Le Temps (Tunisia)

Vingt-cinq ans de rendez-vous manqués

-

Il y a vingt-cinq ans, un vent d’optimisme soufflait sur la Maison Blanche. En ce 13 septembre 1993, Bill Clinton, bras écartés, saluait la poignée de main entre le premier ministre israélien, Yitzhak Rabin, et le chef de l’organisati­on de libération de la Palestine (OLP), Yasser Arafat. Négociés en secret auparavant dans la capitale norvégienn­e, les accords d’oslo reposaient sur une reconnaiss­ance mutuelle entre L’OLP et l’etat hébreu. Ils commençaie­nt àtracer un chemin par étape vers l’émergence d’un Etat palestinie­n. Deux ans plus tard, en novembre 1995, le premier ministre israélien était assassiné par un extrémiste juif. Les questions non résolues, brûlantes, demeuraien­t sur la table, comme le statut final de Jérusalem ou la question des réfugiés palestinie­ns et de leurs descendant­s. Malgré de nouveaux cycles de négociatio­n, la paix n’a cessé de se dérober. Tandis que le vocabulair­e d’oslo, autour du concept de « solution à deux Etats », se vidait peu à peu de sa substance, un profond pessimisme s’est installé au sein des deux sociétés.

Division et pessimisme

Côté palestinie­n, la division entre factions a provoqué la séparation de destin entre la Cisjordani­e et la bande de Gaza. Côté israélien, ce pessimisme s’explique par l’expérience des attentats sanglants de la seconde Intifada, au début des années 2000, et la prise de contrôle de Gaza par le Hamas après le retrait unilatéral des colons qui y vivaient. L’idée qu’il n’y avait pas de partenaire crédible pour faire la paix a fini par s’imposer. La colonisati­on s’est accélérée, au mépris du droit internatio­nal. De 113 000 environ au moment des accords d’oslo, selon l’organisati­on La Paix maintenant, le nombre de colons est passé à 413 000 fin 2017.

La Cisjordani­e est mangée, colline après colline, par les colonies. Dans le débat public israélien, des idées, encore marginales ces dernières années, comme l’annexion pure et simple de la zone C (60 % de la Cisjordani­e) ou la légalisati­on de tous les avant-postes, se sont banalisées à droite. La bande de Gaza est devenue, après un blocus de onze ans imposé par Israël et l’egypte, l’un des territoire­s les plus denses et les plus insalubres du monde.

Le «deal du siècle» de Trump

A cette atmosphère déjà lourde s’est ajoutée la présidence Trump. Dès son arrivée à la Maison Blanche, celui-ci a prétendu parvenir au « deal du siècle » au Proche-orient, en brisant, un par un, les fragiles consensus du passé. Sa stratégie consiste à favoriser un rapprochem­ent sans précédent entre Israël et les pays arabes, à commencer par l’arabie saoudite, en forçant la direction palestinie­nne à accepter une paix aux conditions les plus favorables possibles pour l’etat hébreu.

Le médiateur américain n’a jamais été impartial. Mais, cette fois, il est plus pro-israélien qu’israël, au risque de mettre en péril la sécurité à long terme de l’etat hébreu. La reconnaiss­ance unilatéral­e de Jérusalem comme capitale d’israël, puis les punitions financière­s contre les Palestinie­ns et l’arrêt du financemen­t de L’UNRWA, la mission de L’ONU pour les réfugiés palestinie­ns, portent en eux les germes de violences futures.

Israël s’est habitué à vivre avec l’idée qu’il payait un prix relativeme­nt faible pour l’occupation, notamment sur le plan internatio­nal – grâce à la protection américaine. Mais croire que les Palestinie­ns nés après Oslo, soumis au régime discrimina­toire de l’occupation, renonceron­t un jour à être des citoyens relève de la cécité politique.

Newspapers in French

Newspapers from Tunisia