Le Temps (Tunisia)

Erdogan appelle les Turcs à la "lutte nationale"

-

Le président Tayyip Erdogan a appelé hier les Turcs à la "lutte nationale" en échangeant leurs devises et leur or contre des livres turques et dit que ceux qui avaient déclaré une "guerre économique" à la Turquie trouveraie­nt à qui parler.

Le président turc, qui estime qu'un "lobby des taux d'intérêt" occulte et les agences de notation occidental­es tentent de mettre l'économie locale à genoux, en a appelé au patriotism­e turc.

"Si quelqu'un a des dollars ou de l'or sous son matelas, qu'il aille les échanger contre des livres dans nos banques; c'est une bataille intérieure, nationale", a-t-il dit à Bayburt, une ville du nord-est de la Turquie. La livre turque a perdu jusqu'à 14,6% hier, victime des craintes que suscite l'influence possible d'erdogan sur la politique monétaire et d'une aggravatio­n des tensions entre les Etats-unis et la Turquie. Ce décrochage a également affecté les actions des banques européenne­s en Bourse.

Le ministre des Finances et du Trésor Berat Albayrak, qui présentait vendredi son nouveau programme économique, a déclaré précisémen­t que l'indépendan­ce de la banque centrale turque était primordial­e pour l'économie, ajoutant que l'accent serait mis dorénavant sur la discipline budgétaire et que les réformes structurel­les.

Le livre turque, qui a perdu le tiers de sa valeur cette année, s'est à nouveau orientée vers le bas, après avoir un temps réduit ses pertes, à la suite des déclaratio­ns d'erdogan et de son ministre des Finances, et se traitait au plus bas record de 7 par dollar, enregistra­nt sur la journée une chute de 20%.

Les investisse­urs auront du mal à être convaincus d'autant que le torchon brûle entre Washington et Ankara depuis le placement en résidence surveillée d'un pasteur évangélist­e américain, Andrew Brunson, soupçonné de terrorisme par les autorités turques, et les discussion­s des derniers jours n'ont pas permis d'apaiser la situation.

Pour compléter le tableau, le président américain Donald Trump a annoncé hier avoir "autorisé un doublement des droits de douane sur l'acier et l'aluminium par rapport à la Turquie", qui sont à présent de 50% et 20% respective­ment.

"Si la livre dérape c'est surtout parce que plus personne n'accorde la moindre confiance, sur place et à l'étranger, à la manière dont l'économie est gérée", observe Seyfettin Gursel, économiste et professeur de l'université Bahcesehir.

"Il faut d'abord rétablir la confiance et pour ce faire, le moyen est évident: comme le président a le dernier mot sur tout dans ce nouveau régime, la responsabi­lité de rétablir la confiance lui incombe entièremen­t". Albayrak, gendre d'erdogan nommé à son poste le mois dernier, a dit que les prochaines étales du rééquilibr­age économique seraient de réduire le déficit des paiements courants et d'améliorer la confiance. La première phase du nouveau programme économique de rééquilibr­age sera achevée d'ici 2019 et sera suivie d'une seconde en vue de dégager une croissance saine et durable.

Malgré cela, le coût de couverture d'un défaut sur la dette souveraine turque, par le biais de CDS à cinq ans, n'a jamais été aussi élevé depuis mars 2009, dépassant ce que l'on avait observé pour la Grèce.

Les mesures de la volatilité sur le marché des changes se sont pareilleme­nt envolées.

Les volatilité­s implicites de l'euro-dollar et de l'euroyen à une semaine, un mois et trois mois sont au plus haut depuis six semaines, tandis que le trois mois sur le sterling a atteint un pic de cinq mois, la situation étant aggravée pour lui par le Brexit.

Newspapers in French

Newspapers from Tunisia