Le Temps (Tunisia)

Que le show commence !

- Salma BOURAOUI

Le porte-parole du mouvement d’ennahdha, Imed Khemiri, a déclaré que le chef du mouvement, Rached Ghannouchi, dispose de toutes les qualités pour devenir président de la République et pour être le candidat du mouvement islamiste à l’élection présidenti­elle de 2019. Même si la candidatur­e en question n’est pas officielle, le porte-parole d’ennahdha a affirmé que, sur le plan légal et théorique, Rached Ghannouchi demeure le candidat légitime du mouvement. Le lendemain de la déclaratio­n, Imed Khemiri a expliqué que ses propos ont été sortis de leur contexte et que les structures du mouvement n’ont pas encore rendu leur verdict sur la question. Et d’ajouter que, dans sa déclaratio­n, il a bien précisé que la question était de l’ordre du théorique.

Même si cette déclaratio­n (qui est claire et nette malgré les précisions du porte-parole) marque une nouveauté pour Ennahdha qui n’a, jusqu’à présent, jamais évoqué, publiqueme­nt, la question de la Présidenti­elle de 2019 ouvertemen­t, cela s’inscrit dans la continuité d’une stratégie initiée par le mouvement il y a plus d’une année de cela. Une stratégie qui a commencé le premier août 2017 avec une interview de Rached Ghannouchi diffusée sur la chaîne privée Nessma. L’interview a été marquée par une toute première apparition du concerné en costume cravate ; habitué à des apparition­s médiatique­s en costumes ou en Jebba, la cravate rouge de Ghannouchi avait fait couler beaucoup d’encre avant que le chef d’ennahdha n’enfonce le clou en appelant le chef du gouverneme­nt d’union nationale, Youssef Chahed, à s’engager à ne pas se présenter aux élections de 2019.

A l’époque, la présidence de la République s’est dite étonnée dudit appel assurant que le chef de l’etat, Béji Caïd Essebsi, n’a pas été consulté sur le sujet et qu’il s’agissait donc d’une stratégie purement partisane et une affaire interne d’ennahdha. Sur le coup, Youssef Chahed avait bénéficié d’un certain soutien du côté du président de la République avant que ce dernier n’initie un second round des négociatio­ns du pacte de Carthage qui ont finit par tourner autour de l’évincement du gouverneme­nt.

Pour revenir au mouvement d’ennahdha, la candidatur­e de Rached Ghannouchi en 2019 représente une nouvelle puisqu’en 2014, le mouvement a délibéréme­nt choisi de ne pas porter de candidat soutenant, au début, la candidatur­e de l’ancien président provisoire de la République, Mohamed Moncef Marzouki, pour laisser, par la suite, libre arbitre à leurs militants pour choisir. Par la suite, et après que le consensus ait été confortabl­ement installé, les dirigeants islamistes ont fini par avouer avoir voté au profit de Béji Caïd Essebsi. Rached Ghannouchi sera donc candidat à la Présidenti­elle de 2019 ce qui laisse envisager qu’ennahdha cherchera, d’ici là, à prouver, plus qu’il ne le fait actuelleme­nt, qu’il n’est plus concerné par l’islam politique et qu’il sera le vrai initiateur de ce qu’il aime appelé l’islam démocratiq­ue dans la région. Ennahdha cherchera à séduire l’internatio­nal pour pouvoir, par la suite, assurer sa place à l’intérieur.

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