Ankara gagne du terrain et obtient des soutiens européens
Après le doublement des tarifs douaniers sur l’acier et l’aluminium turcs, les Etats-unis ont menacé jeudi de frapper la Turquie avec de nouvelles sanctions si le pasteur américain Andrew Brunson n’était pas libéré. Au coeur de la tempête diplomatique entre les deux alliés de l’otan, l’homme de foi est accusé par Ankara d’espionnage et d’activités « terroristes ». Des menaces qui risquent de compromettre la convalescence de la livre turque, dont la valeur a fondu de 40% par rapport au dollar cette année.
La Turquie, qui avait annoncé mercredi une ribambelle de taxes sur des produits typiquement américains, cherche à redonner confiance aux investisseurs ébranlés par l’effondrement de la livre. Le pays a reçu le soutien de l’émir du Qatar Cheikh Tamime ben Hamad Al-thani qui a promis 15 milliards de dollars d’investissements. Par ailleurs, Ankara poursuit son opération de rapprochement avec les Européens… via la France. Le puissant ministre turc des Finances, Berat Albayrak, qui est aussi le gendre du président Receptayyip Erdogan, a assuré que son pays n’était pas en contact avec le FMI (Fonds monétaire international) pour un éventuel plan d’aide et qu’ankara n’aurait pas recours au contrôle des capitaux. Par ailleurs, il a promis aux investisseurs que son gouvernement aurait deux priorités : le combat contre l’inflation, qui a atteint près de 16 % en glissement annuel en juillet et discipline budgétaire. Ces annonces ont relativement rassuré les marchés et permis à la livre de reprendre des couleurs pour le troisième jour de suite.
Le secrétaire américain au Trésor, Steven Mnuchin, a averti que les Etats-unis prendraient des sanctions supplémentaires contre Ankara si le pasteur Brunson n’était pas libéré rapidement. Ce dernier a été placé le mois dernier en résidence surveillée après plus d’un an et demi d’incarcération. Un tribunal turc a rejeté mer- credi la levée de l’assignation à résidence de l’américain, mais son avocat a indiqué qu’une autre cour de plus haute instance devait encore se prononcer cette semaine.
Signe que la crise avec Washington incite la Turquie à renouer avec l’europe, le président Erdogan, qui s’était déjà entretenu au téléphone mercredi avec Angela Merkel, a eu un échange jeudi avec son homologue français. Tous deux ont souligné «l’importance de renforcer davantage les relations économiques» entre leurs deux pays. Emmanuel Macron a signifié «son attachement à une Turquie stable et prospère » et « assuré le président Erdogan du soutien de la France en ce sens » , a confirmé l’élysée. Le ministre turc des Finances, Berat Albayrak, qui rencontrera son homologue allemand Olaf Scholz le 21 septembre à Berlin, devrait s’entretenir «au plus vite» avec Bruno le Maire.