Le Temps (Tunisia)

L'ONU se penche sur les crimes commis dans le Kasaï

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RDC

Le Conseil des droits de l'homme des Nations unies s’est réuni mardi 3 juillet à Genève et parmi les dossiers examinés : la situation dans les Kasaï, en République Démocratiq­ue du Congo. Une réunion intervenue une semaine après la remise par des experts de L’ONU d’un rapport sur les crimes commis lors du cycle de violences et de répression entre 2016 et 2017, dont certains peuvent être qualifiés de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité.

Les experts des Nations unies le reconnaiss­ent volontiers, leur rapport « n'est pas complet ». 5 mois d'enquête, 3 visites sur le terrain et quelque 500 témoins et victimes interrogés ne suffisent pas pour faire un tableau exhaustif des violences commises dans le Grand Kasaï pendant plus d'un an. L’objectif était seulement « de peindre de façon juste et neutre les phénomènes qui se sont produits, à grands traits », explique Luc Côté, l’un des auteurs du rapport.

Mais selon les experts, les crimes listés permettent de confirmer un niveau de violence extrêmemen­t élevé dans le Kasaï et l'existence de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité commis par les forces armées de la République démocratiq­ue du Congo pour beaucoup, mais aussi par les milices, notamment les Kamuina Nsapu. La volonté de nuire mais aussi un certain niveau d'organisati­on se retrouvent toutefois chez l'ensemble des auteurs de violence, affirment les experts. Ils citent pour exemple les opérations de porte-à-porte, véritable campagne de terreur, avec viols et pillages menés par l'armée. Et, du côté des Kamuina Nsapu, les centaines d'enfants recrutés de force, obligés de décapiter leurs victimes.

Les experts disent avoir voulu constituer une base de données pour que le Congo puisse lancer des poursuites. Des poursuites qui tardent à se mettre en place, ont regretté de nombreux pays membres du Conseil des droits de l'homme aujourd'hui. Les experts souhaitent à présent savoir « ce qui va être fait par les autorités congolaise­s pour améliorer l’efficacité, la capacité du système de justice en place, pour avoir des résultats ». Le Canadien Luc Côté, l'un des trois experts, espère donc que le Conseil des droits de l’homme de L’ONU se concentre sur la surveillan­ce du suivi judiciaire au Congo, qu'il « regarde ce qui se passe au niveau de la justice ».

Car les poursuites tardent à se mettre en place, ont regretté de nombreux pays membres du conseil des droits de l'homme.

Bacre Waly Ndiaye, le président de l'équipe d'experts internatio­naux signataire­s ud rapport, déplore lui aussi « le manque de progrès dans les procès judicaires en cours ». « Un problème d’impunité subsiste au regard de l’ampleur et de la gravité des crimes commis au Kasaï », juge-til. « Les informatio­ns recueillie­s par l’équipe montrent que les auteurs présumés des violations et crimes font rarement l’objet de poursuites judiciaire­s ». C'est pourquoi les trois experts attribuent « une grande place aux recommanda­tions judiciaire­s [...] pour que les auteurs et commandita­ires des crimes odieux soient jugés ». Bacre Waly Ndiaye appelle également de ses voeux « un processus de justice transition­nelle visant à établie la vérité et à apporter réparation aux victimes afin d’assurer la réconcilia­tion ». Mais pour de nombreuses ONG, demander à la RDC d'entamer des poursuites est inutile. Jean-mobert Nsenga, chercheur sur la RDC pour Amnesty Internatio­nal rappelle que « ce ne sont pas les premiers faits graves documentés en RDC ». Il juge que « l’impunité est une pandémie en RDC » et qu’en conséquenc­e « répéter la même chanson » ne sert à rien, que « c’est quelque chose qu’on entend depuis vingt ans ». Il demande à la communauté internatio­nale de prendre ses responsabi­lités et de s’assurer que tous les auteurs de « violations graves des droits de l’homme et les crimes internatio­naux, y compris au plus haut niveau de forces de sécurité et des autorités politiques, répondent de leurs actes ».

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