Quand «Karmous Djebba» donne l'exemple
Festivals, terroirs et cultures locales
La vingt-cinquième édition du festival "Karmous Djebba" aura lieu du 14 au 31 juillet dans ce village du nord-ouest de la Tunisie. Gros plan sur une manifestation dont le caractère local pourrait inspirer bien des initiatives et ouvrir la voie à de nouvelles synergies entre culture et développement rural.
On parle peu dans les médias des nombreux festivals qui existent dans les terroirs tunisiens. Et pourtant, à l'ombre des mastodontes de l'été culturel, ces festivals posent un exemple des plus originaux et incitent à une réflexion en profondeur sur le rôle de la culture en milieu rural.
La diversité des festivals dans les terroirs
On a vu ici et là l'émergence de manifestations culturelles spécifiquement liées à un terroir ou bien à des traditions populaires. On peut ainsi citer plusieurs festivals à caractère culturel et touristique qui ont servi à la promotion d'une région donnée et parfois suscité sa découverte pure et simple par le grand public. On pourrait évoquer le festival du Corail de Tabarka, celui de la vigne à Grombalia ou
encore ceux du poulpe à Kerkennah, de la tonte du mouton dans plusieurs régions ou encore ceux, nombreux, dédiés à l'olivier.
Ces festivals qu'il est difficile d'énumérer car ils peuvent prendre pour prétexte aussi bien l'épervier comme à El Haouaria que la poésie populaire comme à Hassi El Frid, sont de puissants leviers de promotion locale. Tout en restant ancrés dans les traditions d'une région, ils les font connaître et proposent des programmes d'accompagnement généralement festifs. En effet, musique, théâtre, danse et poésie sont généralement à l'ordre du jour de ces festivals dont ceux du sud, à Douz, Kebili et Tozeur, comptent parmi les exemples les plus achevés.
Quelle serait en effet notre perception de Douz sans le festival du Sahara et quelle serait notre connaissance approfondie du sudouest tunisien sans les festivals qui
s'y déroulent en hiver? C'est la réponse à ces questions qui suggère qu'il existe de nombreux gisements d'opportunités qui pourraient ouvrir la voie à de nombreuses manifestations locales à rayonnement national. Une telle démarche serait un nouvel atout aussi bien pour la diffusion culturelle que pour le développement tout court.
Des pistes à suivre pour des alternatives culturelles et touristiques
Djebba est un petit village de la région de Béja. Dans l'antiquité, on exploitait ici les mines de galène et de calamine de Thiggiba. Mais aujourd'hui, c'est la figue qui règne en maîtresse sur le versant nord de Jbel Goraa.
La figue de Djebba compte parmi les plus connues et
appréciées en Tunisie. Chaque année, un festival lui rend hommage et ouvre la voie à plusieurs semaines festives autour des arts et aussi de la culture de la figue. Ce festival nommé "Karmous Djebba" se déroulera cette année du 14 au 25 juillet et donnera lieu à de nombreux spectacles artistiques, des conférences et aussi des expositions-vente de produits du terroir. Le public est attendu et viendra des grandes villes voisines pour créer une animation soutenue à Djebba et ses environs immédiats à Thibar. Les spectacles populaires qui seront présentés sont conçus comme un accompagnement à la promotion de la figue, produit essentiel des terroirs de la région. Cette démarche est à soutenir car elle inscrit un festival dans son environnement. Le festival voisin de Dougga semble l'avoir bien compris puisque les soirées de cette manifestation culturelle sont
aussi l'occasion de rencontrer les produits de la région, notamment l'huile d'olive.
Ainsi, à Djebba, la figue dite "bouhouli" devient le prétexte à une vaste opération d'animation culturelle et de promotion touristique. Chaque année, des progrès sont réalisés et le public en progression. Et c'est véritablement la fonction de ce festival local dont le rayonnement est devenu national. L'exemple est à méditer car il pourrait permettre de vivifier la culture en milieu rural et offrir des alternatives culturelles et touristiques aux grands festivals internationaux qui sont désormais devenus des entreprises de loisir dirigé vers le grand public.
A suivre donc ces figues de Djebba, dans la mesure où, au-delà de leur saveur, elles nous indiquent une piste à suivre pour l'action culturelle.