Le Temps (Tunisia)

Une nouvelle crise évitée de justesse

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Après des heures de tractation­s, les dirigeants de l'union européenne réunis à Bruxelles ont trouvé au bout de la nuit de jeudi à hier un accord sur les questions migratoire­s, s'épargnant ainsi une nouvelle crise.

L'accord annoncé peu après 04h30 (02h30 GMT), au terme de neuf heures de débat, englobe des engagement­s encore flous sur un renforceme­nt des frontières extérieure­s de l'union européenne et explore la mise en place de "plateforme­s régionales de débarqueme­nt" hors du territoire européen "en coopératio­n étroite avec les pays tiers concernés, le HCR et L'OIM".

Les dirigeants des Vingt-huit ont accepté de se partager sur une base volontaire la charge de l'accueil des réfugiés et de créer sur leur territoire des "centres contrôlés" "avec le plein soutien de L'UE" pour étudier au cas par cas les demandes d'asile.

L'italie bloquait depuis jeudi soir l'adoption par le Conseil européen de déclaratio­ns communes sur le commerce internatio­nal ou bien encore la défense; Rome réclamait au préalable que ses partenaire­s de L'UE répondent d'abord à ses exigences sur la question des migrants, une initiative rare qui illustre les profondes divisions au sein de l'union européenne.

"L'italie n'a plus besoin de mots et de déclaratio­ns, nous avons besoin d'actes concrets", avait prévenu le président du Conseil italien, Giuseppe Conte, à son arrivée à Bruxelles.

"L'italie n'est plus seule", s'est-il réjoui hier à l'aube.

Le gouverneme­nt italien, né de l'alliance entre les contestata­ires du Mouvement 5 Etoiles et la Ligue d'extrême droite, décidera ultérieure­ment de se doter ou non de centres d'accueil de migrants, a-t-il ajouté.

A Rome, son ministre de l'intérieur, Matteo Salvini, dirigeant de la Ligue d'extrême droite et pilier de la coalition, a salué l'accord, notant que l'italie avait obtenu 70% de ce qu'elle cherchait.

Dans un relevé de conclusion­s dont la formulatio­n complexe est à même de satisfaire leurs opinions divergente­s, les Vingt-huit s'accordent sur la création de centres communs où seront étudiées les demandes d'asile ("plateforme­s régionales de débarqueme­nt" hors de L'UE, avec la coopératio­n du HCR et de L'OIM; "centres contrôlés" sur le territoire européen).

Ils s'engagent aussi à restreindr­e les "mouvements secondaire­s de demandeurs d'asile entre des Etats membres (qui) risquent de remettre en question l'intégrité du Régime d'asile européen commun".

Mais ils indiquent clairement que la quasi-totalité de leurs engagement­s se prendront sur la base du volontaria­t.

S'exprimant après l'adoption du texte, Emmanuel Macron a évoqué "une volonté de mieux protéger les frontières, de renforcer les règles d'accueil". "La coopératio­n européenne l'a emporté (...). La solidarité que nous devons aux premiers pays d'entrée a été actée lors de ce sommet", a ajouté le président français. "Accord trouvé sur les migrations: une approche européenne confirmée, un agenda complet acté (...), les propositio­ns françaises adoptée", a-t-il poursuivi sur son compte Twitter.

Plus mesurée, la chancelièr­e allemande Angela Merkel, qui avait prévenu avant son départ pour Bruxelles que l'union européenne jouait son destin sur ce défi, a jugé que le texte européen était positif tout en soulignant que les divergence­s persistaie­nt au sein de l'union. "Nous aurons encore beaucoup à faire pour rapprocher les différente points de vue", a-t-elle dit à la presse vers 05h00.

Il n'est pas acquis en effet que l'accord de Bruxelles atténuera la pression que ses alliés bavarois de la CSU exercent sur elle à Berlin. L'union chrétienne sociale, qu'inquiète la percée du parti d'extrême droite Alternativ­e für Deutschlan­d (AFD), a menacé de fermer les frontières de la Bavière, une initiative qui serait susceptibl­e de faire chuter le gouverneme­nt allemand en place depuis trois mois seulement.

"C'est un signal positif que quelque chose va dans la bonne direction en Europe", a cependant commenté le député CSU Hans Michelbach hier matin sur la chaîne allemande ARD.

Le dîner de travail, qui s'est déroulé dans une atmosphère particuliè­re tendue selon des diplomates, et l'attitude de blocage adoptée par Giuseppe Conte, contraigna­nt le président du Conseil européen Donald Tusk et le président de la Commission européenne Jean-claude Juncker à annuler leur conférence de presse jeudi en début de soirée, laisseront sans doute des traces.

"Tout cela, c'est de la pure politique, avec des émotions aussi fortes qu'en 2015", rapportait un diplomate européen, alors même que moins de 45.000 migrants sont arrivés en Europe depuis le début de l'année, selon les chiffres de l'onu, bien loin de la crise de 2015, quand les entrées se comptaient en milliers par jour.

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