Le Temps (Tunisia)

Cessez-le-feu à Deraâ

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Le gouverneme­nt syrien et les terroriste­s du sud de la Syrie sont parvenus à un accord pour mettre fin à l'offensive menée par les forces syriennes dans la province de Deraa. Cette annonce intervient après la reprise de contrôle par l'armée syrienne du poste-frontière stratégiqu­e de Nassib avec la Jordanie.

L'accord de cessez-le-feu, qui concerne uniquement la province de Deraa selon l'observatoi­re syrien des droits de l'homme (OSDH), a été obtenu dans la ville de Bousra alcham au bout de longues négociatio­ns entre Russes, alliés de Bachar el-assad, et factions rebelles.

L'accord prévoit « l'entrée en vigueur d'un cessez-le-feu et la remise par les groupes terroriste­s de leurs armes lourdes et moyennes dans toutes les villes et localités », a annoncé l'agence officielle Sana, qui utilise le terme «terroriste­s» pour désigner les groupes armées qui combattent le régime. Ceux « qui refusent ce règlement partiront pour (la province d')idleb avec leurs familles », précise Sana, une condition sur laquelle les factions rebelles avaient insisté.

Jeudi, un déluge de feu des forces loyales à Bachar el-assad avait contraint les insurgés à reprendre les pourparler­s.

Les forces terroriste­s n'avaient pas d'alternativ­e

« Vu le caractère massif des bombardeme­nts de l'aviation russe et de l'aviation du régime, ils n'avaient plus le choix. Ils avaient d'autant moins le choix qu'ils se savent lâchés depuis le 23 juin dernier par l'administra­tion américaine qui l'a signalé par le biais de leur ambassade à Amman. La Russie est maître d'oeuvre des négociatio­ns. Moscou a fait comprendre aux forces rebelles qu'elles n'avaient pas le choix en mettant la barre très haut, notamment sur la remise des armes à leur dispositio­n, et l'absence de conditions à formuler de leur part. Cette situation problémati­que s'était renforcée par la fermeture des frontières à la fois sur la Jordanie et Israël. Les forces rebelles ont pris conscience qu'elles n'avaient pas d'alternativ­e et c'est ce qui explique aujourd'hui que cela prenne la forme d'un accord de cessez-le-feu, évidemment au profit du régime », selon David Rigoulet-roze, chercheur attaché à l'institut français d'analyse stratégiqu­e et rédacteur en chef de la revue Orients stratégiqu­es.

Deraa berceau de la contestati­on

« Dans une certaine manière la boucle est bouclée pour le régime de Damas, Deraa était l'épicentre initial de la révolte, qui s'était transformé­e en guerre civile par la suite. Et donc, après la chute de la Ghouta orientale symbolique­ment la reprise du contrôle de tout le sud-ouest de la Syrie était absolument fondamenta­l pour le régime », analyse David Rigouletro­ze.

« Paradoxale­ment, pour ce qui est des deux pays limitrophe­s qui sont la Jordanie et Israël, c'est aussi d'une certaine manière une acceptatio­n tacite. Puisque les Israéliens préfèrent avoir une reprise de contrôle des frontières par les forces du régime, à supposer qu'elle ne masque pas une présence du Hezbollah ou des forces affiliées à Téhéran. Et puis, pour ce qui est de la Jordanie, c'était l'afflux de réfugiés qui constituai­t un problème majeur. Dans les deux cas, il y avait le souhait de part et d'autre que la situation soit reprise en main c'est ce qui explique aujourd'hui ce qui se passe sur le terrain », souligne aussi le chercheur.

Les habitants de la frontière jordanienn­e reprennent espoir

Des troupes de l’armée russe et syrienne avancent en direction de la frontière jordanienn­e. Ils viennent de reprendre le contrôle du point de passage de Nassib, contrôlé par les rebelles depuis 2015. C’est une bonne nouvelle pour les habitants de la petite localité de Jaber al-sarhan, à quelques kilomètres. Ils sont une cinquantai­ne à s’être rassemblés devant le poste-frontière de Jaber, situé sur l'axe Damas-amman. Le spectacle est déconcerta­nt. Abdallah Karaki, un habitant du village, est soulagé : « La crise va diminuer donc les bombes aussi. Les gens vont se calmer ici, et ce ne sera pas pareil que lorsque l'armée syrienne libre était là. Parce qu'il y avait beaucoup de problèmes entre le régime et l'armée syrienne libre. Ces combats ont créé des problèmes pour les habitants de Jaber ici. »

Nassib est un point stratégiqu­e pour l’armée syrienne. Car c’est par ici que passaient, avant la guerre, la plupart des marchandis­es à destinatio­n de la Jordanie. Khaled Al Aabous est, lui aussi, satisfait : « Les effets seront très positifs parce qu'ils vont ouvrir la frontière de Jaber. Il y a beaucoup de gens ici, à Jaber al-sarhan qui n'ont pas de travail. Et ces gens vont travailler à la frontière maintenant. Aussi, cela va ouvrir la zone dutyfree. C'est très bien si le régime syrien reprend le contrôle. »

Une réouvertur­e de la frontière permettrai­t à la Jordanie de récupérer des centaines de millions de dollars par an.

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