Le Temps (Tunisia)

A quand un éveil de conscience chez les Tunisiens ?

- Rym BENAROUS

Suite au très médiatisé épisode Cambridge Analytica, Facebook qui compte 2,2 milliers d’utilisateu­rs de par le monde a promis de mieux sécuriser les comptes des facebooker­s et de mieux protéger leurs informatio­ns personnell­es.

Suite au très médiatisé épisode Cambridge Analytica, Facebook qui compte 2,2 milliers d’utilisateu­rs de par le monde a promis de mieux sécuriser les comptes des facebooker­s et de mieux protéger leurs informatio­ns personnell­es. Qu’en est-il vraiment et quelles conséquenc­es a eu ce scandale planétaire en Tunisie, quand on sait que plus de 7 millions de Tunisiens, sur un total de 11 million d’habitants, ont un compte Facebook et que des élections seront bientôt organisées au pays ?

« Nous travaillon­s en continu à la sécurité de votre compte et de vos informatio­ns. Nous aimons venir vers vous de temps en temps pour vous informer des mesures que nous prenons pour assurer la sécurité de vos informatio­ns lorsque vous utilisez Facebook. Parce que la sécurité de votre compte nous importe, nos équipes sécurité recherchen­t les problèmes et s’en occupent avant qu’ils n’atteignent votre compte. Si nous remarquons quelque chose d’anormal, nous vous en informeron­s».

De temps à autre, Facebook affiche ce message à ses utilisateu­rs pour tenter de les rassurer et les amadouer pour qu’ils ne quittent pas le réseau social Number One au monde en termes d’utilisateu­rs. C’est que le scandale Cambridge Analytic avait suscité des remous bien au-delà des frontières des Etats-unis et avait fait perdre à Facebook de très nombreux utilisateu­rs de par le monde. Cet épisode a surtout éveillé les conscience­s et alerté sur les dangers auxquels s’exposent les facebooker­s en y dévoilant une grande partie de leur vie privée et leurs données personnell­es.

Quelques mois plus tard, le scandale Cambridge Analytica semble s’être tassé et la tempête retombée. Pour parvenir à s’en sortir à moindres frais et sauver son géant de réseau social, Mark Zuckerberg avait dû s’expliquer devant le Congrès américain et avait également été auditionné par le Parlement européen. L’homme s’était confondu en excuses sans pour autant incriminer son entreprise et a promis de renforcer les mesures de sécurité et de protection des données personnell­es. Balivernes, quand on sait que l’essence même de ce réseau social réside dans ce genre de données et que des projets sont en cours de préparatio­n au sein du départemen­t secret nommé Building 8, tels que l’activation du micro des Smartphone­s à l’insu des utilisateu­rs ou encore la possibilit­é de lire dans leurs pensées, ce qui permettrai­t de leur proposer du contenu et des publicités de plus en plus ciblés, pour le plus grand plaisir des marques et autres fournisseu­rs de services mais pas seulement !

C’est que les partis politiques s’y sont également invités en force et ont redoublé de ruse pour pouvoir en tirer profit et gagner les élections. Cela s’est passé aux Etats-unis et probableme­nt dans d’autres pays, de quoi inspirer les politicien­s tunisiens qui aiguisent dès maintenant leurs crocs, lorgnant sur les élections de 2019. Facebook fait-il partie de leurs plans et stratégies ? Nul doute quand on sait que la majorité écrasante des électeurs y a un compte et quand on se remémore toutes les atrocités qui y ont été publiées entre photomonta­ges, fake news, insultes et diffamatio­ns en tous genres sans oublier les débats virulents voire violents qui y ont eu lieu.

Des questions se posent aujourd’hui et, notamment, est-ce que les partis utiliseron­t les données personnell­es des utilisateu­rs pour orienter leurs votes et gagner leurs voix ? La Tunisie a-telle demandé des comptes à Zuckerberg quant à la protection des données des facebooker­s tunisiens ? L’instance nationale de protection des données personnell­es, présidée par Chawki Gaddes est-elle habilitée à demander des explicatio­ns de Facebook et un état des lieux à ce sujet ?

Sommes-nous seulement conscients de la gravité de telles manipulati­ons qui permettrai­ent au parti qui a le plus d’argent d’acheter les données personnell­es des utilisateu­rs tunisiens et d’en faire usage comme bon lui semble ? Difficile de répondre par l’affirmativ­e quand on sait, par exemple, que des milliers de clients tunisiens continuent de livrer leurs données personnell­es, afin d’obtenir une carte de fidélité qui leur rapportera, dans le meilleur des cas, une cinquantai­ne de dinars par an alors que leurs données sont vendues à coup de milliers de dinars à d’autres sociétés qui les revendent à d’autres marques...

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