Un projet de loi pour régulariser la situation…
Trois organisations professionnelles indépendantes, en quête d’une consécration totale et effective du pluralisme syndical patronal et ouvrier, la Confédération générale du travail de Tunisie (CGTT), la Confédération nationale des entreprises citoyennes de Tunisie (CONECT) et le Syndicat des Agriculteurs de Tunisie (SYNAGRI) ont organisé, hier, à Tunis, une conférence conjointe intitulée «Conférence nationale sur le dialogue social et le pluralisme syndical», en présence des premiers responsables de ces trois organisations et du ministre chargé de la relation avec les instances constitutionnelles, la société civile et des droits de l’homme, Mehdi Ben Gharbia.
Comme tout le monde le sait, la situation en Tunisie en matière de pluralisme continue de revêtir certaines contradictions après la révolution de janvier 2011 et l’instauration d’un régime politique franchement démocratique et participatif. Alors que sur le plan politique, c’est-à-dire en ce qui concerne la constitution des partis politiques et leur participation aux élections, le pluralisme est total et effectif, par contre sur le plan syndical ouvrier et patronal, la représentativité reste encore monopolisée par les trois Organisations nationales traditionnelles, savoir l’union générale tunisienne du travail (UGTT) au niveau ouvrier, l’union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat (UTICA) au niveau patronal et l’union tunisienne de l’agriculture et de la pêche pour les agriculteurs et les pêcheurs en tant que producteurs.
Cependant, il s’agit d’un monopole de fait et non pas de droit, car, dans ses articles 35 et 36, la nouvelle constitution tunisienne de 2014 stipule et reconnait le pluralisme syndical sans exclusive et sans réserves.
A en juger par les déclarations du ministre Mehdi Ben Gharbia, à cette occasion, la situation va être juridiquement régularisée à l’aide d’un projet de loi en cours de préparation sur la représentativité syndicale dans le cadre du pluralisme syndical, ce qui signifie qu’il n’y aura plus de monopole de fait dans ce domaine. Déjà, une loi sur le conseil du dialogue social avait été adoptée. Ainsi donc, si tout va comme l’a affirmé le ministre, le recours à la Cour constitutionnelle pour consacrer effectivement et totalement le pluralisme syndical, brandi par le président de CONECT, Tarek Chérif, ne sera pas utile. En effet, ce dernier a condamné ce qu’il a appelé de « grande résistance motivée par la préservation de positions de monopole » face à la consécration effective et totale du pluralisme syndical, insistant sur la nécessité de savoir dépasser le système de pensée unique auquel on est habitué en Tunisie, car, a-t-il dit, la Tunisie a besoin d’un vrai dialogue social qui soit une source d’enrichissement mutuel.
De son côté, le secrétaire général de la CGTT, Habib Guiza, a noté que le dialogue social est actuellement interrompu en Tunisie, au moment où la révolution était venue pour combattre l’exclusion et instaurer une démocratie participative à tous les échelons.
Le président du SYNAGRI, Karim Daoud, est d’avis qu’on assiste en Tunisie à un recul en arrière, en ce sens, a-t-il dit, qu’on applique le pluralisme politique de manière intégrale, mais on conserve une structure syndicale unique. Il a estimé que le pluralisme syndical renforce les capacités du pays, appelant le gouvernement à soutenir le pluralisme syndical et à agir dans ce sens.
On notait également la présence de responsables d’autres organisations syndicales indépendantes telle que l’union des enseignants et chercheurs universitaires IJABA, ainsi que des représentants du Bureau international du Travail (BIT) et de quelques organisations syndicales indépendantes des pays maghrébins et européens, notamment du Maroc et de Belgique.