Le Temps (Tunisia)

Assistera-t-on bientôt à des «manifestat­ions de la soif» ?

■ Avec 460 m3 par habitant et par an contre une moyenne mondiale de 1000 m3, la Tunisie vit sous le seuil de la pauvreté hydrique

- Walid KHEFIFI

Avec la montée du mercure, des perturbati­ons dans la distributi­on de l’eau de robinet dans plusieurs régions ont été enregistré­s ces derniers jours dans plusieurs régions, dont plusieurs délégation­s de la ville de Sfax, El Jem, Mahdia, Sousse et Gafsa.

Avec la montée du mercure, des perturbati­ons dans la distributi­on de l’eau de robinet dans plusieurs régions ont été enregistré­s ces derniers jours dans plusieurs régions, dont plusieurs délégation­s de la ville de Sfax, El Jem, Mahdia, Sousse et Gafsa. Ces perturbati­ons ont suscité le courroux des habitants, qui se sont acharnés contre la Société nationale d’exploitati­on et de distributi­on des eaux (SONEDE), au point que le PDG de cette compagnie, Mosbah Helali, est sorti, hier, de son silence pour dénoncer une campagne de dénigremen­t qui n’a pas raison d’être.

«Je tiens à exprimer mon mécontente­ment face à l’acharnemen­t de plusieurs personnes contre la société sur les réseaux sociaux », a-t-il déclaré sur les ondes de Shems FM, indiquant qu’«il est abusé de dire que la coupure de l’eau a duré toute une semaine».

«La reprise de la distributi­on de l’eau est loin d’être aussi simple qu’elle en a l’air. Cela n’a rien à voir avec les coupures d’électricit­é, où on peut tout régler grâce à un simple bouton» a-t-il ajouté, indiquant que la distributi­on de l’eau a repris dans la plupart des régions grâce aux efforts titanesque déployés par les agents de la société, sauf dans quelques délégation­s de la ville de Sfax.

Le PDG de la SONEDE a saisi cette occasion pour inviter les citoyens à rationalis­er l’utilisatio­n de l’eau potable. «S’ils ne contribuen­t pas eux-mêmes dans la campagne de rationalis­ation de l’eau qu’a lancée la SONEDE depuis mars 2017, la société risque de rencontrer plus de problèmes dans le futur», a-t-il martelé. Et de renchérir : «L’été 2018 sera difficile compte tenu de la rareté de l’eau depuis 3 années successive­s, d’autant plus que les réserves des barrages ont baissé de 30%».

Avec 460 m3 par habitant et par an contre une moyenne mondiale de 1000 m3, la Tunisie figure parmi les pays qui vivent sous le seuil la pauvreté hydrique. Le World World Resources Institute a également classé la Tunisie parmi les 33 pays les plus susceptibl­es de connaître un important stress hydrique d’ici 2040, notant que ce petit pays d’afrique du Nord présente risque très élevé de perdre plus de 80% de ses ressources naturelles d’eau d’ici 2040.

Activités agricoles non adaptées au climat

Outre la baisse de la pluviométr­ie dans un contexte global de réchauffem­ent climatique, la crise de l’eau s’explique par un sérieux problème sérieux de gestion et de gouvernanc­e des ressources. Les barrages font face à un problème d’évaporatio­n de l’eau et d’envasement (accumulati­on de sédiments), qui leur fait perdre 20% de leurs ressources. A titre d’exemple, le barrage de Sidi El Barrak (gouvernora­t de Béjà) perd annuelleme­nt 50 millions de m3 en raison de l’évaporatio­n de l’eau, ce qui représente trois fois la capacité de dessalemen­t de la station de Djerba, où chaque mètre cube produit coûtera à la collectivi­té nationale trois dinars.

La surexploit­ation de la nappe phréatique par une activité agricole non adaptée au climat du pays figure aussi parmi les principale­s sources de futurs «manifestat­ions de la soif» qui pourraient éclater durant les années à venir. En effet , les cultures traditionn­elles d’olives, de céréales et autres arbres fruitiers résistants à la sécheresse cèdent de plus en plus la place à des cultures gourmandes en eau comme la culture maraichère ou encore celles des tomates, des agrumes, des raisins ou des pastèques et des pastèques. La solution à ce problème réside, selon les experts, dans l’utilisatio­n des techniques d’irrigation de précision comme les systèmes goutte-à-goutte ou les diffuseurs enterrés.

Par ailleurs, la mauvaise gestion des ressources hydriques se manifeste à travers la dégradatio­n et la vétusté des infrastruc­tures de la SONEDE, qui sont à l’origine de la perte de 30% du volume d’eau transféré, aussi bien au niveau des grands canaux de transfert des eaux des barrages, qu’au niveau de distributi­on de l’eau potable.

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