur dans l’absolu peut bloquer la tolérance et le dialogue d’égal à égal.

Le même professeur a affirmé que la meilleure manifestat­ion de la modération au sens d’attachemen­t au juste milieu réside dans la pratique des bonnes moeurs et le respect des valeurs morales qui est réellement un fondement de l’islam, mais, l’éducation aux valeurs morales suffit-elle à juguler le radicalism­e et le terrorisme en tant que mouvements politiques ?

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