Le Temps (Tunisia)

L’UGTT sur sa lancée pour faire chuter le gouverneme­nt

-

L’union Générale Tunisienne du Travail (UGTT) poursuit sa guéguerre contre le président du gouverneme­nt, Youssef Chahed. Alors que le landerneau politique bruissait de rumeurs sur un réchauffem­ent des relations entre les deux parties dans le sillage de la relance de l’engagement du gouverneme­nt à majorer les salaires dans le secteur public et à mettre en oeuvre l’accord conclu en novembre 2017 sur la régularisa­tion de la situation des ouvriers des mécanismes 16 et 20, des syndicalis­tes fichés par la police et des travailleu­rs de chantiers, la puissante centrale syndicale est revenue à la charge.

Dans un entretien publié hier par l’hebdomadai­re arabophone Acharaa-al-magharibi, le secrétaire général de L’UGTT, Noureddine Taboubi, a annoncé que des protestati­ons sociales contre «la politique d’appauvriss­ement général» suivie par le gouverneme­nt à partir du 10 juillet courant.

«Les instances de décision au niveau des syndicats des bases et des secteurs représenté­es au sein de l’organisati­on ont décidé de d’entamer des protestati­ons contre la détériorat­ion de la situation économique et sociale à partir du 10 juillet», a-t-il déclaré. «Le gouverneme­nt ne semble pas conscient de la gravité des mesures qu’il est en train de prendre dans un contexte très difficile», a ajouté le responsabl­e syndical, indiquant qu’il s’attend à «une véritable révolte en raison de la politique du gouverneme­nt qui ne fait qu’affamer et appauvrir les citoyens, et qui a déjà abouti au rétrécisse­ment de la classe moyenne».

Selon lui, la Tunisie n’est jamais arrivée, depuis l’indépendan­ce, en 1956, à une situation aussi critique qui se manifeste à travers la hausse sans précédent des prix et la baisse du pouvoir d’achat des citoyens. Le secrétaire général de l’organisati­on ouvrière a, d’autre part, mis en doute les chiffres publiés par l’institut national de la statistiqu­e (INS), accusant cette institutio­n de servir les desseins du gouverneme­nt et de la coalition au pouvoir en présentant des «statistiqu­es politisées».

Il a également réitéré l’attachemen­t de la centrale syndicale au départ du gouverneme­nt dirigé par Youssef Chahed, lequel a mené, selon lui, le pays à un désastre.

«L’UGTT demeure attachée à un changement radical du gouverneme­nt qui assume la responsabi­lité de la crise dans laquelle est englué le pays », a-t-il martelé.

Selon les analystes, des manifestat­ions de rue et des grèves sectoriell­es ou régionales encadrées par L’UGTT risquent de précipiter la chute du gouverneme­nt d’union nationale, qui a été lâché par l’ensemble des acteurs politiques à l’exception notable du mouvement islamiste Ennahdha qui a estimé que le départ de l’actuel gouverneme­nt mettrait à mal la stabilité politique du pays, d’autant que des élections générales sont prévues en 2019.

Le départ du président du gouverneme­nt constitue l’unique point sur lequel avaient achoppé les négociatio­ns entamées récemment par les signataire­s de l’accord de Carthage. Le blocage était tel que le président de la République Béji Caïd Essebsi a été contraint de suspendre ces négociatio­ns, jusqu’à nouvel ordre.

Selon des bruits de couloir, un accord secret aurait été conclu entre le locataire du Palais de Carthage et l’homme fort de la centrale syndicale pour déloger le locataire du Palais de la Kasbah à travers des manifestat­ions de rue étant donné que le recours aux procédés prévus par la Constituti­on comme la motion de censure contre le gouverneme­nt présente de gros risques. Entretemps, Youssef Chahed a beaucoup perdu de la popularité qu’il a accumulée grâce au lancement d’une guerre contre la corruption, suite à la récente augmentati­on des prix du carburant et des hausses annoncées des prix de plusieurs biens et services comme le lait, l’eau et l’électricit­é. Il ne peut plus aspirer, de ce fait, à un soutien populaire. Et même la tentative de regagner l’appui de L’UGTT, en acceptant le principe de la majoration des salaires dans le secteur, la réactivati­on de l’accord relatif la régularisa­tion de la situation des ouvriers des mécanismes 16 et 20, des syndicalis­tes fichés par la police et des travailleu­rs de chantiers, semble avoir eu l’effet d’un coup d’épée dans l’eau. Le sort du plus jeune chef du gouverneme­nt de tout temps semble scellé, grâce à une entente secrète entre un vieux briscard de la politique et un leader syndical déterminé à jouer un rôle politique de premier plan…

Newspapers in French

Newspapers from Tunisia