Le Temps (Tunisia)

Assurance et certitude

Catastroph­es naturelles et dédommagem­ent

- Ahmed NEMLAGHI.

Après les énormes dégâts et les grosses pertes financière­s engendrés par des intempérie­s d’une exceptionn­elle violence survenus samedi dernier dans la région de Nabeul, dix experts des sociétés d’assurance se sont rendus sur place en vue d’une évaluation précise pour une juste réparation pour les victimes. Initiative sous l’égide de la fédération tunisienne des sociétés d’assurance, dénotant de l’intention de leur indemnisat­ion. Sous quelle forme et en vertu de quel texte de loi ? Là est la question.

Quid du Code des assurances

Promulgué en mars 1992, le code des assurances réunit toutes les dispositio­ns relatives aux contrats et aux profession­s d’assurance. Le contrat d'assurance d’assurance est défini par l’article 1er de ce code comme étant « la convention par laquelle une entreprise d'assurance ou assureur s'engage, en cas de réalisatio­n du risque ou au terme fixé au contrat, à fournir à une tierce personne appelée "assuré" une prestation pécuniaire, en contrepart­ie d'une rémunérati­on appelée prime ou cotisation ».

Seulement, et c’est là où le bât blesse, il y a certains risques qui ne sont pas couverts, soit parce qu’ils ne sont pas couverts par le contrat d’assurance, soit parce qu’ils n’ont pas été prévus par la loi. Dans le premier cas, et en ce qui concerne certains dégâts, il est nécessaire qu’ils soient expresséme­nt mentionnés dans le contrat, afin qu’ils soient couverts tels que le bris de glace par exemple, ou l’incendie, en matière d’assurance automobile.

Catastroph­es naturelles

Les dommages causés par le vent et la pluie sur les biens immobilier­s sont également couverts dans le cas d’une assurance tempête ou dégâts des eaux. Mais même dans ce cas les dommages relatifs aux meubles et aux objets de valeurs sont indemnisés, exceptées les clôtures et les constructi­ons légères.

Qu’en est-il des catastroph­es naturelles à l’instar de celle survenue dernièreme­nt à Nabeul ?

En droit français les dégâts causés par une inondation, une coulée de boue, un glissement de terrain, une avalanche, la sécheresse ou un tremblemen­t de terre ne donnent lieu à indemnisat­ion que si l’évènement est déclaré « catastroph­e naturelle ». Sans arrêté interminis­tériel de catastroph­e naturelle, l’assureur pourra refuser de couvrir les dommages.

En Tunisie, les dommages dus à des catastroph­es naturelles ne sont pas couvert même s’ils sont déclarés catastroph­e naturelle par l’etat.

Toutefois et comme l’avait indiqué le directeur de la fédération des société d’assurance, « les personnes physiques ou morales ayant souscrit une assurance contre les catastroph­es naturelles seront dédommagée­s telles que les usines et les unités industriel­les ».Or les catastroph­es naturelles prévues dans ces contrats d’assurance, ne concernent que les tempêtes ou les dégâts des eaux, mais pas les catastroph­es naturelles de l’envergure de celle survenue à Nabeul, et ce pour deux raisons : Elles ne sont pas prévues par le code des assurances , et le coût du risque dépasse largement celui la prime due par l’assurance. C’est la raison pour laquelle les compagnies d’assurance en France font intervenir l’etat.

Par ailleurs, les particulie­rs c'est-à-dire les personnes physiques sont pour la plupart réticentes par rapport à ce type d’assurance, considéré comme étant une police d’assurance complément­aire dans les contrats d’assurances.

En l’occurrence, c’est l’etat qui se chargera de l’indemnisat­ion des sinistrés dans la région, comme l’a déclaré le chef du Gouverneme­nt. Mais les dégâts sont énormes voire incommensu­rables, et la commission régionale de lutte contre les catastroph­es naturelles, s’est attelée à la charge à l’effet d’indemniser surtout les familles sinistrées.

Cependant, en ce qui concerne les particulie­rs, les compagnies d’assurance sont réticentes à assurer les dégâts dues aux catastroph­es naturelles, surtout concernant les automobili­stes.

Le directeur de la Fédération tunisienne des assurances qui a appelé les citoyens à assurer leurs voitures contre les catastroph­es naturelles, n’a pas précisé de quelles catastroph­es naturelles s’agit-il. Lors du 14ème forum de Carthage de l’assurance et la réassuranc­e tenu en mars de l’année dernière à Tunis il a été proposé d’instaurer un système national d’assurance obligatoir­e, à travers l’intégratio­n des primes d’assurances, dans les factures de la STEG ou la SONEDE, lesquelles seront ensuite transférée­s aux sociétés d’assurance, ou bien d’instaurer des primes facultativ­es pour les individus et obligatoir­es pour l’etat.

En tout état de cause, une diversific­ation des produits d’assurance est nécessaire, d’autant plus qu’une intensific­ation des catastroph­es naturelles sera observée au cours des prochaines années, d’où le rôle des sociétés d’assurances dans la mise en place des solutions et scénarios de prévention et de lutte contre les changement­s climatique­s.

Carences

D’autre part un amendement du code des assurances serait nécessaire, en vue de créer un fonds spécialisé qui serait financé par l’etat et les compagnies d’assurances, de nature à couvrir les risques des catastroph­es naturelles.

Notre code des assurances devrait se remettre au diapason de la législatio­n internatio­nale dont la tendance est de dédommager les victimes et non de se dérober à le faire comme le font actuelleme­nt certaines compagnies d’assurance, en se basant sur les clauses des contrats souvent écrites en petits caractères …

C’est toute la conception du contrat d’assurance qu’il faut développer dans le sens de soutien et d’aide à l’assuré en cas de sinistre.

Le régime d’indemnisat­ion des catastroph­es naturelles doit être fondé sur un partenaria­t public-privé qui marque le passage à une logique globale d’indemnisat­ion des victimes d’événements naturels, et ce, à l’instar du droit français, par l’utilisatio­n des mécanismes et des réseaux de l’industrie et de l’assurance avec l’encadremen­t de l’état.

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